La transition climatique européenne dans le coma ?

C’est autour de la question climatique que se jouera sans doute la prochaine élection européenne. Le consensus européen est désormais rompu à ce sujet, et structure deux camps politiques : les progressistes face à l’alliance de la droite et des autoritaires.

Le 27 juin dernier, la droite européenne a tenté d’enterrer le programme de renaturation européen. Au sein de la commission environnement du Parlement, elle a empêché une majorité favorable. C’est donc lors d’un vote de plénière au Parlement européen que se décidera l’avenir de la protection des espaces naturels européens.

Prenons nos forêts. Le modèle productif de bois exploités qui ne contiennent qu’une seule espèce d’arbre, choisi pour son usage se révèle très fragile face au changement climatique. Les forêts sont vulnérables aux parasites, sèchent, jaunissent, brûlent. Il serait par exemple nécessaire de réintroduire de la diversité dans les plantations, ainsi que des sous-bois, ce que prévoit précisément d’imposer le texte européen. D’autres milieux naturels, comme les terres agricoles, les tourbières et les habitats marins sont également concernés, avec une baisse de l’utilisation des pesticides.

Alors pourquoi cette friction ? Nous avons signalé il y a un an que la droite européenne, le PPE en tête, s’éloigne désormais du projet de transition écologique qui avait fondé la Commission Von der Leyen. L’écologie oui, mais pas au détriment de nos emplois, de nos industries, de notre agriculture. Le PPE se baptise désormais « parti des agriculteurs » et s’oppose directement à la nouvelle mouture de la politique agricole commune.

Mais il y’a un an, le PPE n’avait pas réussi à rassembler une majorité anti Green Deal. Le second changement est un renversement d’alliance. La droite s’est alliée à l’extrême droite pour emporter le pouvoir en Suède, en Finlande, en Italie, en Espagne… Il y a un an, nous saisissions le PPE de la dérive d’une partie de ses eurodéputés français, autour de François-Xavier Bellamy, indiquant que si le PPE ne commençait pas à créer une digue politique autour de l’extrême-droite, elle céderait dans d’autres pays. Le PPE tente désormais une distinction entre les droites extrêmes nouvelles auxquelles on peut s’associer, comme Giorgia Meloni, et les infréquentables comme Marine Le Pen ou les conservateurs Polonais et Hongrois. Une alliance formelle est désormais ouvertement discutée, et les projections des sondages n’interdisent pas de penser à une victoire.

Dans ces conditions, le groupe centriste risque de se trouver dans une position d’arbitre. Or il est très divisé sur la politique climatique, son courant libéral s’opposant à toute réglementation supplémentaire tandis que son courant social penche ici vers une majorité de projet avec la gauche et les écologistes. Le groupe français est ambivalent, soutenant les propositions de la Commission mais tenant compte des demandes de « pause » énoncées par Emmanuel Macron.

Comment recréer un consensus ? Le PPE se plaint d’une écologie punitive, au moment ou les USA lancent un immense programme de subvention à la transformation industrielle verte. Mais dans le même temps, la tentative de la Commission de produire un programme comparable avec un fonds de souveraineté européen a échoué devant les Etats austères de l’Union. Le desserrement relatif des règles de contrôle budgétaire sur les Etats individuels vise à leur permettre de faire au niveau national, mais ceux qui auraient la capacité financière ne l’emploieront pas.

Il faudra donc, soit trouver les voies d’un fonds de transition européen, soit risquer de voir une alliance entre la droite et l’extrême-droite aux Parlement européen, comme nous la voyons à présent dans la vie de nos voisins.

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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6 Commentaires

  1. Il est temps, en Europe, de donner le pouvoir législatif au Parlement européen et de mettre ses élus devant leurs responsabilités. Ils ne sont pas là pour protéger les gouvernements des États membres mais pour assurer l’avenir des citoyens européens. Il faut mettre un terme aux interférences des politiques politiciennes nationales avec l’avenir de l’Europe. Il est temps, aussi, d’empêcher les États membres de contrer la politique étrangère vde l’Union pour tenter d’obtenir de petits avantages économiques à court terme.
    Rien ne sera possible sans un ordre véritablement constitutionnel de l’Europe, donc de faire élaborer une vraie constitution par les citoyens et leurs représentants. Le temps des traités intergouvernementaux est terminé, place à la démocratie. C’est autour de cela que doit se dérouler la campagne pour l’élection du nouveau Parlement européen.

