Carnaval n’est pas seulement l’aimable fête où chacun se travestit et où s’affrontent des géants de papiers, c’est également le moment où les règles du monde s’inversent et où règne le Roi des fous. C’est manifestement Carnaval en Europe, avec la sarabande folle des nominations.
Qui dirige l’Europe, et pour quoi faire ? Deux logiques s’affrontent. La première est la logique diplomatique des Etats, entre lesquels les institutions européennes sont un trait d’union et qui ont besoin de recruter une équipe pour faire le travail commun. La seconde est la logique démocratique, portée par un Parlement issu des élections. Il faut donc que l’une l’emporte sur l’autre, ou qu’elles trouvent un compromis. Nous n’y sommes pas.
Première phase : avant l’élection, les conservateurs européens du PPE font preuve d’une finauderie colossale. Tout en réaffirmant le principe des « Spitzenkandidat » (en français des candidats à la Commission) qu’ils dominent électoralement, ils décident intelligemment de lui scier les jambes en interdisant l’existence de listes politiques transnationales, qui risquait d’ouvrir un débat démocratique non contrôlé.
Deuxième phase : on vote. Le PPE a désigné Mr Nobody comme candidat (on l’appelle Manfred Weber) tant il est sûr de sa victoire. A l’issue du scrutin, il reste effectivement le premier parti au Parlement européen. En revanche, le PPE a perdu des voix et n’est plus hégémonique. Le candidat social-démocrate, Frans Timmermans, arrive en second mais parvient à réunir autour de lui une alliance avec les libéraux et les Verts. Il n’y a pas eu de vote formel, mais chacun comprend que Weber est éliminé de la course et que le candidat issu des élections est Frans Timmermans.
Troisième phase : on discute entre chefs d’Etat et de gouvernement pour trouver un accord satisfaisant tout le monde sur la répartition de cinq postes, dont seuls quatre sont évoqués publiquement : le Président de la Commission, le Commissaire aux affaires étrangères, le Président du Conseil (qui organise les négociations entre chefs de gouvernements) et le Président du Parlement (qui est, rappelons-le, nommé par le Parlement). Le poste de l’ombre, c’est bien sûr un salarié, le secrétaire général de la Commission, Martin Selmayr, membre du PPE et qui a été nommé à ce poste théoriquement neutre en violation de toutes les règles. Là c’est le drame : on essaye toutes les combinaisons autour de Timmermans, mais les pays de l’Est opposent un veto parce qu’il leur a imposé de respecter l’indépendance de leur justice. Ils auront sa peau : la logique diplomatique l’emporte à cette occasion sur l’Etat de droit en Europe.
Quatrième phase : le n’importe quoi. Weber et Timmermans éliminés, la candidate officieuse des libéraux était Margrethe Vestager qui aurait pu être une option de consensus par défaut, dotée par ailleurs de grandes qualités. Le tour de piste aura été rapide, et coucou voici Ursula von der Leyen ! Qui ça ? PPE, von der Leyen est une fédéraliste depuis le berceau. Merkel lui a donné tous les jobs pourris de son gouvernement, affaires familiales, puis affaires sociales avec des mesures impopulaires à prendre, puis la Défense alors que l’état des forces armées allemandes est, disons, à améliorer. Elle s’en sort comme elle peut, naviguant entre les révélations d’incurie et de corruption dans son ministère avec beaucoup de classe, mais est désormais considérée comme une des ministres les moins compétentes. En tout cas, c’est une femme, elle est PPE, elle est allemande (les Allemands avaient tous les autres postes, mais celui-là ça faisait plus de cinquante ans qu’il leur échappait), elle est fédéraliste et elle « vient » de l’armée, donc elle a une aura plus « forte » que d’autres candidats.
Dans le reste du panier, du très bon. Christine Lagarde prend la BCE, confirmant ainsi après la marque Draghi que c’est un poste plus politique que technique. Sa grande habileté d’expression y sera utile. Josep Borell, socialiste espagnol et ancien Président du Parlement européen, devient chef de la diplomatie européenne et il a une expérience nationale très respectée dans ce domaine. Charles Michels coordonnera les travaux du Conseil, ce à quoi il excellera par définition puisqu’il est ancien Premier ministre belge et s’est montré prêt à travailler avec des personnes très très à droite.
Reste à caser Timmermans et Vestager, sans doute avec des portefeuilles prestigieux à la Commission. Vice-présidents ? Climat ? Tout le monde semble avoir oublié Weber dans l’aventure, et le Parlement se retrouverait plus ou moins autonome pour choisir sa direction (on parle d’un passage de relai à mi-mandat entre socialistes et Verts).
