Les élections européennes ont enregistré hier soir la perte progressive d’influence des deux grands partis, le conservateurs et sociaux-démocrates perdant 35 sièges chacun. Pour la première fois, ils ne disposent plus à eux seuls de la majorité absolue au sein du Parlement, ce qui condamne l’habitude de se répartir les postes à deux. Ce n’est pas un effondrement spectaculaire, mais une érosion générale qui se traduit plus fortement dans certains Etats.
Les centristes de l’ALDE progressent quelque peu en passant de 70 à 105 sièges, et les Verts de 50 à 70. Ceci ne compense pas entièrement les pertes des deux grands partis et le bloc immobile des eurosceptiques qui ne font rien est en très légère hausse pour atteindre 200 députés. Le groupe de la gauche de la gauche perd une quinzaine de députés pour tomber sous la quarantaine.
Nous avions indiqué qu’une parti des sociaux-démocrates et les centristes rejoints par Macron recherchaient désormais une majorité sans les conservateurs du PPE, en s’appuyant sur les Verts et une partie de la Gauche (GUE). La tâche sera ardue. En supposant même faire le plein de la GUE, il manquerait une grosse dizaine de députés pour atteindre la majorité absolue.
Une coalition « Jamaïque » comme nous en avons vue apparaître en Allemagne, rassemblant les conservateurs, les centristes et les écologistes tomberait encore plus court.
Deux solutions apparaissent donc : la première est la reconstitution de la GroKo du Parlement européen, mais élargie aux centristes et sans doute aux Verts. Ceci se traduirait par une répartition des responsabilités entre ces principaux partis.
La seconde est une coalition minoritaire, qui se pratique régulièrement dans des démocraties usant de la proportionnelle. La chose est techniquement possible, et nous la souhaitons. Elle est cependant ambitieuse dans un Parlement qui cherche à construire son modèle démocratique par touches, mais c’est ce que les principaux représentants de ces courants au Parlement européen ont réaffirmé hier soir. Et 10 points de participation en plus pèseront peut être.
En France, que dire ? Le Front national s’est installé au niveau qu’on lui connaît désormais depuis longtemps, aux élections européennes, locales ou nationales. Le parti socialiste confirme sa dégringolade en arrêtant la glissade. La République en Marche est désormais, au-delà du pari personnel perdu d’Emmanuel Macron, un mouvement solidement central, mais qui s’est nettement déplacé sur sa droite.
En effet, on observe la faillite de la stratégie des Républicains, qui ont fait campagne sous les crucifix, l’acceptation des thèses du grand remplacement et un soutien assumé à Orban. Cette épopée a fait briller les yeux d’une certaine presse de droite et se termine dans la poussière des sables.
En miroir, l’impasse d’une France Insoumise dont la liste portait deux lignes très distinctes l’a conduit à être inaudible. Son électorat ne s’est pas mobilisé. Le PCF et le mouvement de Benoît Hamon payent le refus de toute alliance.
Et bien sûr, les Verts. Au sein de la gauche de gouvernement, ils émergent désormais comme des leaders. Et ils ne sont pas isolés, contrairement à ce que laisserait croire au premier regard l’éparpillement des listes. Les partis, qui réunis sous la candidature personnelle de Benoît Hamon faisaient 6.63% à la dernière élection présidentielle, tutoient désormais ensemble 25% des suffrages.
Les forces politiques françaises qui pourraient au niveau européen s’engager dans la constitution d’une majorité europrogressiste rassemblent 45% des suffrages. Finalement, ce n’est pas si mal.
Bonjour,
pour moi L’Europe politique est née hier soir.
Une Europe politique où le résultat global a une signification forte, différente des résultats locaux, et qui fait que la démocratie européenne est plus forte que tous ses contempteurs.
