La Première ministre suédoise Magdalena Andersson nous a accordé un entretien en octobre dernier, sur la manière dont les partis conservateurs ont trahi leurs valeurs pour s’emparer du pouvoir. Mais nous avons également échangé sur la guerre en Ukraine et l’avenir du modèle social-démocrate.
Madame la Première Ministre, merci beaucoup de répondre à nos questions.
Le modèle social-démocrate a été d’accroître la sécurité sociale et l’Etat providence pendant une longue période. Vous avez atteint un niveau d’impôts très élevé en Suède, donc vous ne pouvez plus tellement l’étendre. Quelle direction pouvez-vous prendre à partir de là ?
Hé bien, en fait le gouvernement conservateur de 2006 à 2014 a significativement réduit les impôts suédois et particulièrement les impôts sur le capital, qui sont désormais bas en Suède comparés aux autres pays européens, donc il y a définitivement un potentiel pour augmenter l’impôt sur le capital et les bénéfices financiers en Suède. C’est quelque chose que nous avons proposé pendant la campagne électorale mais il est toujours important quand on propose une politique économique de s’assurer que les impôts que vous prélevez, vous les utilisez correctement, de la meilleure manière et il faut aussi toujours penser les réformes pour qu’elles s’insèrent dans une politique budgétaire responsable.
Merci. Vous avez perdu cette élection. Le Parti Social-Démocrate a gagné des voix et en pourcentage, mais les partis conservateurs se sont détournés et se sont alignés sur des mouvements d’extrême-droite pour saisir le pouvoir. Quelle est votre opinion sur ce point ? Est-ce une menace que nous voyons apparaître ailleurs en Europe ?
Oui, le fait est que nous avons réussi une bonne élection et que nous avons obtenu plus de votes et 2 points de pourcentage, nous avons plus de 30 pourcent aux élections nationales mais nous allons également diriger plus de municipalités et de régions du fait de ces bons résultats électoraux.
Mais nous avons perdu le pouvoir au niveau national et c’était le choix des deux partis conservateurs – les Démocrates Chrétiens – et aussi le parti « Libéral » de travailler avec les Démocrates Suédois qui ont été fondés par des néo-nazis suédois plutôt que de nous rejoindre et bien entendu nous allons devoir recommencer et réfléchir à comment toucher plus des ces gens qui ont voté pour les Démocrates Suédois, dont beaucoup sont des ouvriers qui pourraient voter pour nous, comment les faire revenir vers nous. Je crois que le problème le plus important est de proposer de meilleures solutions politiques qui répondent aux difficultés qu’ils rencontrent dans leur vie quotidienne et qui leur donnent de l’espoir pour un futur plus favorable.
Après la chute du Mur, la Suède est restée neutre pendant longtemps. L’invasion de l’Ukraine par la Russie vous a poussé avec la Finlande à vous rapprocher de l’OTAN. A quel point pensez-vous que la situation a changé par rapport à l’ère que nous avons connue ?
Nous vivons dans un monde complètement nouveau.
Nous avons vu une détérioration de la situation sécuritaire en Europe et particulièrement dans la région Baltique depuis plusieurs années, alors que la Russie augmentait ses dépenses militaires et se montrait plus active, et aussi après l’annexion de la Crimée, mais avec cette invasion totale nous sommes dans un monde complètement différent et nous devons repenser, et en Europe nous avons été capables de repenser. Je veux dire, les sanctions contre la Russie, c’est quelque chose que nous nous n’aurions jamais envisagé avant. Avec l’ensemble du soutien à l’Ukraine, à la fois financier et humanitaire mais aussi militaire, et l’unité que nous avons démontrée qui sont tellement importants.
Mais évidemment, pour la Suède et la Finlande, cela nous a obligé à repenser notre situation de sécurité et nous a conduit à la conclusion que l’appartenance à l’OTAN est la bonne direction.
En France, cela doit vous rappeler quelque chose où, aux dernières élections législatives, un certain nombre de macronistes et de LR ont appelé à voter RN plutôt que pour la Nupes au second tour.
La droite, c’est la droite… Ses valeurs tournent autour de l’argent mais jamais sur une certaine compassion de ceux qui ont le minimum.
En France c’est surtout LFI qui a voulu faire barrage à la majorité relative en s’abstenant à 41% et même en votant pour le RN à 17%.
1) LFI n’a jamais appelé à voter RN, cette formation a appelé explicitement à ne pas voter RN (Mélenchon l’a répété trois fois le soir du 1er tour). Des cadres et mandataires macronistes et LR ont appelé à voter RN lorsqu’un candidat Nupes était en position de gagner dans certaines circonscriptions au 2ème tour. C’est un fait avéré qui a été dénoncé d’ailleurs dans ces colonnes.
2) Les 17% en question sont une estimation de sondeurs d’opinion et donc à prendre avec réserve. Les dirigeants de LFI ne sont pas responsables de la manière dont certains de leurs électeurs (au 1er tour) ont voté au 2ème tour.
3) La Nupes est une coalition de gauche comprenant LFI, socialistes, EELV et communistes et ne peut être confondue avec la seule LFI.
4) Le président Macron a été réélu grâce à de nombreux votes de gauche voulant faire barrage à l’extrême droite. Ce qui ne l’empêche pas de mener une politique à droite toute.
Bonjour.
En Europe comme en France, le citoyen est déboussolé par le comportement des politiques et gouvernants actuels, c’est un terreau pour la montée des extrêmes, ils ne retiennent aucunes leçons du passé, comprendre l’histoire rend fou ……