Ça sera le cœur lourd, pour une trop grande partie d’entre elles et eux, que les travailleuses et travailleurs rejoindront les cortèges du 1er mai en cette année 2025. La semaine dernière, l’annonce est tombée comme un couperet pour les salarié·es d’ArcelorMittal : 630 postes supprimés en France, sur sept sites, dont Dunkerque, Florange et Basse-Indre. Cette décision intervient malgré des aides publiques substantielles, jusqu’à 850 millions d’euros pour la décarbonation du site de Dunkerque.
Ce n’est malheureusement pas la première en date, comme des mobilisations récentes en Belgique, Allemagne ou Italie l’ont montré : la Confédération européenne des syndicats (CES) estime que 2,5 millions d’emplois ont disparu dans le secteur manufacturier depuis 2008, dont 100 000 emplois rien que dans l’industrie sidérurgique européenne.
Et la situation se détériore rapidement : plus de 90 000 suppressions d’emplois ont été annoncées dans le secteur automobile depuis juin 2024. Les restructurations ne se limitent pas à l’industrie. D’autres secteurs, également confrontés au risque de licenciements forcés et de fermetures, affaiblissent l’économie européenne et entraînent la perte de milliers d’emplois.
Un projet européen sans le charbon et sans l’acier ?
Florange, l’un des sites les plus touchés par les suppressions d’emplois annoncés par ArcelorMittal, est un symbole et un pilier de l’industrie régionale de l’Est de la France, aussi implantée dans le paysage que dans les histoires familiales. La symbolique de la sidérurgie dépasse ce seul territoire, au cœur de l’Union européenne : c’est par elle tout a commencé, avec la CECA, la communauté européenne du charbon et de l’acier. Si le charbon n’a plus le vent en poupe, et que son caractère à la fois éphémère et polluant nous poussent à le remplacer, il n’est pas aujourd’hui question de se passer d’acier, alors que la souveraineté de notre continent passe par une réindustrialisation et que l’acier est un composant indispensable de nombre de biens qu’il nous faut pouvoir produire nous-même.
Le Pacte pour une industrie propre, présenté par la Commission européenne fin février, devrait mobiliser plus de 100 milliards d’euros pour soutenir la décarbonation et la compétitivité industrielle, avec un accent particulier sur l’acier vert. Pourtant, sans mesures immédiates et conditionnalités sociales fortes, ces mesures risquent de n’être qu’un coup d’épée dans l’eau.
Au-delà des emplois, la démocratie sociale en souffrance
Le 1er mai, journée internationale des travailleuses et des travailleurs, célèbre les luttes historiques pour les droits sociaux et la solidarité. Cette année, en plus des quelques 500 emplois qui disparaissent chaque jour (toujours selon la CES), les menaces se portent également sur notre démocratie, par des régimes illibéraux de plus en plus nombreux, qui ont en commun de toujours attaquer les droits des travailleuses et des travailleurs.
Cela n’est pas un hasard si les premières mesures de simplification dans le premier paquet « Omnibus » viennent toucher la responsabilité sociale des entreprises et le devoir de vigilance : ces mesures venaient mettre à mal la concurrence entre travailleuses et travailleurs, et entre territoires, à l’heure où le travail des enfants est encore loin d’être éradiqué, revenant même à l’ordre du jour aux Etats-Unis.
Alors, soyons nombreuses et nombreux dans les rues ce 1er mai, avec nos collègues, nos camarades, nos familles, pour que cette solidarité vive et continue à s’organiser.