Au total on a même l’impression que la construction politique européenne est à certains égards plus solide que les constructions politiques nationales. L’existence du parlement européen permet l’expression de divergences dans toutes leurs nuances que ne permettent plus les parlements nationaux, pour deux raisons : d’une part ils sont enfermés dans la mentalité traditionnelle locale, qui pose des interdits sur beaucoup de sujets (pour de bonnes ou de mauvaises raisons); d’autre part ils sont muselés par les gouvernements à des fins d’efficacité de l’action de terrain, de l’action administrative. Mais in fine ça a abouti à l’écrasement du débat démocratique. Ce qui peut se comprendre en période de crise, quand un petit pays est soumis à une forte pression. Mais l’Europe est un grand pays, et s’il y a des pressions extérieures, à l’intérieur il n’y a pas de situation de conflit militaire, même s’il y a des urgences politiques, sociales, environnementales. Ce qui est normal dans toute vie politique ou rien n’est jamais parfait, les réussites apparentes pouvant toujours cacher des problèmes potentiellement graves mais non encore avérés.
Le cadre de la construction européenne a tenu bon, alors que tout a été mis en oeuvre pour le crash test.
Effectivement, la pluralité des opinions avec une plus grande place faite a l’écologie reflète mieux les aspirations des européens dans leur diversité. C’est encourageant et espérons que la mobilisation sera encore plus forte aux prochaines élections.
Ce que vous dites sur le parti de Benoit Hamon concernant la constitution d’une liste d’union est faux. Une proposition a été faite par Génération.s, d’une votation citoyenne pour permettre la constitution d’une liste commune puisque les appareils politique et en particulier le PS et les verts refusaient toute alliance..Cette proposition a été refusée alors qu’elle permettait aux citoyens de sensibilité de gauche de s’exprimer directement à partir des programmes de chacun. pour constituer une liste à la proportionnelle. Cela montre à quel point les dits progressistes sont en retard sur les progrès à réaliser en matière de démocratie. Le PS et les verts portent donc la responsabilité de la désunion pas Générations.s. En conséquence je vous remercie de rectifier votre propos sur ce point.
D’autre part, Génération.s et le Printemps européen ont constitué un programme préalable au vote du 26/5 en fédérant 14 pays sur des propositions claires et précises. Les citoyens savaient par conséquent sur quoi ils s’engageaient en votant pour cette liste. Cette transparence permet entre autre de limiter les négociations après la votation. A contrario, pour les tous les autres partis nous avons des propositions par pays sans aucune cohérence d’ensemble. En fait, les citoyens votent sur des propositions en France qui n’auront aucune chance d’être adoptées à la fois par le parlement mais aussi au sein même de leur groupe respectif. Nous avons donc à faire à un gros mensonge par omission. Il ne faut donc pas s’étonner que les citoyens après avoir cru à des idées ou des propositions soient déçus et se détournent des « progressistes » (on ne dit plus « gauche » maintenant pour ne pas effrayer le bon peuple…). Il ne faut donc pas confondre recherche de consensus et magouille en coulisse. On peut d’ailleurs constater que depuis plus de 25 ans aucune mesure fiscale n’a été réellement entreprise pour limiter la fuite des capitaux ou la fraude à la TVA. C’est même plutôt l’inverse ! Pourtant nous avons bien un partage des pouvoirs au sein de l’UE entre les S&D et le PPE.
Pour aller plus loin, et pour bien comprendre la position des S&D et des « progressistes » pourriez-vous nous indiquer qu’elle est ou sera la position de ce groupe sur les 3 paradis fiscaux que sont l’Irlande, le Luxembourg et les Pays bas et par conséquent, qu’elle est ou sera la position de M Timmermans concernant sont pays. Quelle proposition va-t-il faire pour mettre fin à ce détournement de fonds opéré sur les biens de la collectivité européenne ?
En effet les citoyens européens attendent des mesures fortes sur la fraude fiscale et cela ne souffre d’aucun compromis d’aucune sorte car il s’agit d’un vol et donc d’un crime.
Je regrette que la liste Générations et B. Hamon n’ait pas de représentants. C’était les seuls à inscrire le mot «partage» sur leur tract et à incarner ce mot par des actes vis à vis d’autres listes européennes.
Continuons donc tous dans l’hubris et le combat de tous contre tous et de presque tous contre notre environnement.