    • Bonjour Monsieur MENNERAT.

      Vos écrits rejoignent les miens, dans mes précédents commentaires, je n’ai eu de cesse de demander la finalisation de la construction européenne, seul vrai objectif qui permettra d’avancer pour résoudre la majorité des problèmes que nous rencontrons (écologie et crise climatique, défense, douane, fiscalité, etc…).

      Comme je l’ai déjà écrit, nous assistons impuissant au bal des hypocrites ?

      Comment s’est construit l’Europe au départ, avec quelques états, comment faut-il la finaliser, avec quelques états également, les autres suivront par la suite, j’en suis sûr mais nos gouvernants actuels, nationaux et européens, le veulent ‘ils vraiment, j’ai un vrai doute sur cela ?

  2. Je pense que nous nous dirigeons vers un choc important, choc écologique mais aussi culturel, dans nos habitudes, notre manière de vivre, notre manière de penser. Le choc risque aussi d’être politique et civilisationnel, donc violent. Ce choc aura lieu, car même si nous européens, nous opérons l’évolution nécessaire, ce qui n’est déjà pas acquis, il y a certainement quelques milliards de personnes dans le monde qui ne voudront ou ne sauront le faire. Notre priorité devrait donc être d’essayer d’amortir ce choc un maximum possible.

  3. Bonne analyse de la situation, merci Arthur. L’Europe est un projet politique, comme nous le savons. Militons pour que les citoyens votent en mai 2024 et réfléchissent à l’impact de leur vote, pour nous éviter une majorité droite et extrême droite, qui ne peut pas être favorable aux enjeux écologiques. Il nous faut poursuivre et approfondir le « Pacte vert européen » !

  4. Le PPE est donc bien le parti des ploucs ! -)
    Ce dont personnellement je n’ai jamais douté. Les politiques actuels retournant leurs vestes au gré de leurs intérêts pour pouvoir rester en place et favoriser leurs idées quand ils ou elles en ont, voire leurs donneurs d’ordres, je ne serais pas surpris que la couleur du Parlement confirme le pronostic fait dans cet article l’an prochain.
    De toute façon qu’est-ce qui est réellement important pour la majorité des européens (nes)? Nos emplois, nos industries, notre agriculture. Donc nous pouvons allègrement continuer de :
    – travailler jusqu’à point d’âge (jusqu’à ce que l’on s’aperçoive que l’espérance de vie reflue, ce qui aura comme conséquence des retraités sans retraite),
    – polluer, de brûler, d’empoisonner, de tuer (des migrants que notre brillante «civilisation» dopée au carbone attire comme des alouettes), etc etc.
    Et pourtant il est de notoriété publique que :
    – 98 % des sols français (cultures, prairies permanentes, forêts, etc.) sont contaminés par au moins une substance pesticide (Froger C, Jolivet C, Budzinski H, Pierdet M, Caria G, Saby NPA, Arrouays D, Bispo A. Pesticide Residues in French Soils: Occurrence, Risks, and Persistence. Environ Sci Technol. 2023 May 23;57(20):7818-7827),
    – que l’eau de nos nappes devient impropre à la consommation, contaminée par des métabolites de pesticides interdits depuis 2020 avec des niveaux supérieurs aux limites admises par l’ANSES ou en IdF par le dioxane, un stabilisant de solvants cancérigène produit dès les années 1960 dans les industries sans parler des nanoparticules de plastique,
    – que le sable du Sahara nous ramène chaque année du Césium 137 issu de nos propres essais nucléaires faits il y a 60 ans en Algérie
    et plus globalement : que l’eau se raréfie et que les températures et les catastrophes climatiques augmentent exponentiellement chaque année.
    Or que voulons nous réellement ? Continuer la compétition du tous contre tous pour nos emplois, nos industries, notre agriculture ou pouvoir vivre en bonne santé et en bonne intelligence avec les autres et notre écosystème, usé l’an passé dès la fin du mois de juillet par nos activités (le jour du dépassement de la Terre est intervenu le 28 juillet 2022) ?
    L’Homme, naïf prométhée, créé plus de problèmes qu’il n’a suffisamment d’intelligence pour les résoudre. J’ai toujours cru que le Paradis était sur Terre. En croyant à notre toute puissance nous parviendrons, après avoir tout détruit, à nous en chasser nous mêmes, quelque soit le résultat des prochaines élections.

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