En une semaine, le mois de septembre aura donné aux européens trois raisons de se réjouir. La décision de la banque centrale européenne d’abord, qui, il y a une semaine, décidait d’initier un programme de rachats d’obligations souveraines illimité pour tout pays qui demanderait l’aide au FESF ou au MES. Le jugement rendu par les juges suprêmes allemands à Karlsruhe, ensuite, qui vient d’autoriser la ratification par Berlin des mécanismes de sauvetage de la zone euro. La défaite du parti anti-européen et xénophobe aux élections néerlandaises, enfin, dont la progression était tant crainte.
Mais, surtout, ne pas crier victoire. On entend de fervents défenseurs de l’Union Européenne expliquer que la zone euro est en train de sortir de la crise et que tout va aller pour le mieux dès demain. Non seulement ça n’est pas le cas mais on pourrait sans malhonnêteté et assez facilement renverser le bel optimisme de cette semaine. Passons sur les élections aux Pays-Bas, où la victoire des travaillistes et des libéraux s’est arrachée au prix d’une campagne très anti-européenne, critiquant « bureaucrates » de Bruxelles et plans d’aides à la Grèce. Passons sur le fait que la stabilité de la zone euro ait été suspendue à la décision de juges constitutionnels allemands dont les citoyens européens ignoraient l’existence il y a quelques jours, et sur l’effet délétère que cela peut produire sur ces derniers. Intéressons-nous à la décision de la banque centrale européenne et aux mécanismes qu’elle initie, et rappelons que d’aucun espéraient voir la BCE annoncer un rachat illimité des dettes souveraines européennes au-delà d’un certain seuil « raisonnable » de financement. On aurait ainsi pu imaginer que la BCE, par ses rachats, s’engage à ce que l’Espagne n’ait pas à payer plus de 4 % ou 5 % sur sa dette à 10 ans, afin de lui laisser des marges de manœuvre pour relancer la croissance économique de son pays. Non seulement ça n’est pas ce qui a été décidé mais qui plus est le programme de rachat est conditionné aux règles très strictes de prêts au FESF. En un mot on propose à l’Espagne plus d’austérité encore pour pouvoir bénéficier de la politique de la BCE.
Pourquoi ces rappels ? On pourrait penser à du pessimisme mais ça n’en est pas. Cette semaine aura donné, c’est vrai, de l’air et un peu d’espoir à tous les euro-progressistes. Mais il faut rappeler que le sauvetage de la zone euro ne se fera pas par des décisions monétaires ou juridiques mais par des décisions politiques. Que si des institutions comme Karlsruhe ou la BCE prennent autant de place c’est parce qu’elles occupent le vide laissé par la trop faible politisation de l’Union Européenne. Il ne s’agit pas d’un rêve lointain mais d’un besoin pressant à court-terme, que les peuples sentent que le pouvoir qu’ont les institutions européennes et les décisions intergouvernementales est compensé par leur pouvoir, à eux, de prendre position sur ces sujets. Et ce sont les grands programmes très concrets, comme ceux qu’initie ou soutient Sauvons l’Europe, qui sont le véritable espoir de la zone euro. D’Erasmus euro-med à la campagne « qui va payer ? », l’euro-progressisme que défend Sauvons l’Europe, voilà la solution. Aujourd’hui comme la semaine dernière, il y a urgence.
Adrien Z
Je partage cette analyse. Elle commente lucidement les dispositions techniques prises ces dernières semaines. Cependant cela ne me suffit pas. Il me parait très important de donner aux citoyens d’Europe les moyens de comprendre. François hollande a réussi à faire comprendre que l’austérité ne pouvait pas être une stratégie économique à elle seule. Comment faire comprendre que les Etats doivent être responsables en échange de la solidarité ? Il est manifeste que, même chez nous en France, une grande majorité de citoyens en restent à des réflexes et des opinions simplistes face à la perspective du vote sur le MES à l’assemblée. Nous avons besoin d’une pédagogie de gauche qui complète les analyses techniques comme celle-ci.
Or, nous avons un modèle approximatif à disposition, avec nos régions. Nos régions ne peuvent que présenter des budgets en équilibre, en échange des péréquations financières via les subventions d’Etat. Ca marche assez bien depuis trente ans… sous réserve que l’Etat puisse continuer à jouer son rôle. Il n’existe pas l’équivalent au niveau européen, puisque les organismes de Bruxelles ne lèvent pas l’impôt. Qu’en pensez-vous?
Effectivement. Un élément de perturbation forte pour les collectivités locales a cependant été la transmission de la charge de dispositifs de solidarité (RSA). Aux USA, c’est bien l’Etat fédéral qui porte medicare. Ferons nous progresser l’Europe par la fédéralisation des socles sociaux?
Le développement technologique fait que la planète est devenue petite et de ce fait, elle a besoin d’un pilote des plus démocratique et laïque.
Avant d’en arriver là, il faut réaliser l’Europe fédérale pour avoir un poids réel dans ce monde devenu fou, où la séparation de la religion-état n’est même pas envisagée. Le moyen âge à la peau dure.
Il n’existe aucune autre façon de sauver, non seulement l’Europe, mais la planète toute entière.
Bien analyse
Je suis d’accord avec Dominique, mais j’ajouterai que le danger de répondre maintenant aux sirènes allemandes,c’est qu’elles sont résolument à droite malgré les quelques centristes qui y figurent et que l’Europe ne marchera que si elle est ‘Europrogressiste ». Pour cela il faut patienter jusqu’aux procha
Nous le savons avec Apollinaire, qui ne traversa pas « la grande guerre » sans y laisser… sa plume visionnaire, mais disait à peu près : « La Victoire avant tout sera / De bien voir au loin, / De tout voir de près, / Et que tout ait / Un nom nouveau ».
Notre nom d' »Europe » ne nous vient-il pas d’une métamorphose aussi féconde que profonde, impliquant la millénaire transformation sémantique du « crépuscule » proche-oriental en la « vaste-vue » grecque et, plus concrètement, l’usage nautique autant qu’alphabétique des antiques techniques d’origine phénicienne – tout comme le nom et l’enlèvement d’Europe sans cesse « nouveaux » sont phéniciens ?
Il est donc temps de ressortir ensemble, encore, de la nuit et de la crise, par ces clairs moyens de contact, évolutifs et créatifs, qui déjà débouchèrent sur la démocratie, sur la liberté solidaire, sur l’Europe à construire !
D’accord avec cet article ! En fait il faut déplorer que seuls les Allemands parlent fort en faveur d’une intégration plus poussée des pays de la Zone Euro ! On attendrait, on attend avec impatience (mais il est vrai qu’il a d’autres priorités) la voix de François Hollande qui devrait être voix en faveur de plus de fédéralisme en Europe, de la nécessaire marche vers les États-Unis d’Europe mais aussi la voix d’une Europe plus démocratique où les élus des peuples européens auraient un rôle important à jouer à côté des institutions actuelles pour les encadrer ( commission européenne remplacée peu à peu par un vrai gouvernement européen)
Ségolène Royal, elle parlait avec détermination de ces États-Unis d’Europe !