L’euro et le coût de la vie

L’entrée en vigueur de la monnaie commune a coïncidé avec une impression d’une sensible hausse des prix. Le coupable était presque trop beau… Car l’euro n’est pas le responsable de ce sentiment.

Premièrement, ce n’est pas la monnaie en tant que telle qui crée de l’inflation, mais la façon dont elle est gérée (par la Banque Centrale Européenne depuis 1999).

Personne ne disait que le franc était responsable de l’inflation auparavant.

Selon l’INSEE, depuis la création réelle de l’euro 1999, l’inflation n’a jamais dépassé 2,5% et est resté en moyenne à 2%. Ces taux ne sont pas comparables l’inflation du début des années 80 à deux chiffres. Cependant, l’inflation perçue par les consommateurs s’éloigne du taux d’inflation calculé par les instituts de statistiques, et ce significativement depuis l’introduction de la nouvelle monnaie.

Pourquoi alors a-t-on l’impression de payer les biens et services de plus en plus chers ?

Et pourquoi l’euro qui est souvent incriminé n’y est absolument pour rien dans cette histoire ?

1) La raison pour laquelle on pense que l’euro est responsable d’une fulgurante hausse des prix vient du fait que les producteurs et vendeurs ont effectivement profité de la conversion de l’euro en franc pour arrondir leur prix ce qui a occasionné une inflation supérieure à ce que l’on connaissait ces derniers temps. Néanmoins, cela remonte maintenant à la mise en service des pièces et billets en euro c’est-à-dire à 2002. Et nous sommes en 2007. De plus, l’arrondi a été réalisé par les vendeurs qui fixent les prix, et non pas par la monnaie elle-même.

2) Une deuxième raison tient à l’évolution de la composition du « panier » de biens et services consommés. Il serait faux de dire qu’aucun prix n’a augmenté de façon très importante. Les exemples foisonnent : le pain, l’essence, le logement et dans une moindre mesure les légumes. De plus, ces dépenses sont bien souvent inéliminables et pèsent différemment selon le revenu. Mais en revanche le prix d’autres biens que nous consommons tous de plus en plus a également fortement diminué : ordinateurs, téléphones portables, MP3… Ce qui fait penser que les prix ont fortement progressé vient du fait que les biens dont les prix ont fortement progressé sont achetés de façon récurrente voire quotidienne. Les autres sont achetés beaucoup moins régulièrement. Ceci a une influence psychologique et joue un rôle déterminant dans la perception que l’on a des prix de notre consommation globale : nous avons toujours l’impression que les prix augmentent mais que jamais ils ne baissent. Changer le panier de référence, ou calculer différents indices selon le niveau de vie ne changerait pas fondamentalement les choses. Des expériences ont été menées par l’INSEE pour construire des indices de prix « personnalisés » en fonction des revenus individuels. Elles montrent de faibles écarts par rapport aux chiffres officiels. L’euro n’est en rien responsable de cette tendance constatée et surtout pas dans l’évolution à la hausse des denrées alimentaires, ou énergétiques. Ces augmentations trouvent leurs explications dans la hausse des matières premières (pétrole, blé), climatiques (fruits), ou encore dans l’attitude des grands distributeurs qui ont largement cherché à consolider leurs marges dans ces périodes.

 

3) Un autre élément explicatif peut se trouver dans les modifications des moyens de paiement. Aujourd’hui de plus en plus, nous avons recours au prélèvement automatique pour tout un tas de dépenses. Pour certaines il s’agit de nouvelles dépenses liées à un accès (bien légitime) à de nouveaux services très peu usités avant l’euro (forfaits téléphoniques, câble TV, abonnement Internet, commerce en ligne…), pour d’autres il s’agit simplement de l’évolution du mode de règlement (factures…). Ces dépenses sont comme « indolores ». Le restant du revenu, qui lui est bien perceptible, sert à régler les achats dits « courants » (alimentaires). Les consommateurs sont contraints d’ajuster le montant de ces achats à ce qu’il reste dans le portefeuille. La conjonction du souhait d’accéder à des biens et services « attractifs » avec un mode de paiement particulier et la faible croissance des revenus offre également une vision de son pouvoir d’achat qui ne correspond plus à celle que l’on pouvait en avoir avant 2000.

L’euro n’est pourtant pas responsable des évolutions technologiques et des nouvelles aspirations des consommateurs.

4) Enfin, subsiste, en France en tout cas, un problème quant à l’évolution des salaires qui ont très peu progressé ces derniers temps et qui ont favorisé la stagnation du pouvoir d’achat des ménages. Les prix ont normalement crû (2% ce qui est l’objectif des autorités monétaires), mais les salaires n’ont pas forcément suivi ce rythme, ce qui explique la sensation, réelle cette fois-ci, de baisse du pouvoir d’achat. Pourtant, ce n’est pas non plus la monnaie européenne qui décide du niveau des salaires !

L’association de différents facteurs (arrondis lors de la conversion, psychologiques, économiques, progrès technique, et stagnation des revenus du travail) a contribué à créer un sentiment inflationniste aux consommateurs. La coïncidence de ces explications avec l’entrée en vigueur de l’euro a pu conduire certains à en attribuer la responsabilité à la monnaie commune. Mais il n’en est rien. Bien au contraire, la gestion de l’euro, avec le mandat de stabilité des prix que s’est fixé la BCE, va amplement favoriser une faible inflation.

Guillaume L.

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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