Varsovie 1944, l´Europe en héritage

Sauvons l’Europe est partenaire de la rencontre avec l’auteur Julien Rencki qui se tiendra à Bruxelles le 23 janvier 2025. La librairie UOPC accueillera l’écrivain qui revient sur le récit de son père, le Résistant polonais Georges Rencki, lors de l’insurrection de Varsovie, à retrouver dans son ouvrage intitulé  Varsovie 44. Journal d’un insurgé (Editions Perrin). Le Vice-Président de Sauvons l’Europe assurera le rôle de modérateur lors de cet échange auquel vous êtes convié. En attendant le 23 janvier, Julien Rencki a déjà répondu aux premières questions de Henri Lastenouse. Rappelons que Georges Rencki était membre de Sauvons l’Europe.

Comment pitcher votre ouvrage ?

Le 1er août 1944, Varsovie se soulève contre les nazis. Pendant deux mois, les insurgés polonais, liés au gouvernement en exil à Londres, vont affronter les plus impitoyables unités Waffen-SS. Parmi ces Résistants, mon père Georges Rencki, 18 ans, qui fera partie des quelques survivants. Il laisse à sa mort en 2017, un récit inachevé que j’ai mis en forme et édité.

C’est aussi le témoignage d’un fédéraliste européen de cœur, dont le parcours personnel témoigne des ressorts fondamentaux qui animaient les pionniers de l’Europe. Il sera ainsi à Bruxelles, dès le 1er janvier 1958 aux côtés de Sicco Mansholt, pour participer au lancement de la jeune Commission européenne. Il y restera 30 ans. Après sa retraite, il prendra une part active aux négociations d’adhésion de la Pologne à l’Union européenne.

Pour paraphraser Romain Gary, c’est le récit d’une éducation européenne…

Oui, mais sans même le recours à la fiction. Romain Gary écrit depuis Londres à l’écoute des récits de la Résistance polonaise. Mon père à Varsovie témoigne d’un parcours dans la Résistance, dès 14 ans, au même titre d’ailleurs que beaucoup de sa génération. Une génération de jeunes Polonais qui a été privée définitivement d’école par les nazis, du jour au lendemain, suivant l’objectif des Occupants de faire de la population polonaise des esclaves soumis à leurs nouveaux maîtres. Le fait même de continuer à s’instruire impliquait déjà d’entrer en Résistance. Au cours de son adolescence, et face à la terreur nazie, mon père va rapidement basculer, avec ses camarades, de la résistance intellectuelle du lycée clandestin à la résistance armée.

Votre récit insiste sur les conséquences de la disparition de l’Etat polonais.

Oui, mon père a été le témoin du sort impitoyable réservé à sa patrie par les nazis d’une part, et les Soviétiques d’autre part. A partir de 1939, il n’existe plus d’Etat polonais à même de protéger la population. Alors que les Juifs sont voués à l’extermination, les Polonais non-juifs doivent être réduits en esclavage, les élites et la culture nationale éradiquées. Alors que tout leur est interdit, mon père témoigne comment lui et ses camarade ont trouvé ensemble dans l’autodérision l’antidote indispensable à la peur qui les hantait en permanence. En même temps leur engagement porte un désir de liberté et de fraternité européenne au cœur de leur espoir pour le monde à venir, après la défaite nazie.

L’insurrection de Varsovie, déclenchée le 1er août 1944, va échouer face à la folie dévastatrice nazie, au cynisme soviétique, et à l’abandon des alliés anglo-américains.

Durant l’insurrection de Varsovie, mon père va se battre avec ses mêmes camarades rue par rue, immeuble par immeuble. Effectivement abandonnés des alliés anglo-saxons, les « Polonais libres » vont tenir, affamés, décimés, jusqu’au début du mois d’octobre. Lorsqu’ils rendent les armes, la bataille a fait près de 200 000 morts, et Varsovie est détruite. Avec les derniers combattants, Georges Rencki, est envoyé dans un camp de prisonniers de guerre en Allemagne. Pour lui, s’engager signifiera à jamais l’absolue obligation de bâtir les Etats-Unis d’Europe. Au-delà de leur défaite militaire, la génération de mon père a offert à terme à leur patrie l’Europe en héritage.