Jusqu’à quand ? Jusqu’à où ?
Les europrogressistes ont à mener un combat essentiel sur deux fronts:
-le front de la crise climatique
-le front des nationaux-populistes, dont chacun soi qu’ils sont fondamentalement des négationnistes du réchauffement climatique.
C’est avec cette idée en tête que quelques réflexions me viennent à l’esprit après les élections européennes, tant du point de vue européen que du point de vue français.
Au niveau européen, j’aimerais évidemment une coalition minoritaire voir le jour au sein du Parlement. Elle n’aurait pas la majorité absolue mais pourrait être plus importante que chacun des groupes du parlement, si elle rassemble les groupes S&D, Verts, ADLE, a fortiori si quelques transfuges du GUE ou du PPE la rejoignent. Je suis incapable de faire un pronostic. Je crois que c’est un objectif de LREM, peut être de certains rescapés sociaux démocrates. (Je ne peux que me réjouir de l’élection de Pierre Larrouturou, l’un des principaux apôtres du pacte Finance Climat). J’ignore si c’est un objectif des verts français dont la tradition est isolationniste mais ils seront heureusement insérés dans un groupe dont beaucoup de membres , notamment allemands, n’ont pas cette tradition.
Rappelons nous que si les socio démocrates vont mal en France, c’est malheureusement une vieille histoire: il y a quarante ans c’était encore des socio traitres pour une bonne partie de la gauche française. Mais ils ont tiré leur épingle du jeu aux Pays Bas, en Espagne, au Portugal…et même en Italie où le PD est le très honorable second parti derrière Benito Salvani.
Au niveau français, on peut dire que le premier des deux fronts ci-dessus a tenu, grâce aux verts et au score honorable dans l’absolu de LREM. On ne peut qu’être inquiet de la situation du second front. Dans des élections nationales il peut tenir grâce au mode de scrutin, mais celui ci est plus cher à mon cœur (ou plutôt à mes tripes) qu’à ma raison. Alors il reste le Front Républicain, qui a fait son œuvre aux dernières élections régionales…
S’il ne manque qu’une grosse dizaine de voix à une majorité progressiste au Parlement Européen, je crois qu’un rôle-clef pourra être celui du Mouvement 5 étoiles italien: anti-système, populiste, désagréable sur beaucoup de points, mais en phase sur les questions sociales et climatiques avec les partis progressistes. Si la tête est délirante, la base est assez intéressante, et les votes concrets des eurodéputés de ce parti sur les questions climatiques sont même tout à fait en pointe.
En plus des hypothèses relatives aux notions de coalitions (elles vont déterminer le choix du futur président de la commission), il faudrait faire sauter cette règle bloquante de l’unanimité et la remplacer par celle d’une notion de majorité qualifiée.
Pour ce qui concerne le vote exprimé par les électeurs Français je remarque que malgré une campagne qui a voulu mettre l’accent sur une sorte de duel MLP/EM et une forme de référendum pro ou anti EM c’est quand même ceux qui ont défendu des propositions à mettre en action au niveau Européen qui ont progressé.
Enfin toute action doit pouvoir s’appuyer sur des moyens financiers clairement identifiés et dont l’utilisation serait strictement contrôlée.
Pour terminer, j’espère que pour les prochaines élections Européennes seront présentes des listes mixtes comportant des candidats de divers pays de l’UE.
Tout a fait d’accord sur la nécessité d’avoir des listes transnationales aux élections européennes Par contre il faut se rappeler qu’il n’y aucune règle de l’unanimité au parlement européen Ne pas confondre avec le conseil C’est bien lui qui propose un Président de commission, mais ce dernier doit être confirmé par un vote du parlement
Il y en avait une, celle représentée par Génération.s et en plus elle avait un vrai programme écologique, social et économique.
La véritable surprise de cette élection c’est la montée des Verts de Jadot. J’espère qu’ils en comprennent l’immense responsabilité politique, pouvoir enfin sortir de ce jeu binaire imposé par Macron, l’ultralibéralisme ou le populisme, alors que tous les deux vont au chaos.