Méli-mélo référendaire

Ainsi donc, le référendum néérlandais est contraire au traité d’association EU-Ukraine. Plus ou moins. Nous retrouvons aujourd’hui toutes les difficultés liées à une démocratie directe utilisée de manière plébiscitaire.

Depuis juillet 2015, le droit néerlandais permet aux citoyens ayant réuni suffisamment de signatures (300.000) d’imposer un référendum purement consultatif imposant un débat au Parlement. Le résultat n’est validé qu’avec une participation de 30%. Cette procédure est ainsi inaugurée par la droite nationaliste et la gauche de la gauche réunies à l’occasion de l’accord d’association UE/Ukraine.

Avec 60% de non et un peu plus de 30%de participation, le résultat est net. Pour ceux qui ont choisi de participer toutefois (70% d’abstention). Par un curieux fétichisme procédural, les autorités ont longuement espéré que la participation serait à 29%, ce qui aurait permis de ne pas tenir compte du vote. Celle-ci étant de 31 ou 32%, ce vote théoriquement consultatif s’impose politiquement. Et on se demande bien qu’en faire?

Geert Wilders, le leader du non et maître d’oeuvre de la campagne, déclarait: « Il semble que les Néerlandais ont dit non à l’élite européenne et non au traité avec l’Ukraine, le début de la fin de l’UE« . De fait, la campagne s’est principalement centrée sur l’indépendance face à « Bruxelles » et la remise en cause de l’austérité. L’Ukraine n’a été évoquée que de loin en loin, pour agiter le risque d’une immigration massive ou de l’intégration dans l’Union d’un état corrompu et en guerre, ce qui n’est vraiment pas à l’ordre du jour. C’est pourtant bien du traité avec l’Ukraine que le Parlement est saisi, ouvrant ainsi une forte incertitude. Non ratifié par les Pays-Bas, deviendrait-il caduc? On parle de clauses d’opt-out pour ce pays, en particulier sur l’immigration, mais comment le concilier avec un espace de libre circulation? On sait pas bien… Et tant pis pour le mouvement démocratique ukrainien de Maidan, né sur cette question de l’association avec l’Union européenne comme garantie d’une démocratie non corrompue et respectueuse des libertés publiques.

En réalité, la stratégie revendiquée du mouvement du non est en multipliant les référendums de rendre le pays ingouvernable, et l’Europe également. C’est très exactement le jeu que portait le parlement français sous la quatrième république, ne renversant jamais le gouvernement mais votant sans cesse des motions de défiances déclaratives avec le résultat que l’on sait. Ce modèle transposé à une Union qui doit décider en commun à 28 est évidemment porteur de difficultés majeures et pose la question, soit de l’évolution de l’Europe vers une démocratie lui conférant une légitimité propre dans ses décisions, soit d’un opt out des Pays-Bas. A moins bien sur que comme souvent, la nécessité d’un consensus européen ne se traduise simplement par une réduction des démocraties nationales…

Arthur Colin

 

 

Arthur Colin – @arthurcolin

Arthur Colin
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Président de Sauvons l'Europe

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18 Commentaires

  1. Encore un exemple de détournement de la démocratie tant de la part des auteurs de ce référendum que de l’UE.
    La démocratie ne signifie pas l’unanimité, et d’autre part si certaines décisions doivent être prise en conseil Européen, il serait préférable qu’elles soient débattues au préalable au sein du parlement.
    Toute l’ambiguité de cette UE repose sur le fait qu’elle est une UNION DE GOUVERNEMENTS et non issue d’une volonté des citoyens Européens de regouper des moyens pour une gestion commune de compétences déléguées dans une approche démocratique et un partage de valeurs communes.
    Autre remarque l’approche d’une prise de position par voie référendaire suppose :
    1) Que la finalité de la décision soit clairement exposée
    2) que les diverses réponses possibles soient connues ainsi que leurs conséquences (positives ou négatives) tant pour l’ensemble des citoyens Européens, que pour ceux de tel ou tel pays.
    3) Que le bulletin de vote exprime clairement le choix de la solution de la part du votant.Dans le cas des Pays Bas ce référendum n’aurait dû avoir comme but que d’obliger le parlement à prendre position et à expliquer cette position. Dans un cas comme celui de 2005 et de l’adoption d’une constitution Européenne, il aurait été nécessaire d’organiser un référendum simultané dans tous les pays de l’union. Il aurait pu comporter deux questions :
    a) Voulez vous d’une EUROPE POLITIQUE : OUI -NON
    b) Approuver vous ce projet de constitution : OUI – NON
    La réponse à la première question aurait permis de juger :
    a) S’il existait une majorité au niveau de l’ensemble des citoyens Européens
    b) Dans quels pays le oui était majoritaire pour envisager une éventuelle union plus réduite.
    Quand à la réponse à la deuxième question elle ne présentait d’intérêt qu’en cas de réponse favorable à la première question.
    Je crains que le sort de l’UE, comme celui de notre pays, ne soit lié à une remise en cause de leurs institutions par voie démocratique.
    Mais je ne crois pas que cela viendra des partis politiques mais plus de la société civile dans un partage de valeurs.