Cinquième phase ? Il faut encore que le Parlement entérine ceci, et ce n’est pas fait …
Bon, ben ce n’est pas encore pour demain qu’on aura une Europe sociale, les grand patrons et les riches actionnaires vont encore joyeusement se gaver et leur appétit est insatiable.
Je me demande pourquoi nous avons voté ? Ce n’est vraiment pas sérieux.
je comprends votre question, en guise de réponse je vous suggère ceci ;
– au cas ou vous l’ignoriez vous avez élu un parlement, pas la Commission
– les institutions sont comme cela : la commission propose, les chefs de gouvernement (élus) ansi que le parlement (élu) disposent.
Vous résumez avec élégance le jeu institutionnel tel qu’il est prévu par les traités…
… sous réserve de tenir compte d’une évolution que la pratique a subrepticement introduite sur le terrain: à savoir que, si la Commission a en principe le monopole de l’initiative, cette compétence est de plus en plus souvent précédée en amont par un « pouvoir d’impulsion » en vertu duquel tant le Parlement que le Conseil (au niveau des ministres) et le Conseil européen (au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement) « invitent » la Commission à présenter telle ou telle proposition ou à entreprendre telle ou telle action. On en trouve de nombreux exemples dans les résolutions ou conclusions que ces ces institutions adoptent à l’issue de leurs réunions. On pourrait donc compléter votre formule: « la Commission propose, les chefs de gouvernement ainsi que le Parlement disposent » par les termes: « et parfois imposent ».
Quant à la parenthèse qui sous-entend que les chefs de gouvernement seraient toujours des élus, elle correspond, certes, à la réalité dans la très grande majorité des cas… mais on pourrait faire valoir quelques exceptions. Ainsi, sauf erreur de ma part, je n’ai pas le souvenir que Raymond Barre ait affronté l’épreuve du suffrage avant sa nomination à Matignon. C’est son expérience de brillant économiste, éminent professeur et actif vice-président de la Commission qui lui a ouvert la voie. Toujours sous réserve de vérification, ce n’est qu’après l’exercice de ses fonctions de Premier ministre qu’il a conquis des mandats électifs… dont celui de maire de Lyon. Cette évocation d’un cas emblématique n’a, bien entendu, rien à voir avec les révélations récentes du « Canard enchaîné » sur un tout autre terrain…
…et revoila raymond la fraude qui réapparait : « brillant économiste, éminent professeur et actif vice-président de la Commission qui lui a ouvert la voie. « …et aussi expert en fraude a 7 millions (qui se seraient « Barré » en suisse a l’insu de son plein gré….) , docteur en » faites ce que je dis et pas ce que je fait « , expert en mépris des porteurs de pancartes ….. . comme quoi on peut etre un brillant professeur et mettre ses talents au service de mauvaises causes , politicardes de surcroit , là ou au moins en théorie est censé prévaloir l’intérêt général … » L’ INTERET GENERAL C’ EST TOUT POUR MA GUEULE » comme disait Duplanchon
Décidément, vous êtes un acharné du « hors sujet » !
Comme les lecteurs moins obtus l’auront compris, l’évocation de Raymond barre illustrait simplement le cas des chefs de gouvernement non passés par la case « élection » avant d’accéder à l’exercice de cette fonction… un exemple que j’avais pris soin, précisément, de dissocier des révélations du « Canard » concernant d’autres aspects. Mais cette nuance, vous ne semblez pas l’avoir perçue.
Il serait temps que vous preniez au sérieux le terme de « politique » avant de vous précipiter tête la première dans le piège du théorème du « lampadaire »: celui que les politologues analysent sous les traits de l’individu qui, ayant perdu sa montre, s’obstine à la rechercher sous un lampadaire au motif que, pour lui, c’est le seul endroit éclairé. En d’autres termes, comme le formule si bien une invitation de la Bible: « Elargissez l’espace de votre tente ! »
post-scriptum: sans doute inspiré par un regain d’actualité du nom de Raymond Barre, c’est ce nom qui m’est venu spontanément à l’esprit pour illustrer le fait que, pour l’accession au poste de Premier ministre, le chef du gouvernement ainsi désigné n’était pas nécessairement un élu… même si l’exercice de cette fonction prédispose par la suite à la recherche de l’ « onction électorale ».
On pourrait, bien sûr, aussi évoquer les cas de Georges Pompidou et de Dominique de Villepin.
