Lettre ouverte aux dirigeantes et dirigeants du Nouveau Front Populaire

Dans une tribune parue dans Le Monde vendredi dernier, Sauvons l’Europe s’est joint à un collectif de 70 femmes et hommes (intellectuels, responsables associatifs, anciens élus de gauche…) pour souligner la gravité à unir tous les acteurs du front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine. Sans perdre de vue que le point de départ d’une telle négociation se fera sur la base de celui du Nouveau Front Populaire (NFP), plébiscité en majorité par les électrices et électeurs aux législatives.

Dimanche 7 juillet, au second tour des élections législatives, les Françaises et les Français se sont très majoritairement opposés au Rassemblement national en jouant pleinement le jeu du front républicain initié par le Nouveau Front populaire (NFP). Nous sommes très reconnaissants au NFP d’avoir proposé un tel front, malgré les profondes divergences qui l’ont opposé à l’ex-majorité présidentielle. Les résultats obtenus par l’extrême droite dans un nombre important de territoires montrent cependant que la colère et le désespoir – au sens littéral du terme – de millions de nos concitoyens et concitoyennes restent profonds.

Arrêter la vague raciste et xénophobe

La voie raciste et xénophobe choisie pour l’exprimer est une impasse qui conduirait le pays au désastre économique, social, écologique et démocratique. Il faut donc réussir à mettre en œuvre ici et maintenant une alternative qui permette d’éviter que la prochaine vague d’extrême droite ne soit encore plus haute et ne parvienne à nous submerger.

Le 7 juillet, les Françaises et les Français ont fait des députées et députés du NFP la première force à l’Assemblée nationale. Ils et elles n’ont pas donné cependant de majorité absolue au NFP et donc de mandat pour appliquer la totalité de son programme, comme cela avait pu être le cas en d’autres temps. Dans un tel contexte, il n’est pas envisageable de commettre l’erreur justement reprochée à Jacques Chirac en 2002 et à Emmanuel Macron en 2017 et 2022, qui, aussitôt élus, avaient oublié les voix de gauche ayant permis leur élection.

Réorienter les politiques publiques

La position de principale force du NFP au sein de l’Assemblée nationale lui donne une responsabilité particulière pour proposer au pays les moyens de sortir de l’impasse où il se trouve du fait de l’absence de majorité claire au Parlement. Il nous semble impossible en effet que la France puisse rester durablement sans véritable gouvernement légitimé par l’Assemblée pour préparer le budget du pays pour 2025 et entamer la profonde réorientation des politiques publiques, indispensable pour ramener la concorde et faire (enfin) reculer l’extrême droite.

C’est pourquoi, le NFP doit sans tarder tendre la main aux autres acteurs du front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine et d’un gouvernement correspondant. Ce sera également le moyen de mettre au pied du mur l’ex-majorité présidentielle, en l’obligeant à se positionner vis-à-vis des nostalgiques qui, en son sein et à droite, rêvent encore de poursuivre et d’accentuer la politique qui a conduit le pays au bord du gouffre.

Le point de départ d’une telle négociation sera bien sûr, du côté du NFP, son programme, mais chacun et chacune d’entre nous sait, et admet par avance, que ce ne sera pas le point d’arrivée dans tous les domaines. Et très peu nombreux seront celles et ceux qui, dans le pays, tiendront rigueur au NFP d’avoir dévié de ce programme sur tel ou tel sujet si cela permet que la France soit gouvernée de manière stable et apaisée.

Un programme d’urgence démocratique est possible

Nous avons la conviction que si la volonté politique est suffisante, il est possible de trouver un accord pour un tel gouvernement d’urgence républicaine. Et de montrer aux Françaises et aux Français que le message a été entendu. Que la volonté est là de mettre un terme à la dégradation des services publics, notamment d’éducation et de santé, d’améliorer le pouvoir d’achat des plus faibles, de rééquilibrer les territoires, de lutter enfin contre toutes les formes de racisme et de discrimination, d’accélérer une mutation écologique juste et solidaire et de réduire les injustices sociales et fiscales.

Le tout en commençant à refondre nos institutions pour renforcer la démocratie et à rétablir dans le champ médiatique les conditions d’un débat public serein et de qualité.

