Les passions mauvaises de l’Angleterre

Le référendum britannique sur l’appartenance à l’Union européenne a fait une morte. Peu connaissaient Jo Cox, et chacun mesure à présent qu’on la découvre trop tard qu’elle manquera au monde. Bien sur c’est l’acte d’un fou, mais baignant dans un climat de violence verbale partagée qui a légitimé son passage à l’acte. Comment peut-on parvenir à un tel niveau d’animosité sur des sujets que l’on décrit généralement comme ternes et techniques?

Chacun s’accorde à dire que le débat aura été d’une insigne pauvreté, les partisans de l’UE ne proposant que la peur de partir, et les autres la peur de l’immigration. La plupart des reproches faits à l’Europe sont idiots. L’empilement des directives tatillonnes? Comme si les administrations britanniques n’étaient pas capables de produire les leurs, qui sont nécessaires à toute régulation d’un marché. C’est grâce à elles que l’Europe a les normes de santé et de sécurité les plus protectrices au monde. La crainte de perdre ses frontières? Le Royaume-Uni n’est pas membre de Schengen et quiconque prend l’Eurostar s’en rend compte rapidement. Les armées européennes? Elles existeront sous mandat de l’Otan. L’Euro? Nos amis Britanniques n’en font pas partie. Non plus qu’une large part de l’Europe sociale. La contribution britannique? Elle est triviale pour une économie de cette taille. La souveraineté? Qu’en ont-ils perdu? Et qu’en feront-il, sinon se placer sous le patronage américain?

Mais l’Europe n’est ici qu’un paravent commode pour une confrontation entre une partie du peuple et les élites qui dirigent l’économie moderne du pays. La carte des sondages du Brexit montre une chose claire: géographiquement l’ensemble du pays vote pour rester, à l’exception de l’anneau autour de Londres qui se trouve sous sa domination économique et sociale. Le Brexit est d’abord une affaire entre Londres et sa campagne. Ce qui est visé, c’est l’économie-monde qu’est Londres. La Ville a absorbé les activités, elle a absorbé les nouveaux emplois, elle a absorbé les jeunes qui sont partis et ont laissé les rues vides. Les campagnes, les cités balnéaires et les bourgs de la terre déclinent doucement.

Et cet anneau ne comprend pas que l’Europe est sa meilleure planche de salut. Il suffit de regarder les leaders de cette campagne du Brexit. Veulent-ils améliorer le sort de ceux qui ont du mal à finir les mois? La bonne blague. Il n’ont eu de cesse que d’attaquer les quelques lois sociales européenne auxquelles le pays n’a pas encore obtenu d’exception. Ils défendent le modèle des contrats zero hour, CDI liant le travailleur à un employeur, mais sans garantie de travail. Pas de limitation du temps de travail voyons! Ils répètent en boucle que les entreprises payent trop d’impôt et que les services publics sont inefficaces. La Grande-Bretagne, exemptée de tout contrôle budgétaire, est aujourd’hui le pays d’Europe qui a le plus fort taux de pauvreté des enfants. Qui peut croire que la sortie de l’UE serait l’occasion d’augmenter les fonds du NHS, avec ces gens? Sans parler d’une protection des libertés publiques qui viendrait remplacer la CEDH tant haie.

Les Anglais, de par leur statut si particulier, ont déjà obtenu le plus grand accès au marché européen sans trop s’engager sur rien. Cet accès va demeurer, car des solutions seront trouvées le cas échéant. Ce qui est en jeu aujourd’hui dans le vote référendaire, c’est tout simplement le peu de protection que l’Europe apporte aux citoyens Britanniques et auxquelles les conservateurs ne sont pas encore parvenus à déroger.

