Baptiste Ménard inaugure une série de contributions sur l‘enfance, un enjeu qu‘il défend et dont il estime qu‘elle devrait être une compétence régalienne des Etats membres de l‘Union européenne. Protéger l‘enfance, telle doit être la priorité de chaque pays. Pour tout humaniste, cette cause est essentielle : elle engage l‘égalité de traitement et les fondements mêmes sur lesquels repose notre société. Cette série explorera les défis de la protection de l‘enfance et le rôle que l‘Europe doit y jouer.
Il nous faut bien sûr lutter pied à pied contre toutes formes d‘injustice qui frappent les enfants de nos pays, et pas seulement les plus pauvres et/ou les plus isolés. Pour y parvenir, l‘Europe doit bâtir des politiques transversales touchant de nombreux domaines.
Cependant, et ce n‘est point le moindre des paradoxes, la compétence concernant l‘enfance demeure très majoritairement nationale. Pour autant, nous voyons se multiplier les situations dramatiques et alarmantes sur l‘ensemble du territoire européen. C‘est ce contexte singulier qui justifie plus que jamais une mobilisation totale.
Première stratégie globale au sein des Vingt-Sept en 2021
Travail forcé, maltraitance infantile, extrême pauvreté… Les combats pour le bien-être de nos enfants ne manquent pas. À ce titre, les rapports des acteurs associatifs et publics sont sans appel : l‘heure n‘est plus au constat mais bien à l’urgence de l‘action. Et si des initiatives européennes sur les droits des enfants sont désormais plus nombreuses, il demeure un besoin de coordination des actions mais aussi de désignation d‘un interlocuteur, fort politiquement et consensuel, afin de porter haut cette cause.
À cela s‘ajoute la Garantie européenne pour l‘enfance, qui assure l‘accès gratuit à des services essentiels (soins, éducation, logement) pour les enfants vulnérables, notamment ceux vivant dans la pauvreté, en situation de handicap ou migrants.
Cette démarche marque un engagement fort de l‘Union européenne, mais sa mise en œuvre reste inégale et, surtout, non contraignante. Pire encore, certains Etats membres – pourtant volontaires – peinent à l‘appliquer concrètement sur leur territoire.
22 % des enfants de l’UE menacés de pauvreté ou d‘exclusion sociale
Les chiffres, édifiants, racontent cette douloureuse réalité : près de 22 % des enfants dans l‘Union européenne, soit 18 millions, sont menacés de pauvreté ou d‘exclusion sociale. Dans les pays les plus touchés, comme la Roumanie ou la Bulgarie, plus d‘un enfant sur trois vit sous le seuil de pauvreté. La crise de la Covid-19, encore récente, a aggravé ces inégalités, privant des milliers d‘entre eux de besoins essentiels : santé, éducation, alimentation. Une réalité inacceptable. La pauvreté des enfants est un fléau qui doit être combattu sans relâche. L‘Union européenne doit en faire un des chantiers prioritaires.
Au-delà du drame de la pauvreté des enfants, d‘autres chantiers majeurs exigent notre attention (et feront l‘objet d‘articles complémentaires) : comment renforcer la protection de l‘enfance dans une Europe fragilisée par la montée des extrêmes et du libéralisme ? Comment harmoniser les politiques nationales et mobiliser des financements à la hauteur des enjeux ?
Former les professionnels, intégrer les enfants aux décisions qui les concernent, bâtir une véritable politique de prévention, soutenir les familles… Autant de chantiers essentiels pour passer des intentions aux actes.
In fine, et alors que l‘article 2 du Traité de Lisbonne affirme que l‘Union Européenne : « combat l‘exclusion sociale et les discriminations et promeut la justice et la protection sociales, l‘égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l‘enfant » – nous ne pouvons pas envisager que cette dernière notion ne soit pas respectée.
La protection de l‘enfance n‘est donc pas qu‘un devoir moral, mais une question d‘éthique et de responsabilité de nos dirigeants politiques européens. Ils ont l‘ardente obligation de s‘investir dans cette grande cause, qui devrait d‘ailleurs devenir celle de toute l‘Union, pour la nouvelle législature qui s‘est ouverte en juin dernier.
Chaque enfant européen constitue un maillon essentiel de la construction de l‘avenir serein d‘une Europe plus forte, plus solidaire et résiliente. Les Etats membres doivent pouvoir compter sur le soutien réel et actif de l‘Union Européenne pour mener des politiques publiques efficaces et efficientes.
L‘enfant doit devenir le cœur de nos politiques européennes. Ses droits fondamentaux doivent être une réalité de tous les jours. Le moment est venu d‘agir avec conviction et force pour eux et avec eux. Ils le méritent et l‘attendent.