Pour la démocratie et la République, faisons front ensemble

Le premier tour des élections offre l’image saisissante d’une France qui se cabre devant le gouffre mortel, mais dont le mouvement suspendu peut à tout instant devenir une chute.

L’extrême-droite totalise désormais un tiers des français. C’est énorme, et c’est peu à la fois. Prenant son élan d’un peu plus haut il y’a trois semaines, profitant de la dynamique incontestable qui était la sienne, de la libération de la parole raciste et d’un rejet du pouvoir en place, ayant absorbé le suc vital du zemmourisme et brisé la nuque des Républicains pour se repaître de leur moëlle, peu de choses semblaient pouvoir l’arrêter. Mais la voici épuisée à quelques pas du pouvoir et son effort ne la porte pas plus loin.

Dans notre système majoritaire, sans réserve de voix pour le second tour, la vague devrait s’arrêter là. Mais l’extrême-droite peut compter sur des forces puissantes. La lâcheté, l’ambition non récompensée, les audaces folles de tous ceux qui jonglent avec le coup d’après. Pour franchir le seuil, il lui suffit en fait de l’abdication de l’esprit républicain de quelques uns.

Déjà ils apaisent leur conscience pour se pardonner de toucher leurs trente deniers, ou de se laver les mains du destin commun. Ce ne sera pas si grave, disent ils. Au final, ils en ont rabattu sur leur programme. Meloni n’est pas Mussolini réincarnée, peut-être exagère-t-on tout cela ? Bien entendu, ce sera un peu désagréable pour les musulmans, mais est-ce le seul problème aujourd’hui ? Je ne peux tout de même pas non plus cautionner Mélenchon et son histrionisme antisémite. Il y a surement des gens raisonnables chez eux avec lesquels on pourra s’entendre. Et si nécessaire, je peux me sacrifier pour être l’une de ces personnes raisonnables.

Ce sera grave. L’exemple de Trump, de la Pologne, de la Hongrie, de l’Italie montre que les mécanismes de démocratie sont érodés petit à petit, jusqu’à réduire la possibilité pour les opposants de retrouver le pouvoir. Et la France est un pays où le gouvernement règne sans contrepouvoirs. Les accommodements raisonnables, rapidement, cesseront de l’être.

Le devoir de chacun d’entre nous est simple : empêcher l’extrême-droite de s’installer dans cette République autoritaire pour n’en conserver que l’autoritarisme.

Pour les citoyens, ceci signifie qu’il faudra voter pour le candidat en mesure de battre le RN, quel qu’il soit. Les préventions ici ne comptent pas. Personne d’autre n’est en mesure d’obtenir seul la majorité, et donc de représenter un danger. De fait, face au RN n’existe plus que la grande coalition de la République.

Pour les responsables politiques, ceci signifie le Front Républicain : le candidat arrivé troisième face au RN doit se retirer.

Le Pacte du pouvoir de vivre, dont nous sommes membres, porte la même conviction.


Sauvons l’Europe a signé cette semaine un appel de 250 personnalités en ce sens, et plutôt trois fois qu’une ! Nous partageons chaque ligne de ce texte, également publié dans le Monde, et que nous vous invitons à rejoindre et à partager.

Social, fiscalité, énergie, sécurité, justice, éducation… Nous avons défendu, nous défendons et nous défendrons demain des politiques opposées dans de nombreux domaines. Certains et certaines d’entre nous ont soutenu Emmanuel Macron depuis 2017 tandis que d’autres l’ont combattu depuis le premier jour. Face à l’échéance du 7 juillet prochain, il nous parait néanmoins indispensable de contribuer ensemble à éviter la catastrophe démocratique, économique, sociale et écologique que constituerait l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite.

Le ravalement de façade opéré ces dernières années par le Rassemblement National ne doit tromper personne en effet : l’extrême droite reste ce qu’elle a toujours été, une ennemie décidée de la démocratie et un propagateur de haine. Sa victoire impliquerait la fragilisation du soutien à l’Ukraine, l’arrêt de la transition écologique, l’étouffement des libertés publiques, l’institutionnalisation du racisme et de la xénophobie, la paralysie de la construction européenne, la remise en cause des droits des femmes et le déclenchement d’une crise économique et financière majeure…

On entend souvent dire que, confrontée à l’exercice du pouvoir, l’extrême droite ferait la preuve de son incapacité à gérer le pays et qu’ainsi, elle s’affaiblirait d’elle-même. Elle rencontrerait à coup sûr de grandes difficultés au vu de son programme démagogique mais nous mettons en garde contre cette dangereuse illusion. Comme de nombreux exemples l’ont montré, dans le passé mais aussi aujourd’hui en Hongrie avec Victor Orban ou encore en Russie avec Vladimir Poutine, l’extrême droite excelle à changer les règles du jeu, éliminer les contre-pouvoirs et anesthésier le débat public. On sait quand elle arrive au pouvoir mais on ne sait jamais quand et comment elle le quittera.

Malgré les profondes divergences qui existent entre les forces démocratiques, il nous parait donc indispensable qu’elles s’entendent pour empêcher que le Rassemblement National n’obtienne une majorité à l’Assemblée nationale le 7 juillet prochain. Cela implique d’éviter les triangulaires au second tour en retirant le candidat ou la candidate moins bien placé et de soutenir partout activement le candidat ou la candidate des forces démocratiques restant face au Rassemblement National. Pour accélérer la mobilisation citoyenne face au RN, ce choix devrait être affiché clairement dès maintenant, sans attendre le 30 Juin, par les responsables de toutes les forces démocratiques, qu’elles appartiennent au Nouveau Front Populaire, à la majorité sortante ou à la droite républicaine.

