Nous avons posé nos questions sur l’état de l’Europe à Lorenzo Consoli, Visiting Professor à l’Institut Européen de communication sociale
Situation politique de l’Italie : Monti et Silvio Berlusconi
Prodi avait une majorité très fragile, alors qu’il a quand même fait des libéralisations assez importantes. Berlusconi au contraire disposait d’une grande majorité sans précédent en Italie avec pour programme les libéralisations, et il n’a rien fait. Les gouvernements de centre gauche depuis l’euro ont baissé la dette alors que ceux de centre-droit l’ont augmenté.
Monti est considéré comme portant l’intérêt public, ce qui n’était plus le cas du chef de gouvernement en Italie. A Bruxelles, il a remonétisé la parole italienne, en faveur de la croissance et de la méthode communautaire.
Monti conserve une grande légitimité politique, mais sa lune de miel est terminée car il a pris des décisions très dures sur les retraites, la taxation des revenus et la réforme du marché du travail. Les sacrifices demandés ont été acceptés par les italiens, car ils ont pris conscience que l’Italie était au bord du gouffre. Monti a rétabli la situation, mais aujourd’hui les italiens se sentent avoir le droit de proposer des solutions non pas de rigueur mais également de croissance. Il y’a donc un fort contentement de l’arrivée de Hollande, car avec lui Monti peut espérer faire la différence en Europe.
l’Europe après l’élection de François Hollande
L’arrivée de Hollande a sûrement changé la perspective, mais la déclinaison concrète n’est pas encore développée ce qui peut se comprendre dans l’attente des élections législatives. Au G8, Angela Merkel a été dans l’angle, alors qu’auparavant elle menait le jeu avec la complicité de Sarkozy.
Sarkozy était carrément intergouvernementaliste ; c’était sa compensation pour le soutien à la politique allemande. Hollande est connu comme un partisan de la méthode communautaire. Merkel est fédéraliste, mais l’Euro est trop restreint pour une fédération ; ses règles sont par ailleurs défectueuse par la faute de la Bundesbank. Cette dernière a une énorme influence politique en Allemagne.
Il est évident qu’il faut plus d’Europe et pas moins d’Europe pour sortir de la crise. Cependant, le fédéralisme ne peut aujourd’hui être développé qu’après être sortis des difficultés présentes. Or l’Europe n’a pas réussi à gérer une crise qui n’était pas tellement grave, elle s’est noyée dans un verre d’eau.
En ce qui concerne plus précisément l’élection au suffrage universel direct du Président de la Commission, il ne faut pas tout attendre des innovations institutionnelles : le Haut représentant et le Président permanent sont des échecs, alors que Delors avait du pouvoir. Au-delà des questions institutionnelles, il faut surtout avoir des politiques concrètes de croissances et admettre que la BCE ne peut pas être conçue sur le modèle de la Bundesbank. Sinon, on a une Union qui fonctionne pour un seul pays : l’Allemagne. Tous les pays ne peuvent pas être comme l’Allemagne, il faut respecter la diversité, et l’Allemagne n’aurait d’ailleurs plus d’avantage compétitif particulier si tout le monde appliquait son modèle.
La Grèce
Un article paru samedi 19 dans la Stampa révèle que c’est Sarkozy qui s’est opposé à l’organisation d’un référendum en Grèce. Papandreou avait d’ailleurs prévenu le Président de la République et la Chancelière qu’il souhaitait le faire pour disposer de la légitimité politique nécessaire à un nouveau plan d’austérité. Angela Merkel n’était pas tout à fait fermée sur le sujet. Mais, Sarkozy craignait surtout que cette annonce confisque la scène médiatique du sommet du G8 qui se tenait justement en France. Or ce qui était possible il y a quelques mois devient aujourd’hui une ingérence inacceptable, et ce sont les Grecs eux même qui ne veulent plus s’y livrer dans la mesure où ils viennent déjà de dissoudre leur Parlement.
L’aggravation de la situation en Grèce -et particulièrement la séquence des premières élections législatives- a été très mal gérée par les partenaires européens. Ils ont « démonisé » les partis radicaux. Ils ont été perçus comme exerçant des pressions pour influencer le processus électoral. Avec les résultats que l’on sait , même si le parti Syriza n’est pas antieuropéen, mais conteste la politique d’austérité.
La situation paradoxale de la Grande-Bretagne
Les inégalités augmentent en Europe malgré la poursuite d’une croissance relative. Les déséquilibres persistent alors qu’ils sont dénoncés depuis des années par des gens comme Michel Rocard. L’économie réelle est de moins en moins importante dans le PIB par rapport à la finance, ce qui devient très dangereux en cas de crise systémique et peut conduire à un effondrement inouï. Il faudrait séparer les banques commerciales des banques de dépôt. Les financements ne vont plus aux entreprises, et la taille des banques d’affaires fait qu’on est obligé de les sauver. La crainte existe aujourd’hui de paniques bancaires par retrait des dépôts, en Grèce ou en Espagne. On parle donc de garantie de dépôts européenne. Or ceci ne peut se faire sans inclure la Grande-Bretagne.
Cette dernière a une analyse très poussée sur des conclusions anti euro. Les anglais ont raison sur l’analyse, mais ils limitent leurs propos à l’intérêt de la Grande-Bretagne. Ils ne se sentent pas faire partie de l’Europe et, en cas de conflit, ils choisissent toujours les intérêts nationaux. Pourtant, ils comprennent bien qu’une crise de la zone euro serait très couteuse pour eux, car une panique bancaire aurait des conséquences indirectes incontrôlables pour la finance anglaise ; par ailleurs ils sont économiquement très interconnectés avec le reste de l’Europe.
Ils pensent donc très important aujourd’hui de sauver l’Euro. Au G8, ils demandent que la Grèce reste à l’intérieur car une sortie serait très couteuse. C’est une position qui est malgré eux très pro européenne.
Encore une fois, soignez la forme s’il vous plaît.
Quelles sont les questions que vous avez posées à M. Consoli ? On ne voit que ses opinions thématiques, pas vos questionnements.
Pour la photo en tablier dans la cuisine…moyen.
Et puis, RELISEZ-VOUS.
Une analyse que je comprend bien. Merci.
Mais je reste sur ma faim :
Quelles solutions préconisez vous ? Quels chemins devons nous emprunter ?
Je pense que lors de la première construction enropéenne, on n’imaginait pas les complications qui en découle- raient. La seule chose que l’on savait c’est que les participants avaient chacun leur rythme et qu’il faudrait de longues années avant que la machine puisse marcher-même au minimum-!
La crise a bouleversé ce qu’on essayait de construire et maintenant, les générations nouvelles héritent d’une Europe maladroite, où les solutions « réactionnaires » l’emportent et ce n’est pas pour le bien de tous. J’admire ceux qui s’attellent à la tâche et entretiennent malgré tout l’espoir…