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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5 Commentaires

  1. Je crois que la clé se trouve dans le dernier paragraphe. L’Europe est, en effet, un paravent comode d’une confrontation entre les laissés pour compte et les élites du pays.
    Que les supporteurs les plus fervents du Brexit soient à la fois les supporteurs les plus fervents de la destructions de toute regulation du marché de travail et de laa disparition de la santé publique, peu importe ceux qui partagent leur temps entre chomaage de longue duréee et petits boulots, qui doivent attendre des mois pour un rendez-vous avec un médecin et dont les enfants fréquentent des écoles transformés en dépôts d’ enfants et d’adolescents.
    Est-elle l’Europe innocente du sang? J’ai bien peur que non, car depuis le Traité du Maastricht toutes les instances eurpéénnes n’ont cessé de promouvoir la dérégulaton du marché du travail, et la reduction des services sociaux.
    Que cette de colère bénéficient des forces politiques d’extrême droite (UKIP au Royaume Uni, l’afFront National en France, l’extrême droite polonaise et hongroise – cette dernière faisant partie de PPE – ou les néonazis de l’Aube Dorrée grecs) c’est la faute à la gauche, qu’elle prétende être proeuropéénne ou eurosceptique, peut impoorte:

  2. bien sur Non bien sûr!
    les bourgs de de la terre déclinent doucement.!!!
    vVous semblez oublier que relire fait partie du travail du journaliste…

  3. Beaucoup de tristesse pour cette femme abattue, par un malade mental, pour avoir défendu ses opinions. Mais ce deuil ne nous fera pas oublier, l’hécatombe causé par les passions mauvaises des affidés de la BCE, de l’Eurogroup, de l’ordo-libéralisme et autre gouvernement par le dette… La situation sanitaire de la grèce, entrainée par les memorandum de la troïka c’est : 3 millions de grecs exclus de la prise en charge des soins et un budget santé réduit de plus de 40%, la fermeture d’hôpitaux, le manque de médicaments pour quasiment tous, la sous alimentation des nourrissons et enfants en bas age, la forte augmentation de la tuberculose, la réapparition du paludisme, une progression de 1200% des cas de séropositivité, une forte croissance des troubles dépressifs…. Seuls les centres de santés créés par des bénévoles luttent contre cet état de fait. Dont le centre helleniko d’Athène qui s’est vu attribué en aout 2015 le prix du citoyen européen du parlement européen. Ayant eu la mauvaise idée de refuser un prix attribué par un des organismes responsables de la situation contre laquelle ils se mobilisent,les responsables de ce centre se sont vu successivement refusé, le remboursement de leur voyage à bruxelle et l’autorisation d’exprimer leur opinion lors de la cérémonie (par Mm Sylvie Guillaume, députée européenne PS et chancelière de ce prix)… Mais nous n’oublierons pas, tous ces morts anonymes (comme les morts de la rue), victime de la politique décidée dans les conclaves bruxellois, et dont l’u.E devra, un jour ou l’autre et dans les urnes, répondre…

  4. Tenter de sauver l’union des Etats européens, c’est d’abord et avant tout démanteler l’UE de Lisbonne, ce paradis pour fonds vautour et pilleurs de biens publics, en Grèce ou ailleurs !
    A juste titre, les anglais ont voté contre la domination des lobbies et des multinationales, et pour la récupération de droits démocratiques, bafoués dans notre pays, en février 2008 lors du processus de ratification du T. de Lisbonne !
    Bien sur, le choeur des pleureuses – euro-béates ou euro-cyniques… – vont nous bassiner, avec leurs lamentations sur le triomphe des xénophobes et des imbéciles.
    Les mêmes qui ont systématiquement ignoré la volonté populaire, ne voient pas qu’une union politique qui oblige des dirigeants locaux à choisir la baisse de l’espérance de vie de la population pour rembourser des créanciers internationaux, est contraire aux droits humains !
    Grace à ce vote salvateur, le démantèlement de l’UE de Lisbonne, étape indispensable pour refonder une union plus démocratique et plus solidaire, (capable au minimum de contenir la cupidité et la sauvagerie de la finance internationale, plutôt que de les favoriser), est devenue moins improbable.

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