Oui à la Turquie : une chance pour l’Europe

Nous reproduisons ici le texte d’une motion déposée au congrès du Modem en faveur de l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, afin de faire vivre un peu le débat sur ce thème.

Parler d’une Europe chrétienne constitue une erreur majeure d’appréciation et pas seulement aux yeux de l’Histoire. C’est sans doute ce qui explique que les Français soient encore réservés quant à l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne. Mais cela bouge vite ainsi qu’un récent sondage vient de le montrer.

Si l’héritage chrétien, dont nous sommes fiers, est certes l’un des ferments historiques et culturels d’une bonne partie de l’Europe, il n’est certainement pas le seul. Comment pourrait-on oublier ce que d’autres cultures et religions, juives et musulmanes notamment, nous ont apporté, puis d’autre comme le bouddhisme ? Comment ignorer les apports des Lumières de l’Andalousie musulmane dont la prospérité économique et scientifique autant que la splendeur culturelle ont tant influencé les arts et la philosophie jusqu’à notre temps, sans parler de l’héritage des Celtes, par exemple, qui fut souvent et fort heureusement plus intégré – certains diront récupéré – que combattu, par le christianisme ?.

C’est parce que nous ne pouvons nous résigner à ce que le MODEM soit le plus hostile à la Turquie et parce que nous sommes convaincus que la raison commence à l’emporter, notamment au sein de notre mouvement, que nous présentons cette motion pour le « Oui à la Turquie ». Celle-ci s’appuie sur l’Appel lancé le 7 septembre 2009 par un groupe de personnalités politiques européennes de tous bords, dont le prix Nobel de la paix 2008 et ancien président finlandais Martti Ahtissaari, l’ancien premier ministre français Michel Rocard, et l’ancienne commissaire européenne Emma Bonino. Nous avons décidé d’y répondre favorablement et avec enthousiasme, dans les respect de toutes les opinions.

Nous ne pouvons nous résoudre en effet à que l’Europe en arrive à gâcher les opportunités que lui offre la candidature de la Turquie. Celles-ci sont multiples : un relais d’influence auprès du monde musulman, une capacité renforcée de projection en politique étrangère vers des régions diverses comme le Moyen-Orient, le Caucase, l’Asie centrale, toutes zones où se jouent des enjeux stratégiques, notamment pour les approvisionnements en énergie, un dynamisme économique et commercial et une modernité culturelle incomparable et respecteuse des traditions.

La Turquie dont le rang de « candidat » à l’intégration avait été formellement reconnu en 1999 et qui postule au club depuis 1963, s’est déjà alignée en 2008 sur 109 des 124 déclarations communes de l’Union. Alliée importante de l’UE, elle participe aux grandes missions européennes en Bosnie, au Kosovo et ses troupes sont présentes en Afghanistan. Sa politique régionale est décrite comme un atout de taille pour l’Europe si celle-ci veut réaliser ses ambitions extérieures.

Oui donc à la Turquie car, pour reprendre les mots de Michel Rocard, l’avenir de l’Europe passe par la Turquie. « Nous avons nous, les Européens, un intérêt au moins aussi grand que celui des Turcs à arrimer ce pays à notre continent. L’adhésion de cette nation musulmane, puissante et en plein essor ne servira pas les seules ambitions de cette dernière. L’adhésion de la Turquie, c’est une assurance-vie pour l’Europe. La question turque est l’occasion rêvée pour faire ce que nous n’avons pas su faire correctement et plus tôt, poser enfin les vraies questions: celles qui touchent à l’identité de l’Europe, à sa véritable vocation maintenant qu’elle s’est décidée à s’élargir, à sa mission dans le monde, laquelle est certainement de contribuer à rapprocher les peuples ». Certes il reste encore certaines faiblesses (Chypre, la reconnaissance du génocide arménien, la minorité kurde), mais c’est justement cette perspective d’entrée qui facilitera les évolutions en cours. Les Gouvernements arménien et grec ne s’y trompent pas, comme d’ailleurs les responsables kurdes, eux qui sont favorables à cette adhésion.

Comment la France, qui fut si longtemps le pays de référence pour la jeunesse et les élites turques, peut elle être le plus grand frein et ainsi gâcher tant d’atouts et oublier tant de liens tissés ?. Le danger de blocage européen, et en particulier français risque, s’il perdure, d’amener la Turquie à se détourner de l’Europe pour nouer d’autres alliances (Iran, Russie).Nous appelons donc les participants au congrès d’Arras 2009 à en débattre et à voter en faveur de la présente motion et répondre favorablement à l’Appel pour le « OUI A LA TURQUIE ».

Pierrick HAMON

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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