En cette matinée pluvieuse du 1er janvier 2013, Dominique Strauss-Kahn, élu 7 mois plus tôt, le 31 mai 2012, à la présidence de l’Union européenne, à la suite du terme du mandat de Herman Von Rompuy, contemple le bel ordonnancement des jardins de son bureau à Bruxelles. Enfin, un peu de repos…
Quelle bataille il lui a fallu mener ces six derniers mois pour sortir enfin l’Europe de l’impasse politique et financière dans laquelle la somme des renoncements collectifs et des lâchetés individuelles avait fini par l’enfermer !
D’abord, il lui a fallu réagir sans attendre à la dégradation du triple A de la France et de huit autres pays européens par Standard & Poor’s le 13 janvier.
À l’évidence, l’accentuation de la flexibilité du marché du travail en Europe doublée de la mise en place de la TVA sociale envisagée dans certains pays auraient condamné la zone euro à un long chemin de douleur sans mettre fin à la spirale des plans de rigueur, de la récession, et de la hausse du coût de l’endettement à l’œuvre depuis l’été 2011.
Il fallait donc commencer par convaincre Angela Merkel puis la Commission européenne de revoir la philosophie même du Pacte de Stabilité et de Croissance.
Accepter d’inscrire dans l’ensemble des Constitutions des Etats européens une règle constitutionnelle les obligeant à un retour immédiat à l’équilibre budgétaire sous la sanction de pénalités quasi-automatiques en cas de dérapage des déficits publics, aurait été folie !
C’était signer sans nul doute la chute de l’Europe dans une récession immédiate et prolongée… l’impossibilité pour les Etats de suivre le tempo… relancer la défiance des marchés et une nouvelle envolée des taux d’intérêts en Europe, aggravant du même coup l’insurmontable chemin de croix qui leur aurait été imposé au nom de l’assainissement de leurs finances !
Sa première initiative fut donc d’aller rencontrer Angela Merkel, et de refuser les termes de cette exigence, que la Chancelière souhaitait conditionner à la poursuite de sa solidarité financière avec les pays en difficulté.
« La solidarité financière entre les Etats européens est non négociable. L’urgence est de rendre confiance aux Européens en construisant une autre Europe : celle de la croissance et de la solidarité », avait-il asséné à une Chancelière ébahie de tant de fermeté !
C’est ainsi que le nouveau président de l’Union européenne lui arracha – de haute lutte ! – un nouveau compromis politique pour une Europe rénovée dans ses dimensions sociale et industrielle en échange du renforcement de la gouvernance économique de la Zone Euro.
Le nouveau président obtint de la Chancelière allemande puis des Européens, durant l’été, un nouveau Traité encourageant la Banque centrale européenne à faire davantage à l’avenir pour aider la zone euro face à la crise de la dette. Il les convainquit aussi de renforcer les moyens du Fonds de secours permanent de la zone euro pour les pays fragiles, et de doubler le budget européen d’ici 2020. Une rupture à la pratique constante de ses prédécesseurs de le ligoter, programmation budgétaire après programmation budgétaire, à 1% à peine du PIB européen !
Parallèlement, il débloqua, par un mélange de fermeté et d’habilité qui était son propre, les difficiles négociations de la Grèce avec ses créanciers privés, arrachant l’annulation de 50% de leurs créances, ce qui permit le déblocage du second plan d’aide au pays de 130 milliards d’euros, promis par les Européens en octobre 2011.
Lui succédèrent la création du NIE (Nouvel Impôt Européen) et la mise en place de la TTF (Taxe sur les Transactions Financières) à compter de 2013. Puis la mise en place du nouveau budget commun d’investissement européen et des dix nouvelles Universités européennes dans les sciences du savoir en Europe, dont trois d’entre elles à Strasbourg, Verdun et Aix-La-Chapelle…
La relance des coopérations en Europe dans le domaine industriel et le doublement du capital de la Banque Européenne d’Investissement, ainsi que l’annonce de 200 milliards de nouveaux projets d’investissement dans les infrastructures, la Recherche et les nouvelles technologies financées par un Grand Emprunt Européen dès 2013.
La fondation d’une Agence Européenne pour l’innovation industrielle, d’un Brevet Européen et celle d’une véritable Communauté européenne de l’énergie destinée à doter l’Union des instruments de son indépendance énergétique à l’horizon de 2030 : investissements collectifs dans les réseaux de distribution, accélération des investissements dans les énergies propres et alternatives, mise en place d’initiatives communes sur les liaisons ferroviaires trans-européennes…
Puis vient la décision de doubler les financements du mécanisme européen de stabilité financière et d’augmenter les transferts financiers en faveur des pays du Sud de l’Europe de plus de 50% d’ici 2020. Deux mesures indispensables pour permettre aux plus déstabilisés par la crise des dettes souveraines de mettre en œuvre, avec le temps nécessaire, les réformes de structure nécessaires à leur ajustement financier et au renforcement de leur compétitivité.