Nous mesurons combien ce choix est difficile compte tenu de l’importance des divergences qui ont opposés les uns et les autres au cours des dernières années et des fortes tensions qui ont existé au sein de la société française. Mais, dans les circonstances présentes, il est indispensable de surmonter ces rancœurs et de faire preuve de responsabilité pour préserver la démocratie et la République.

 

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7 Commentaires

  1. Bonjour. Traiter d’antisémite Jeanluc Mélenchon et à fortiori l’ensemble du parti LFI, est un outil politique calomnieux et assez abject utilisé depuis que ce parti gagne des électeurs par certains macronistes aux abois, l’ensemble de la droite, et, bien sûr, l’extrême droite. S’il vous plait ne tombez pas vous aussi dans ce travers, surtout lorsqu’il s’agit de faire un appel au rassemblement contre l’extrême droite. Melenchon, malgré tous ses défauts, n’est pas antisemite. Vous pouvez exprimer votre total désaccord politique avec LFI mais ce n’est pas un parti antisémite. On peut trouver facilement plusieurs tribunes écrites à ce sujet, notamment par des intellectuels juifs, je ne vais chercher moi à vous le démontrer ici. Quant à la personnalité de Mélenchon et son histrionisme, ils sont causes de désarroi pour beaucoup de gens qui partage ses idées politiques, et j’en fait parti, mais ils ne doivent pas servir d’excuses politiques à ceux qui ont intérêt à ébrécher le front démocratique que vous appelez de vos vœux contre l’extrême-droite. Vœux que je partage totalement.

  2. L’extrême droite ne totalise pas 1/3 des français, comme vous l’assurez en début d’article mais 1/3 des électeurs ayant voté.
    MERCI d’être précis, surtout avec ce type d’information.
    Il existe en France des jeunes qui n’ont pas le droit de vote mais qui de toute évidence ne voteraient pas pour le RN. Il existe aussi en France des électeurs n’ayant pas eu envie de se déplacer aux urnes et refusant ce simulacre de démocratie, voir refusant de se soumettre à la décision jupitérienne.
    Je n’approuve pas cette démarche. Je la reconnais comme existante et je me dis qu’il faut en tenir compte, si l’on prétend vouloir sauver le peu qu’il reste de notre démocratie.

  3. La désindustrialisation en France et le développement de « faux » emplois déracinant sous-payés , très ennuyeux et très dévalorisants ont poussé une grande partie des français dans l’épuisement et la honte (sans oublier que le nombre de chômeurs additionné à celui des bénéficiaires du RSA et de ceux qui n’obtiennent plus d’aides ne diminue pas).
    L’humiliation sociale et culturelle est, selon moi, l’explication du retour de l’extrême droite en France. Le nombre d’électeurs se rapprochant de la pensée d’extrême droite et acceptant de voter pour un parti la mettant en valeur augmente incontestablement. De grands écrivains (souvent juifs) du XXme ont démonté dans ses moindres détails un mécanisme socio-psychologique très probable et souvent implacable, celui d’une situation autant économique que culturelle, poussant une partie grandissante de la population dans la honte et l’humiliation, et non pas la peur, l’humiliation est le maître mot de l’apparition ou du retour de l’adhésion à des idées fascisantes, un peu partout dans le monde aujourd’hui. Les Allemands ont été humiliés à l’issue de la 1re Guerre mondiale et réduits à la misère pendant la crise de 29 et ce sont ces phénomènes qui ont exacerbé leur haine des juifs et leur désir de puissance et de domination du monde, en plébiscitant le projet hitlérien de la race aryenne, lié au génocide des juifs et des communistes et de tous les « non-normés » ou « dégénérés », et d’ une industrie de l’armée allemande surpuissante (annoncés dans son « Mein Kampf » qu’il avait publié et qui avait été déjà largement lu à l’époque de son élection en 33).
    Les politiques néolibérales et le profond désir de désindustrialiser pour se débarrasser des syndicats et des coco en France, ont favorisé le rejet de millions de français « moyens » en train de se « noyer », méprisés autant par les politiques que par les médias qui assimilent la LFI et le RN sur des mensonges calomnieux, les financeurs de nos médias étant principalement des millionnaires ou milliardaires fascistes (ils s’affichent de plus en plus comme soutiens du RN et de ses idées, Bolloré étant la figure de proue de cette caste néfaste). L’annonce du démentellement du Service publique de l’audiovisuel est objectivement catastrophique et révélateur de la façon dont les politiques favorisent la montée des idées fascistes en France.

    • Cette analyse m’apparaît très pertinente. J’y ajouterai une social-démocratie européenne qui, au lieu de promouvoir l’objectif d’un socialisme démocratique à atteindre par la voie pacifique, se dévoie, à partir du début des années 80, dans le libre marché capitaliste, l’austérité économique pour les travailleurs, la privatisation des services publics, la défiscalisation des revenus du capital, le démantèlement du droit du travail et de la sécurité sociale, etc…

  4. Je ne vous savais ps aussi haineux et aussi lâches devant l’islamo-gauchisme. Ainsi donc vous préférez une France dévaluée, submergée par des populations qui veulent nous soumettre à leurs mœurs moyenâgeuses. Vous donnez dans le wokisme, l’écriture dégénérée dite inclusive; Pouah ! Vous m »écœurez.
    Je vous mets au défit de démontrer, preuves à l’appui, en quoi le RN n’est pas républicain. Au moins lui, aime et respecte le France de toujours. Pas celle que vous attendez impatiemment.
    De ce pas, je vous mets en indésirable et me désabonne. Pas la peine de perdre du temps à lire vos insanités.

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