La montée des droites extrêmes en Europe semble une marée inexorable et poisseuse, dont chaque recul nous rassure temporairement. Expression tout à la fois d’une peur identitaire et d’un mal démocratique, elle court d’un pays à l’autre selon leurs rives propres.
Pour la droite classique, la question est existentielle. Quelle est sa pertinence face à ce double hurlant ? Est-ce un monstre né dans des recoins mal éclairés où il faut porter le feu, ou doit-elle y reconnaître son visage distordu, et l’accepter ?
La Hongrie est une pierre de touche malaisée de ces craintes. Dirigée par la droite depuis 2010, elle glisse sans cesse vers ce que des commentateurs qualifient de « démocratie illibérale » et qu’on peut à bon droit appeler un fascisme électoral.
Les libertés de la presse ont été réduites, les hauts fonctionnaires, les juges et les collectivités locales sont des affidés nommés, la loi électorale a été modifiée pour favoriser outrageusement le parti en place, la Constitution est modifiée tous les quatre matins pour y faire rentrer le sujet politique du jour, des migrations à la chasse aux sans abris, ou à la limitation du droit de grève. Les libertés académiques sont restreintes avec par exemple une taxe sur les écrits favorables aux migrations. On en passe, mais un point résume l’état des choses : Viktor Orban a été réélu en mai dernier en faisant essentiellement campagne contre l’implication de Georges Soros dans le pays. Il s’agissait de défendre le caractère national et chrétien de la Hongrie – et de l’Europe- face au plan d’un grand financier juif étranger prônant une immigration massive. Les périphrases aimables viennent difficilement pour qualifier ce régime.
Orban reste très populaire. L’économie tourne, et il n’existe pas de gouvernement de rechange. La gauche est issue des anciens partis communistes de la dictature qui sont désormais frappés d’opprobre ; les libéraux ont laissé un mauvais souvenir de recul social. Le mouvement social ne débouche pour l’heure sur rien de constructif. Et la question taraude la droite européenne : que faire de cet enfant turbulent, qui est son représentant officiel en Hongrie ?
Petit à petit, les élections européennes à venir se polarisaient autour de cette question. Emmanuel Macron et Guy Verhofstadt formant un cartel électoral le dédiaient il y’a quelques jours à la lutte contre le populisme, et donc contre la droite qui soutenait Orban. Ce dernier pour sa part se posait en premier opposant à Macron.
Il devenait urgent pour la droite de faire un choix qui n’arriva point. Il y a deux semaines, au Parlement européen, se jouait l’activation de l’article 7 des traités contre la Hongrie, une procédure de sanction pour rupture des valeurs européennes fondamentales. Il était nécessaire de recueillir des deux tiers des voix, seuil atteint d’un cheveu. La droite européenne a volé en éclat au tribunal d’un des siens, jusqu’au sein des délégations nationales. Faut-il se tirer du piège et sembler sanctionner Orban avec Manfred Weber, candidat de la droite à la Commission ? Faut-il crânement le soutenir, comme Nadine Morano sur les consignes de Wauquiez ? Fallait-il fuir à la buvette à l’heure du vote comme Brice Hortefeux ?
Rien n’est tranché. Demain, la procédure de l’article 7 va s’enliser car elle demande l’unanimité des Etats membres dont la Pologne, également touchée. Le Parti populaire européen n’a aucune intention au-delà de cette sanction symbolique d’amputer son membre Hongrois, ce qu’a confirmé son président Joseph Daul qui attend les résultats de la procédure article 7 pour se prononcer. « Il contient son extrême droite » entend-on dire… Au sens d’incorporer alors.
Version longue d’un article publié chez nos amis de Témoignage chrétien
Bonjour, merci pour cette analyse. Petit commentaire : je pense qu’il ne faut pas se laisser avoir par le sentiment d’inexorabilité. Ce sentiment d’inexorabilité est le fond de commerce des fascistes parce qu’ils militent pour une vision très simple de l’existence qui est que la vie se termine par la mort. Et la mort charrie tout son cortège de violence, de catastrophes, de conflits, de guerres, de haine…Evidemment, l’autre voie, celle de la paix semble plus difficile, parce que construire est beaucoup plus difficile que détruire et prend plus de temps. Donc ce qui semble inexorable c’est en fait ce qui est facilement atteignable : la destruction. Mais qui détruit se détruit. Donc rentrer dans le jeu de ce sentiment d’inexorabilité, c’est tout simplement démissionner intellectuellement.