Et, encore une fois, en dissociant l’ensemble de la carrière de l’intéressé (dont, politiquement, je suis loin d’avoir partagé les « sensibilités ») de son comportement d’ « épargnant » (!), j’avoue que mon passé d’étudiant n’a pas été indifférent à la qualité de son ouvrage « monumental » (« le Barre », comme on disait dans les milieux universitaires) sur l’économie politique paru aux Presses universitaires de France. En outre, ma longue expérience au sein des institutions européennes n’ignore pas son oeuvre pionnière sur le chemin difficile, sinon tortueux, de l’Union économique et monétaire – pas encore achevée – lorsqu’il occupait le fauteuil de vice-président de la Commission. Voilà plus concrètement ce que je tenais à souligner en évoquant le « brillant économiste, éminent professeur et actif vice-président de la Commission ».
Vous oubliez de signaler que Charles Michel est copain comme cochon avec Emmanuel Macron que vous considérez comme progressiste… Contradictions, contradictions… En tout cas, le nouveau président du conseil, à l’instar des PP et Ciudadanos espagnols est peu regardant sur ses alliances avec l’extrême droite. Peu importe, du moment que le Marché y gagne. Quant à Christine Lagarde, vous oubliez de signaler son rôle peu reluisant dans l’affaire Tapie… Peu importe, du moment que le Marché y gagne…
la logique de nos dirigeants est surtout de ne pas laisser l’espace démocratique du choix de ceux qui vont « gouverner » l’Europe !
quand pourra-t-on faire élire par les citoyens ceux qui actuellement sont nommés après des tractations entre les chefs d’état qui en font une grande négociation de pouvoirs entre eux
contrairement a Francoise San Secundo, je ne comprends pas votre question :
avez vous élu les ministres de votre gouvernement, en tant que ministres, non.
Avez vous elu le president de votre parlement? non!
Si vous pensez qu’un jour vous pourrez élire la cheffe de la Commission il faudra des listes transnationales.
Etes-vous une lectrice assidue des articles publiés sur le site de « Sauvons l’Europe » ?
Je me permets de signaler que vos interrogations ont été largement analysées dans la chronique parue le 13 juin dernier sous le titre « Intimité technocratique contre légitimité démocratique ? Faux procès ». Merci de vous y référer.
Je constate en outre que Bernard Schmitt, dans un commentaire ci-dessous, reprend une partie de l’argumentaire ainsi développé.
Sauvons … mais vous défendez quoi, au fond, vous le savez encore ?
Qui sont les laissés pour compte dans cette affaire ? Les souverainistes (c’est bien normal), la partie orientale de l’UE (c’est dommage mais ils n’ont guère fait d’effort), les écolos, et là c’est plus gênant.
Franchement, l’équipe qui sort de la négociation n’est pas mauvaise. Heureusement.
Toutefois le débat le plus important de ces derniers jours n’était pas à mon sens ce choix, mais la discussion sur le Mercosur. Cette discussion concerne le fond et la forme, avec des arguments d’un grand poids des deux côtés. J’en reste avec des questions du type : est-il inévitable que les partisans du multilatéralisme soient aussi des drogués de la croissance économique ?
Je n’aime pas le titre de Carnaval, inutilement péjoratif et dévalorisant ! Le mépris également pour un consensus trouvé en un mois environ dans un contexte difficile créé par le vote des citoyens européens.
Pour une véritable démocratie, il faut des listes transnationales aux élections européennes. On votera alors pour un programme et une politique clairement définis. On a le pouvoir d’imposer au parlement un débat sur le sujet. Faisons circuler une pétition bien construite, recherchons des alliances avec les partis démocratiques qui y sont favorables.
Battons nous pour , et non toujours contre.
« Carnaval: inutilement péjoratif et dévalorisant » ? Permettez à un amoureux de Venise de ne pas partager cette appréciation très superficielle… ce qui n’empêche ledit Vénitien de coeur d’afficher une grande sympathie à l’égard du reste de vos propos.
Spectacle lamentable donc de la politique politicienne sauvage, les mesquineries, les intérêts des uns et des autres, les calculs…jeu de chaises musicales donc on prend les mêmes et on redistribue les cartes pour faire la même chose, aucun projet de réformes structurelles, institutions, constitution, droit de véto, partis européens…un beau cadeau aux populistes,
Pourriez-vous argumenter plutôt que de pontifier ?
