Presque trente ans après la chute du mur de Berlin, frontière symbolique et physique de la séparation entre le « Bloc occidental » et le « Bloc communiste » pendant la Guerre froide, il semblerait que le temps nous joue des tours : faisons une pause dans le présent, faisons fi du futur (à ne pas confondre avec « vision à court terme ») et remontons le passé !
Le mercredi 17 juin, le gouvernement hongrois, dirigé par le Premier ministre « conservateur » Viktor Orban, a annoncé la fermeture de sa frontière avec la Serbie afin de lutter contre l’immigration illégale. Certes, l’objectif relève du langage politicien courant à l’heure actuelle. Toutefois, les moyens conférés pour l’atteindre sont malheureusement peu originaux : construire une clôture de quatre mètres de haut et de 175 kilomètres de long. La justification ? La quasi-totalité des migrants présents en Hongrie, membre de l’UE depuis 2004, serait entrée par la Serbie, pays non-membre de l’Union européenne, afin de gagner l’espace Schengen. Selon Eurostat, ce pays d’Europe centrale est celui de l’Union européenne, après la Suède, qui accueille, proportionnellement à sa population, le plus grand nombre de réfugiés. Précisons que ces derniers sont massivement poussés à l’exil en raison des conflits dans leurs propres pays – Syrie, Irak, Afghanistan – ce qui leur donnerait droit à un statut de réfugié au sens de la Convention de Genève.
Face à cette pression migratoire jugée trop forte, la Hongrie a opté pour la même solution que la Grèce, l’Espagne (dans ses enclaves nord-africaines) ou la Bulgarie, le long de sa frontière turque : ériger une barrière physique. A une autre échelle, un fossé long et profond vient d’être creusé à l’initiative des autorités communales dans la région de Charleroi en Belgique, un des six pays membres fondateurs de l’UE, afin d’empêcher le passage des gens du voyage à l’entrée d’un village. La recette est simple : profiter de l’opportunité offerte par une situation de crise pour faire passer une mesure, une fois de plus, populiste afin de détourner l’attention de la population d’autres problématiques nationales. Quid de l’obligation des Etats-membres de l’Union européenne d’assurer le droit d’asile, ainsi que cela est précisé dans la charte des droits fondamentaux ? De fait, les lamentations se heurteront désormais à un mur séparant la Serbie de la Hongrie, mais gageons que, si vous fuyez une situation de guerre, vous ne risquez pas de faire demi-tour afin de la retrouver : vous prenez un autre chemin, même si celui-ci est plus dangereux. L’option de la traversée en Méditerranée finira par ne plus en être une et devenir l’unique voie d’accès à l’Europe, elle qui a déjà tué plus de 100 000 migrants depuis le début de l’année. Avouons que c’est plutôt efficace : on ne les entend plus se plaindre. Pour peu que quelques terroristes se soient glissés dans le lot, on aura fait d’une pierre deux coups.
Viktor Orban n’en est pas à son premier essai en termes de mesures liberticides. Depuis son arrivée au pouvoir en 2010, il a engagé des réformes profondes de la justice, des médias et de l’économie, allant jusqu’à poser la question de réintroduire la peine de mort. Dernier exemple en date (mais ça n’est qu’un détail anodin) : le lancement d’une campagne de consultation, sous la forme d’un questionnaire pudiquement intitulé « Immigration et terrorisme », envoyé à huit millions de Hongrois. « Certains pensent que les réfugiés menacent l’existence et l’emploi des Hongrois. Êtes-vous d’accord ? » ; « Est-ce que vous accepteriez qu’on mette des personnes en prison dès qu’elles franchissent illégalement la frontière ? »… Tout amalgame entre demandeur d’asile et réfugié ne saurait, bien entendu, être volontaire de la part d’un Premier ministre qui déclarait, au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo : « l’immigration économique n’apporte que des troubles et des menaces en Europe ».