Non la voix de la haine, du conflit, de la guerre, des dictatures violentes, de la destruction de l’humanité et de la planète n’est pas une voie désirable. Ce n’est même pas une voie du tout !!!! Donc la meilleure façon de lutter contre ceux qui la prônent malgré son inexistence, c’est de continuer à construire dans la voie que nous estimons bonne, la voie de la construction d’un futur durable, pacifique, humaniste. C’est celle-là qui est inexorable !!! C’est nous qui sommes inexorables !!! C’est notre victoire qui est inexorable, parce que si nous ne sommes pas victorieux.ses, il n’y a rien. Et les fachos doivent perdre pour que l’histoire continue !! C’est leur défaite qui est inexorable. Mais en attendant, ils utilisent l’arme psychologique, le sentiment de tragique pour faire peur à tout le monde et gagner des voix et de l’argent et du pouvoir…Pour le pouvoir. Mais ils ne peuvent rien contre la loi de l’histoire qui dit qu’il faut qu’ils perdent pour que l’histoire de l’humanité et de la planète continuent.
Hauts les coeurs !!!
Petit ajout pour ne pas se laisser avoir par l’intox des fachos : les manipulateurs pervers ne sont battus qu’en luttant pied à pied, détail après détail, parce qu’à un moment leur système s’écroule et n’est plus tenable, parce qu’il présente trop d’impasses. Donc dans cette lutte pied à pied, il ne faut pas se laisser affaiblir par les impressions psychologiques générales, les grandes perspectives tragiques, etc. Rester clair dans sa tête, garder son chemin et la conscience du bien pour lequel nous luttons. C’est le seul moyen de ne pas se laisser submerger, de continuer à agir ici et maintenant, pour déconstruire les délires.
Oui, » il contient son extrême-droite »…comme tous ces dirigeants mous du cerveau ont « contenu » un petit caporal dix ans avant la seconde guerre mondiale. C’était avant qu’il ne se transforme en führer (fureur ?).
Alors bien sûr les contextes sont différents (quoique…) mais cela ne présage rien de bon pour l’Europe, surtout quand l’ensemble de ces partis seront installés aux commandes avec l’aide de la finance qui a besoin de peuples aux bottes et qui a déjà commencé à les asservir.
Au mieux, ce sera plus de privations de libertés, plus d’arbitraire encore qu’aujourd’hui où le terrorisme a servit à faire passer ou à proposer des textes liberticides. Au pire on est en droit d’imaginer le génocide planifié des plus faibles (ceux qui coûtent plus qu’ils ne rapportent, toujours dans la logique comptable de l’algorithme financier mondial) et des boucs émissaires désignés en pâture aux moutons décérébrés (l’électorat qui votera encore)…
G. Orwell avait juste un peu d’avance dans ses prévisions.
Je ne sais pas ce qui me consterne le plus, l’article ou les commentaires…
Si je voulais résumer, en gros ça donne : « Que peut-on faire pour éliminer ce dirigeant et faire entrer la population de ce pays dans le droit chemin qu’elle refuse, malgré toutes les bonnes raisons qu’ils ont de le faire ? ».
Et l’on continue de penser que contraindre les peuples, c’est la démocratie et que leur hostilité, c’est du racisme.
En effet, G. Orwell avait vu juste : la guerre, c’est la paix, la servitude, c’est la liberté, l’UE, c’est la démocratie, l’immigration, c’est l’identité, l’austérité, c’est la croissance, les économies, c’est l’appauvrissement !
Pendant combien de temps faudra-t-il supporter les élucubrations d’un Ruoma en réplique aux déclarations argumentées et sérieuses de gens qui ne semblent pas avoir une éponge à la place du cerveau? s’il connaissait un brin l’Histoire (avec un H !), il saurait que Hitler a été élu démocratiquement, comme Orban, et en utilisant des arguments similaires. Mais peut-être que Ruoma a ce genre d’individu comme modèle? On a vu le résultat, et les Allemands qui on « essayé » en 1933 ne semblent pas près de l’oublier!
Je n’avais pas réussi jusque-là à atteindre le point Godwin…
C’est chose faite.
Vous semblez avoir de l’Histoire (avec un grand H) une vision un peu simpliste, voire caricaturale.
Mais ayant une éponge en guise de cerveau et des élucubrations en matière d’arguments, est-il encore pertinent que je vous réponde ?
Je pense que non, votre conviction aveugle, que « l’union » €uropéenne est la merveille qui nous sauve de la guerre et que les souverainistes doivent être éliminés, au mépris des opinions publiques, rend l’échange impossible.
Il suffit d’ailleurs de voir comment vous traitez ceux qui ont le malheur de ne pas être de votre avis.
Vous deviez être de ceux qui scandaient « Je suis Charlie ! » pour la liberté d’expression.
Et vous préférez de loin rester entre vous, plutôt que supporter la contradiction.
Orban vous hérisse, mais vous ne trouvez rien à redire aux militants néonazis qui célèbrent des commémorations de l’époque nazie en Lettonie (sauf erreur) ou ceux qui font partie du gouvernement de Porochenko en Ukraine.
Ah oui, mais ceux-là n’expriment pas d’hostilité à « l’union », on peut s’en accommoder…