Par exemple: qu’entendez-vous par « on prend les mêmes » ? J’ai peut-être manqué des épisodes, mais il me semble que des noms nouveaux ont émergé parmi les titulaires des postes « sensibles » attribués. En outre, pour ce qui est spécifiquement de la nouvelle Commission européenne, la sagesse ne conseillerait-elle pas d’attendre le détail de sa composition avant de juger à l’emporte-pièce ? N’oublions pas que le Parlement européen jouit d’une certaine indépendance pour confirmer – ou non – définitivement la désignation des candidats pressentis… et que des antécédents ont montré que rien n’était acquis à cet égard.
halàlà !…la déliquescence de l’ue se poursuit..meme si les traites a la souveraineté de notre pays ,poussent les feux de la fusion des états-nations(traité d’aix , alsace-lorraine reconquise par les allemands…) le moment du summum de crise sociale et financiere arrivera bien pour permettre de rebattre les cartes ainsi que le sigle sur les billets de banque …de France ….
Il me semble arrivé le temps pour le PE d’imposer sa volonté, en tant qu’organe représentatif de la volonté politique des citoyen* européenn*, au Conseil européen. En effet il serait temps qu’au moins une partie des nouveaux membres du PE élisent le « premier ministre » de l’UE sur une feuille de route claire sur quelle politique lest Etats membres de l’UE devront suivre sur des sujets comme l’urgence climatique, l’accueil des réfugiés (des guerres, climatiques, économiques) l’harmonisation de la fiscalité, du système de prévoyance, du marché du trail, etc. etc. etc.
Il est temps que le PE s’autosaisisse du pouvoir législative.
Ou il y a des femmes courageuses et des hommes courageux parmi les nouveaux membres du PE qui osent violer les Traités pour enfin donner une vrai démocratie aux habitant* de l’UE ou l’UE n’ira pas très loin.
Il est impératif admettre que nous ne pouvons pas attendre la refonte du fonctionnement de l’UE, vers un modèle plus parlementaire, plus participatif, du bon vouloir des gouvernements des Etas membres (ni actuels ni plus progressistes) car ne voudrons jamais renoncer à leur pouvoir.
il est surtout temps de ‘SE sauver » de l’UE….
Plagiat ? Au cas où vous n’en seriez pas informé, vous n’êtes pas le premier à user de ce jeu de mots si facile et tentant… mais désespérément voué au sinistre magasin des illusions.
bien que vous l’écriviez je ne doute pas que vous ne pensez pas un mot qu’il s’agirait de plagiat ou d’un jeu de mot facile et simplet mosieu il professore …. il y a un vrai message tres clair ….et au magasin des illusions peut s’y trouver des gens qui ne penses pas y etre….d’ailleurs l’UE telle quelle est configurée est plus qu’une illusion mais tout simplement une grosse escroquerie , un chateau de carte qui ne tardera pas a s’écrouler : déjà les anglais…bientôt les italiens …et d’autres suivront ! qui sait , ce sera peut etre a l’occasion de la prochaine crise financiére mondiale imminente qui se profile , a force de creuser les déficits et l’endettement avec la fausse monnaie émise sans arret par la BCE (quantitatives easing , taux d’intérét négatifs ect ) soi-disant pour relancer par le monétarisme de la vrai croissance qui ne vient toujours pas…..certains deviennent addictes a l’alcool,au tabac ou a la cocaine …et bien nos pontes français et européen sont devenu addictes a la création monétaire illimitée et hors- sol assise sur rien , sur aucunes contreparties d’augmentation correspondante de la production ….tout cela se terminera très mal , et pas que pour le capitalisme mondial en crise de recherche permanente de profitabilité maximum , car les peuples aussi morflerons alors qu’ils sont en meme temps les victimes…..non seulement nous avons a faire a des élites régnantes addictes mais aussi criminelles ! dans tout cela ça risque de faire « tout drole « aux euro-fanatiques lorsque le château de carte européen va s’écrouler….a ce moment là peut etre auront -il le sursaut de « SE » SAUVER aussi de l’UE , si tant est qu’il n’en soit pas trop tard pour en limiter les funestes effets de la trentaine d’années passées…..
Si vous étiez un lecteur assidu du site de « Sauvons l’Europe », vous auriez remarqué, môssieu le perroquet, que cette ritournelle « pipeauliste » (à savoir « populiste », mais encore plus « à côté de la plaque » en considération du « pipeau » qui rythme votre prédication dans le désert) consistant à prôner une fuite d’arrière-garde (« se sauver » de l’Europe) est apparue à plusieurs reprises et avec la connotation d’ « en désespoir de cause » sur ledit site. Vous n’avez donc rien inventé.
quel baratin inconprehensible pour le commun des mortels …et peut etre meme pour l’ecrivain lui-même…..désolant le charabia des euro-fanatiques !