La société civile est prête à se mobiliser

Nous savons que la société civile (associations, syndicats, think tanks, etc.) est prête à aider le NFP à dégager un tel programme d’urgence capable de rassembler une grande partie du pays. Et si d’aventure certains ou certaines préféraient privilégier leurs intérêts de boutique de court terme plutôt que les intérêts supérieurs du pays, cette société civile saurait aussi se mobiliser pour les ramener à la raison, comme elle l’a fait entre les deux tours des élections législatives vis-à-vis de celles et ceux qui étaient réticents à la mise en œuvre du front républicain.

L’avenir du pays est entre les mains du NFP. Nous comptons sur lui pour se porter à la hauteur des responsabilités que les Français et les Françaises lui ont confiées.

Soutenez notre action !

Sauvons l'Europe doit son indépendance éditoriale à un site Internet sans publicité et grâce à l’implication de ses rédacteurs bénévoles. Cette liberté a un coût, notamment pour les frais de gestion du site. En parallèle d’une adhésion à notre association, il est possible d’effectuer un don. Chaque euro compte pour défendre une vision europrogressiste !

Articles du même auteur

15 Commentaires

  1. Je trouve que vous reprenez le discours du NFP selon lequel le NFP a gagné et que c’est autour de lui que doit se faire le front républicain. Ce dernier s’est constitué à partir de toutes les forces qui ont appelé aux désistements réciproques. Le petit différentiel en sièges ne permet pas de parler de victoire.

  2. il faut rappeler que nombre de voix qui s’étaient portées sur NFP se sont reportées et ont favorisé l’arrivée à l’Assemblée d’élus qui à présent de défient du NFP !!! quelle confiance accorder à ces élus qui, à présent, se défieraient de leurs « partenaires utiles » !!! qui va prendre la parole à ce sujet ?

  3. Je souscris à cet appel, même si, dans les circonstances actuelles, elle me paraît un voeu pieux en regard du positionnement de certains membres du NFP, mais surtout de certains membres se prétendant centristes, mais qui, en réalité, se situent nettement à droite, dans la lignée du macronisme.

  4. La negociation ne peut se faire que la base du programme du NFP. Pas question de renier une fois encore l essentiel pour appliquer la politique qui nous a conduit la ou nous en sommes. C est un programme socia democrate qui est en retrai a celui de 81 et 98. Puisqu il y a des macronistes dit de gauche qu ils le montrent ensuite on verra.

    • Tout à fait d’accord avec vous. Quand les centristes font une politique de droite, et les socialistes timides et frileux, une politique de centre droitisant, comment voulez-vous que la plupart des gens qui ont voté NFP ne se fâchent pas de toutes les tergiversations actuelles.
      Macron aurait intérêt à nommer vite Lucie Castrets qui changera sans aucun doute ce qui doit être changé. Les Français le veulent tellement ! Sinon, je crains le pire dans les semaines qui viennent, avec une rentrée terrible…

  5. Demander au NFP de faire des concessions à ceux qui ont été les artisans du désastre dans lequel se trouve la France, est une pilule difficile à avaler. En plus, ces derniers sont de mauvais joueurs: ils n’hésitent pas à changer les règles du jeu quand ils sont en train de perdre. Le drame est qu’ils jouent avec nos vies. Si la Constitution permet ce genre de manipulation, c’est qu’il est temps d’en changer. La démocratie représentative a établi une distance entre le peuple et son gouvernement. Les partis se sont ensuite intercalés entre le peuple et les élus. Les partis ont fini par assujettir tous les candidats. La conséquence de tous ces filtres est que pour la grande part des Français, le pouvoir politique se réduit à déposer un bulletin de vote dans une urne tous les X années. Ce faisant, l’électeur français choisit le candidat en fonction de l’image qu’en ont fait les médias et non de leurs programmes, ayant été trop souvent déçu par des promesses non tenues. Visiblement on peut mieux faire, les moyens de communication actuels mettent à notre portée la démocratie directe… En attendant de si grands changements, il serait de bon ton et beaucoup plus paisible de s’en tenir aux règles établies, de reconnaître le vainqueur désigné par les urnes et laisser une chance à la démocratie de reprendre ses droits.

  6. Bonjour.

    Le résultat est là, nous tous ne voulons plus d’un MACRON qui se complait dans la perversité, ni des extrêmes qu’ils soient de droite ou de gauche.