Remettons les choses en perspective : oui, le nombre de demandeurs d’asile a nettement augmenté en Hongrie entre 2014 et 2015. Toutefois, elle concerne surtout des migrants de passage dans un pays où les étrangers ne représentent que 2 % de la population totale. Nous pourrions alors faire du mauvais esprit et lire un dessein non avoué, car non avouable, dans l’envoi de ce questionnaire rocambolesque : faire un appel du pied – et pas des plus tendres – à l’électorat du Jobbik, parti d’extrême droite qui talonne le Fidesz, parti au pouvoir, dans les sondages.
Une pause. Revenons pas à pas en 1989. Le 2 mai commence le démantèlement du « rideau de fer » en… Hongrie, grâce à la destruction du double réseau de grillage barbelé et électrifié qui séparait ce pays de l’Autriche sur plus de 260 kilomètres. Après les lamentations, l’espoir, après l’espoir, bonne question. Si l’histoire se répète, espérons que l’Union européenne tiendra, quant à elle, un discours ferme à l’égard de Viktor Orban, voire lui retirera son droit de vote au Conseil – composé de représentants des gouvernements, dispositif relativement complexe déjà introduit par le Traité d’Amsterdam en 1997 et appliqué à l’Autriche en 2000, à la suite de l’arrivée au pouvoir du parti populiste FPÖ.
La situation ainsi créée apparaît d’autant plus paradoxale que, par le soulèvement de la Hongrie contre la dictature soviétique à l’automne 1956, ce pays avait acquis, au regard de l’Histoire contemporaine, une image de promoteur de liberté allant au-delà du rideau de fer…
Solen Menguy |
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Gérard Vernier |
Accueillons tous les malheureux d’Afrique, allons les chercher en Libye pour éviter qu’ils se noient en Méditerranée, et qui est prêt à leur faire un accueil décent à l’arrivée ??
La seule et unique solution à tous les problèmes d’immigration serait de faire en sorte que les personnes n’aient plus envie de fuir leur pays, c’est à dire de tout faire pour développer leurs pays et faire cesser les guerres.
Mais le problème c’est que si il n’y a plus de guerres à quoi pourraient bien servir toutes les armes que nous vendons à ces pays ? les marchand d’armes qui gouvernent en partie la planète ne sont pas d’accord et tiennent les gouvernements par la laisse.
Pour développer l’économie les pays pauvres il faudrait aussi arrêter de les étouffer avec des emprunts toxiques et développer des banques indépendantes, (comme avait commencé à le faire Kadafi en Lybie par exemple), mais cela n’arrange pas les gros financiers qui sont l’autre pilier qui gouverne le monde et qui imposent aussi leurs lois aux gouvernements.
Donc cette situation n’est pas prête de s’arrêter tant que toutes les personnes qui ne veulent pas d’immigration se tromperont de cible et ne se battront pas contre les marchands d’armes et les gros financiers
Merci de votre analyse . Nous sommes donc d’accord pour dire que ce sont toujours les mêmes qui mettent le BORDEL, »pardonnez l’expression » le fric et le fric par les armes
100 000 migrants tués en méditerranée? c’est plutôt de l’ordre – et c’est déjà beaucoup trop – de 1 500 http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/04/20/en-2015-un-migrant-meurt-toutes-les-deux-heures-en-moyenne-en-mediterranee_4619379_4355770.html
Et pourquoi l’UE finance-t-elle ce mur à 75% ?!!!…
(à Jullien): Votre remarque ne manque pas d’interpeller. Pourriez-vous préciser vos sources ? Merci d’avance.
Quelle abjection: invoquer ici le site le plus sacré du Judaïsme pour dénoncer la politique antimigratoire d’Orban.
L’article n’a rien à voir ni avec le Judaïsme, ni avec les juifs, mais c’est si bon de pouvoir instiller un peu de doute, une vile saloperie « Pourquoi parlent-ils des juifs par allusion dans cet article? est-ce que ce ne serait pas que Orban serait pas un peu….? » faire naître l’idée que le feu et non le fumier dégage cette fumée.
Immonde!