Rendez-vous jeudi 23 janvier de 18h à 19h, à l’UOPC (14-16 avenue Gustave Demey – Bruxelles). Inscription en cliquant ici sur le site de l’UOPC.
Varsovie 1944, Journal d’un insurgé. Georges Rencki (éditions Perrin). Édition établie et présentée par Julien Rencki. Préface de Stéphane Courtois. En librairie depuis le 29 août dernier. 352 pages. 23 euros.
Henri Lastenouse
Henri Lastenouse
Vice-Président de Sauvons l'Europe

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4 Commentaires

  1. Il faut vous féliciter. Parler du soulèvement de Varsovie sans utiliser le mot ghetto ou juif (à part non juif), Il faut le faire. Si Georges et Julien Rencki ne sont pas juif, ou ne veulent pas s’afficher comme juifs, c’est leur droit, mais en tant que journaliste il est important je crois que vous le mentionniez. De même si la politique polonaise est de minimiser cet aspect de leur histoire.
    Ce soulèvement des juifs contre la solution finale a galvanisé ma jeunesse, c’étaient mes héros. Que votre article ne mentionne pas cette dimension de la situation me heurte. Ce silence, cette absence de mémoire de la grande honte de l’Europe, risque de favoriser un retour de ces drames. Je suis athée, mais d’origine juive.

    • Merci. Même réflexion ici. Mais ne pas confondre le soulèvement armé du ghetto de Varsovie par les Juifs ghettoïsés en avril-mai 1943 et l’insurrection de Varsovie 1er août-2 octobre 1944 par la résistance polonaise lors de l’Opération Tempête. Ma question est Quelle a été l’attitude de la résistance polonaise face à la situation des juifs? (voir Shoah de Claude Lanzmann). Sinon, après diverses recherches : « L’attitude de l’Armée de l’intérieur polonaise (AK) à l’égard des politiques d’extermination nazies est l’un des sujets les plus controversés des relations entre la Pologne et les Juifs pendant la guerre. Des études universitaires parues depuis les années 1980 ont reconstitué les organisations locales et nationales complexes de l’Armée de l’intérieur, ses nombreuses sous-divisions et départements, ses politiques et ses objectifs, ainsi que son sacrifice lors de l’insurrection de Varsovie d’août-septembre 1944. Dans cet article, j’analyserai les témoignages de survivants de l’Holocauste comme source d’évaluation de l’attitude et du comportement de l’Armée de l’intérieur envers les Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Les archives utilisées comprendront des témoignages conservés à l’Institut historique juif de Varsovie, aux Archives Yad Vashem de Jérusalem, aux Archives Fortunoff des témoignages de l’Holocauste de Yale et aux Archives visuelles de la Fondation Shoah de l’Université de Californie du Sud. Je démontrerai ’opinion largement répandue dans la mémoire collective juive et l’historiographie juive selon laquelle l’Armée de l’intérieur était hostile est largement confirmée par ces sources. En même temps, les mêmes sources révèlent qu’une minorité substantielle des témoignages – environ 30 pour cent – ​​raconte l’histoire d’une Armée de l’intérieur qui a sauvé et protégé des Juifs. La deuxième partie de cet article compare les témoignages aux documents, en se demandant si le comportement de l’Armée de l’intérieur dans son ensemble reflète ou non l’expérience des Juifs telle qu’elle ressort des témoignages d’après-guerre. L’article donnera une forme plus concrète au débat sur l’attitude et le comportement de la résistance polonaise envers les Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. » (The Polish Underground Home Army (AK) and the Jews: What Postwar Jewish Testimonies and Wartime Documents Reveal. Joshua D. Zimmerman, volume 34, issue 1)
      https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0888325419844816?icid=int.sj-full-text.similar-articles.7

  2. Bonjour.

    Les ETATS UNIS D’EUROPE, qu’en ont’ils fait ?

    A cause de l’égoïsme de nos gouvernants, tous les ingrédients sont là pour la désintégration de l’Europe, elle est probable sauf si il y a sursaut et lucidité, j’en doute fortement ?

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