Last but not least, l’instauration des euro-obligations fut arrachée au Sommet de Paris en octobre. Le nouveau président du Conseil européen avait suggéré d’en faire, non pas un moyen de « contourner » les règles d’ajustement budgétaire du Pacte de Stabilité renforcé à l’été à la demande de l’Allemagne – comment, en effet, convaincre l’Allemagne d’Angela Merkel sur ces bases ?! – mais d’en faire la « récompense » des progrès des Etats sur leur chemin d’un retour à l’équilibre vertueux de leurs comptes publics.
Désormais, chaque Etat européen bénéficiera – une fois par an et sur proposition de la Commission européenne après décision à la majorité qualifiée du Conseil européen – de la possibilité de refinancer une partie de sa dette par des obligations européennes garanties en commun par tous les Etats. Dans une proportion d’autant plus importante qu’il aura respecté sa trajectoire de réduction des déficits !
Voilà de quoi permettre à l’Europe de mutualiser une partie des dettes souveraines, et de rééquilibrer – enfin ! – la nouvelle « Union de stabilité budgétaire » en faveur de l’objectif de croissance.
Enfin, à la fin de l’automne, il a fallu revoir dans ses objectifs la réforme des Traités, annoncée pour 2013 afin de la réorienter vers la démocratisation des institutions. Désormais le Président de la Commission européenne sera élu directement par le Parlement européen et son pouvoir renforcé vis-à-vis du Conseil… des élections européennes seront instaurées sur une base réellement transnationale… Les pouvoirs de co-décision du Parlement européen dans le domaine budgétaire renforcés… La responsabilité des parlements nationaux dans la décision communautaire redéfinie !
Comment, en effet, a-t-on on pu imaginer qu’on imposerait aux Européens la règle d’or comme le seul horizon de la construction européenne ?
Comme il l’avait prédit, les marchés réagirent dès la fin septembre avec enthousiasme à la nouvelle Europe ainsi annoncée ! Enfin, on leur parlait à nouveau de cohésion et de croissance, d’innovation, de politiques industrielles, en un mot d’avenir en Europe !… Et curieusement ils acceptaient le retour du politique au sein de l’économie…
« Que de temps perdu ! Tout ceci aurait pu être mis en place il y a déjà deux ans », songea le nouveau Président de l’Union européenne, le regard rêveur perdu sur les jardins de sa résidence.
Une sonnerie le sortit brusquement de sa torpeur. L’affichage, sur son portable, du nom de son correspondant lui fit esquisser un sourire : « Bonjour Nicolas, que deviens-tu depuis mai dernier ? »
Par Thomas Julien (pseudonyme), prépublié sur NonFiction
Je trouve ça d’assez mauvais goût. DSK le sauveur, ça va bien.
On SE MOQUE DE NOUS! DSK est grillé; il faisais des partouzes minables avec des prostituées (une « sexualité de notable de province »!), a sauté sur une femme de chambre dans un palace à New York: C’EST FINI DSK, basta!
Si c’est ça envisager le futur de l’Europe et bien… Rien que de voir apparaître le nom de DSK au début… Même pas la peine de lire le reste!
Propositions très intéressantes, à étudier de façon plus précise. Mais , désodorisées, elles auraient plus d’impact!
Supprimez donc votre inspirateur pour que nous puissions respirer dans une nouvelle Union Européenne!
La proposition est intéressante et je continue à penser que DSK s’est fait pièger par une femme de chambre en séjour illégal que l’on a fait chanter.
DSK aurait pu contrer l’offensive des ultra libéraux et mettre en place un FMI plus social. A sa place nous avons Mme Lagarde (avocate) et ultra li!bérale.
Quels sont les qualifications d’une avocate pour diriger la finance mondiale ? On retrouve des avocats dans toutes les organisations. Ne devrait on pas les renvoyer dans les tribunaux et mettre des quotas dans les parlements ?
Nous sommes en guerre contre le grand capital et nous ne nous donnons pas les moyens de gagner.
Bonjour,
Je vous rappelle d’une part qu’il s’agit d’un texte de fiction, d’autre part que nous publions des articles d’opinions.
Par ailleurs, notre ligne (comme celle du Guardian) est de mécontenter une part de nos lecteurs à chaque article, mais jamais la même 🙂
Merci, Arthur, c’est clair.
une correction sur le 8e paragraphe : « Sa première initiative fut donc d’aller rencontrer la stagiaire bulgare en charge de la photocopieuse et de … »
Je vous laisse terminer.
Si encore vous aviez attendu le 1er avril pour publier cela… mais là NON !
Certes !
Mais au lieu d’invoquer les mânes de DSK ,
mettons en scène François Hollande dans le rôle .
Juste pour essayer d’y croire
Perspective intéressante même si le choix du personnage principal prête à sourire. Concernant le brevet européen (et en lien avec l’article le plus commenté de sauvonsleurope.eu) : http://les-carnets-d-afs.blogspot.com/2010/11/la-solution-pour-le-brevet-europeen.html