A Liliane : l’évocation du Mur des lamentations était ici ironique et n’avait pas pour but de blesser les sensibilités religieuses. Elle servait à rappeler que de nombreuses personnes s’y rassemblent pour prier – gageons que les immigrés auront une pensée similaire en tentant de le franchir. Soulignons également que cette référence religieuse est partagée avec les musulmans, puisque le mur soutient l’esplanade sur laquelle est construit le dôme du Rocher. La pauvreté et la guerre étant laïques à leur façon, elles ne choisissent pas par religion : les immigrés, juifs comme musulmans, se retrouveront face à ce mur. De ce point de vue nous sommes d’accord : c’est effectivement immonde.
A Liliane: c’est précisément en hommage à certains de mes ascendants Juifs et Hongrois que j’ai volontiers cosigné l’article. Ne vous trompez pas de combat et évitez de prêter à des « sensibilités » tout aussi respectables que les vôtres des sous-entendus à des années-lumière de ce que, faute d’avoir bien lu l’article, vous croyez devoir, sans doute en toute bonne foi, dénoncer.
Je n polémiquerait pas avec vous, mais il est difficile de trouver la moindre trace d’ironie ou d’humour dans votre texte, mais il est vrai que le sujet ne s’y prête pas. En revanche on y voit votre méconnaissance de la situation en Hongrie où on se renvoie à la figure en permanence la responsabilité des juifs dans tout ce qui arrive: ils étaient responsables du communisme, ils le sont du libéralisme, un député demande de lister tous les juifs ayant des responsabilités pour pouvoir surveiller l’influence juive, Orban a été insulté en raison de ses origines familiales, et vous venez nous raconter que votre mur des lamentations c’est de l’ironie!
Quant à la référence religieuse du vrai Mur des Lamentations pour les musulmans, on se demande bien où vous l’avez trouvée: on vous rappellera que sous domination musulmane, ce « haut lieu religieux » était le mur d’appui des latrines publiques!
II est tout à fait clair qu’on ne saurait cautionner aucune attaque qui insulterait Orban en raison de ses origines familiales. Mais là n’est pas le problème par rapport à une autre réalité, qui dénonce le comportement d’un « Mr.Hyde » qui échapperait au contrôle d’un « Dr. Jeckyll » politiquement aussi maladroit (dans la meilleure des hypothèses). Si je me permets d’invoquer une formule touchant la troisième religion du Livre, je me risquerai à dire qu’à la bénédiction « urbi et orbi » le nouveau régime hongrois a substitué la malédiction « Orban et forban ».
Il est clair qu’on ne saurait cautionner aucune attaque visant M.Orban en r raison de ses origines familiales. Mais le problème soulevé dans l’article est ailleurs: en dénonçant le comportement politiquement maladroit (dans la moins grave des hypothèses) d’Orban, nous entendions attirer l’attention sur la dissociation entre le Dr Jeckill et Mr Hyde si le premier ne parvient pas à maîtriser les dérives du second.
Il semblerait que deux tentatives de réponse se soient heurtées, de nouveau, à des problèmes informatiques. Je me lance donc dans un hasardeux troisième essai.
On ne saurait en effet cautionner la moindre attaque à l’égard de M.Orban en raison de ses origines familiales. Mais le problème visé par l’article est ailleurs: celui d’un « Mr Hyde » que le « Dr Jeckyll » (orthographe à vérifier), par son comportement pour le moins politiquement maladroit (dans la moins grave des hypothèses), semble ne pas pouvoir maîtriser. On pourrait donc déplorer, pour reprendre une formule inspirée de la troisième religion du Livre, qu’à la bénédiction « Urbi et Orbi » se soit substituée une sorte de malédiction « Orban et Forban ».
De la part de Gérard Vernier: II est tout à fait clair qu’on ne saurait cautionner aucune attaque qui insulterait Orban en raison de ses origines familiales. Mais là n’est pas le problème par rapport à une autre réalité, qui dénonce le comportement d’un « Mr.Hyde » qui échapperait au contrôle d’un « Dr. Jeckyll » politiquement aussi maladroit (dans la meilleure des hypothèses). Si je me permets d’invoquer une formule touchant la troisième religion du Livre, je me risquerai à dire qu’à la bénédiction « urbi et orbi » le nouveau régime hongrois a substitué la malédiction « Orban et forban ».