Nous rendons hommage à Malcolm Anderson, qui fut recteur de la faculté des Sciences sociales de l’Université d’Edinbourg et président de l’Association Mondiale des Études Européennes. Précurseur de l’étude des frontières, notamment en Europe, il était membre et contributeur de Sauvons l’Europe. Notre ami s’est éteint dans le village de Lescun au cœur de la vallée d’Aspe à quelques encablures de la frontière espagnole. Son collègue Nigel Bowles de l’Université d’Oxford dresse son portrait :
Malcolm était – Malcolm a toujours été – fier d’être Européen. Comme Thomas Mann avant lui, Malcolm a pensé que l’idée de l’Europe était “précieuse”. Ayant vu de ses propres yeux, alors qu’il n’était encore qu’un jeune étudiant, les effets funestes du fascisme pour la civilisation européenne en général, et en Italie, en Allemagne, en Espagne et dans le Portugal en particulier, il engagea le tout de sa vie professionnelle pour développer la vision qu’il partageait avec Mann – celle de chercher le rapprochement le plus possible entre les nations européennes, pour soutenir l’humanité, la sécurité et le bien-être économique.
Le plus civil et le plus tolérant des gens, Malcolm était découragé par le scepticisme britannique à l’égard de l’intégration européenne, qu’il s’agisse de la Communauté Économique de 1958, du Mécanisme de Taux de Change, du monnaie unique, l’espace Schengen ou la structure européenne de défense et de sécurité.
La Grande-Bretagne a depuis 1945 été perversement brillante pour rater des opportunités européennes. Sa préoccupation culturelle de regarder à la fois vers l’intérieur et vers l’arrière en cherchant la chimère des gloires passées plutôt que d’attendre avec impatience les possibilités de la nouvelle Europe, a accéléré le déclin de mon pays.
Pourtant, même si Malcolm avait des regrets à propos de la folie de la politique européenne chez les gouvernements britanniques, et de l’étroitesse d’esprit de l’électorat britannique sur ce sujet, il agissait à Édimbourg comme aux universités de Manchester et de Warwick, toujours optimiste pour la compréhension académique et publique de l’Europe. Ainsi, avec Jacqueline Lastenouse et Émile Noël, il a joué un rôle majeur dans la création et la promotion du Programme Jean Monnet par lequel des quelques 1000 chaires éponymes ont été créées pour l’enseignement et la recherche sur l’intégration européenne, réalisation léguée en héritage pour des générations futures d’universitaires.
« Une enquête sur les frontières comme marqueurs d’identité pose un problème intellectuel d’un autre ordre, car elle implique une exploration du monde de l’imaginaire. Les identités sont des constructions imaginaires – fluides, malléables et difficiles à définir. La création et la transmission des formes culturelles, constitutives d’identité quand elles sont internalisées, peuvent être l’objet d’enquêtes de la part d’anthropologues : le résultat de cette analyse sera lui-même un travail de l’imagination dans lequel les frontières auront joué un rôle clef »
Malcolm Anderson « Les frontières : un débat contemporain », cultures et Conflits 1996
[author title= »Nigel Bowles » image= »https://www.sauvonsleurope.eu/wp-content/uploads/2022/10/nigel-bowles.jpg »]Senior Research Fellow, Former Corpus Christi College, Oxford University[/author]