    Oui, c’est une union sacrée qu’il nous faut pour nous sortir de se marasme, réformer nos institutions est indispensable pour rétablir la démocratie qui a été malheureusement bafouée ces derniers temp.

    Il nous faut un vrai langage de vérité, qui n’occulte pas l’état de nos finances qui nécessite une réforme de notre fiscalité pour rechercher de nouvelles ressources chez les plus nantis, dans la lutte contre les paradis fiscaux, les délocalisations fiscales, etc, etc… .
    Un grand désir de sécurité est réclamé par un grand nombre de Français, il ne faut surtout pas oublier, elle nécessitera la mise en place de « mesures chocs » pour lutter contre la grande criminalité, pour lutter contre la paupérisation qui est le vivier de la délinquance.

    j’espère que les Français ne vont pas se faire voler cette élection, qu’ils sont prêt à défendre notre démocratie et notre république contre tous ces manipulateurs, tous ces cupides.

  7. Je suis d’accord avec l’essentiel de votre texte, j’aurais été un peu plus percutant sur certains points: en politique intérieure sur l’école et la politique de santé et même sur celle de sécurité, en politique extérieure sur l’Ukraine, sur la politique de défense et sur la construction européenne en général. J’aurais enfin insisté sur la nécessité de trouver une personnalité acceptée de 1er plan comme 1er ministre et sur le thème de la laïcité.

  8. Au lieu de se battre pour des postes, la classe politique ferait bien sde se poser la question de savoir pourquoi plus de 10 millions d’électeurs votent pour le RN . Pour moi c’est la 1er question à se poser. Le NFP n’a fait que 7 millions de voix. De plus le parti LFI anti-sémite notoire ne pourra jamais gouverner heureusement pour la France. Je viens de lire un article de Slate sur le personnel politique français qui résume parfaitement ce que beaucoup d’électeurs pensent. (Article « L’effarante médiocrité de la classe politique francaise »

    • Merci pour cette référence à l’article de « Slate », dont j’ai pris connaissance à la suite de ton commentaire. Si la tonalité de cet article met en effet l’accent sur « l’effarante médiocrité de la classe politique française », en dénonçant une stupéfiante hypocrisie et un manque total de discernement, on peut toutefois y relever une nuance qui mérite d’être elle aussi soulignée: à savoir que l’auteur épargne nommément Marine Tondelier, Raphaël Glucksman et François Ruffin, considérés comme « (ayant) essayé de s’élever à la hauteur des enjeux du moment ».

      Quant à la judicieuse question que tu soulèves au sujet d’un vote massif en faveur du RN, des réponses seront sans doute apportées par les politologues lorsqu’ils auront pris encore un peu plus de recul. Cela dit, je ne puis m’empêcher de songer à l’image évangélique évoquant des brebis sans berger. Ont-elles alors la tentation de suivre le loup paré des habits de ce dernier ? On peut craindre en effet que le garde-manger ne soit l’issue de cette transhumance…

      • Je suis entièrement d’accord, cette confusion initiée par la droite et l’extrême droite devient de plus en plus insupportable. J’ai de nombreux amis juifs, profondément anti-sionistes, comme des anti-sémites peuvent être farouchement sionistes. On peut être anti-sioniste et défendre le droit d’Israël à l’existence dans ses frontières d’avant 1967, à côté d’un Etat palestinien libre et démocratique. A cet égard, je conseille la lecture de l’ouvrage de Michel Staszewski : https://www.babelio.com/auteur/Michel-Staszewski/652793

        • Merci pour la clarification que vous avez souhaité apporter au sujet d’une certaine confusion, que, par ailleurs, certains contribuent – hélas ! -à entretenir.
          Cela dit, j’ai cru comprendre que, dans le propos de Frédéric Baron, c’est de l’antisémitisme gangrénant la France – voire, plus largement, l’Europe – dont il est question. Cela n’a rien à voir avec l’Etat d’Israel.

  9. Il n’y a , en effet , pas d’autres possibilité, compte tenu du résultat du scrutin que de négocier certains points du programme afin de rechercher, si ce n’est une majorité, une non opposition d’une partie des députés .
    Nous ne pourrons pas gouverner sans accord plus large, n’ayant pas de majorité. Tout le reste relève d’une affirmation de refus de la réalité.
    La ligne rouge étant que ces points puissent être efficace sur le terrain pour améliorer sensiblement la vie des Français et ressentis comme tels.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

A lire également