    • Hi ! C’est la débandade ! Ah! Que ! Ça fait dans la culotte dès qu’on consulte le peuple …
      Pour les neo-cons et Soros, c’est une défaite. Avalez la purée ..,

    • pap63, je suis 7/7 en prise avec tout ce que vous dites ici, je souhaite moi aussi (et comme des milliers de gens je suppose) une Europe politique où l’on ait harmonisé une quantité de choses comme la gestion de la fiscalité á tous les niveaux, où l’on ait harmonisé le coût du travail, les législations et bien d’autres choses qui évitent que les nations de l’Europe entre elles se fassent une concurrence dévastatrice. Et le tout en faisant des élections de plus en plus synchronisées, pour obtenir des modus operati de plus en plus semblables, dans tous les pays européens. Les referendums partiels comme celui des Pays-Bas n’ont aucune valeur de fait, mais des grandes questions qui intéressent tout le monde, on devrait pouvoir parfois poser des questions á tous, le même jour, au cours de grandes journées électorales. ceci je crois n’est encore jamais arrivé, ça ne vous trouble pas ? Moi oui.

      • Si, de même que la variété des modes de consultation suivant les pays, mais, je pense que c’est justement parce que cette Europe politique n’existe pas

        • D’abord merci d’attirer notre attention sur cette très inquiétante affaire;
          On ne peut pas etre par principe hostile au referendum d’initiative populaire; mais le seuil néerlandais de l’initiative : 300 000 signataires pour un pays de 16 millions.parait vraiment trop faible.Comme il est dit plus haut, les questions européennes ont à être traitées au niveau européen et doivent être exclues du champ des referendums nationaux.
          Le taux elevé des abstentions, plus élevé que dans d’autres consultations doit etre interprété:
          – le libellé du referendum était dissuasif par sa complexité
          – les électeurs savent qu’il n’a pas de valeur effective
          – la demobilisation civique s’aggrave dans un pays fondateur de l’Union et que l’Union a si bien servi.
          – ce sujet n’intéresse pas 1)parce qu’il est marginal,2) parce qu’il concerne L’Europe?

  2. voir l’article de libé bien plus équilibré que le votre:

    La campagne du «non», comme celle qui a eu lieu en 2005 aux Pays-Bas sur le traité constitutionnel européen (non à 61,5%), a fait feu de tout bois et a été particulièrement virulente dans un pays travaillé par l’euroscepticisme et par la défiance à l’égard des partis politiques de gouvernement, à l’image de ce qui se passe ailleurs en Europe : crainte d’un possible élargissement de l’Union à l’Ukraine, peur d’être envahi par les travailleurs ukrainiens, dénonciation de la corruption endémique de ce pays (le président Petro Porochenko est impliqué dans le scandale des Panama papers), rappel de la catastrophe du Boeing MH-17 de la Malaysia Airlines abattu en juillet 2014 au-dessus de l’Ukraine et qui transportait de nombreux Néerlandais, rejet de l’euro, des migrants, des réfugiés, peur qu’un super-Etat européen raye de la carte le pays, et bien sûr critique du bilan du gouvernement libéral-social-démocrate de Mark Rutte…

    Cette addition des peurs et des mécontentements a finalement, comme on pouvait le craindre, débouché sur un non massif. D’autant que les partisans du «oui», essentiellement les partis de gouvernement, ont eu du mal à faire entendre leurs arguments sur un texte extrêmement technique qui vise à créer une zone de libre-échange entre Kiev et l’Union afin d’aider économiquement ce pays ravagé par la guerre. Surtout, après avoir eux-mêmes pratiqué la critique tous azimuts de l’Europe à des fins électorales, ils ont été pris à leur propre piège…

  3. si un tel référendum se tenait en France, avec LePen à la place de Wilders, le résultat serait du même tabac, ce qui ne signifierait rien de plus.
    Les peuples répondent à ceux qui interrogent, pas à la question!

  4. il faut être assez sans honte pour traiter les référendums issu des états avec autant de mépris, quelle démocratie voulons nous pour l’Europe ? Celle de la commission européenne qui n’a rien de démocratique ou celle de l’implication des citoyens qui ne sont jamais consulté que pour des élection ou le choix n’est pas permis d’appuyer sur l’Europe souhaité et non imposé par les lobbying (voir Traité atlantique ou le mépris des pétition réunissant 3 millions d’européens de tous pays).

    • Euh, la Commission Européenne est issue des élections européennes au suffrage universel. Juncker était candidat, soutenu par l’ensemble des partis de droite européens, il a exposé son programme politique et les citoyens européens l’ont placé en tête. Sur cette base, il a conclu un accord de coalition au parlement européen avec les centristes et les socialistes, incluant un programme de gouvernement. « Rien de démocratique »?

      • vous ne répondez pas au problème soulevé, pour vous axer sur la forme soit c’est malheureusement un syndrome qui affecte justement l’Europe.

        Voyons je regarde le mandat de chaque commissaire qui les élis ? le mode de nomination due président est soumis à la validation du parlement (j’ai beau chercher je ne vois pas vote des citoyens) soumis par le conseil européen.

        Un vernis démocratique ne tient jamais longtemps face à la réalité, ce n’est pas l’Europe qui nous a été promis et dont nous rêvons, cela devient une Organisation qui s’enferme dans un cercle d’initiés complètement coupé des européens, vous prenez d’horrible risque avec notre rêve quitte à ce qu’un jour le pire arrive.

        J’ai honte de commencer à croire ce qui est souligné de plus en plus que le fonctionnement de l’Europe ressemble de plus en plus au fonctionnement de l’ex-URSS qui se targuait aussi d’être démocratique, on connait la suite.

      • Vous ne répondez pas au problème soulevé, pour vous axer sur la forme pour éviter de répondre sur le fond. Soit c’est malheureusement un syndrome qui affecte justement l’Europe.

        Voyons je regarde le mandat de chaque commissaire quel est leur mode de nomination (un vote non ) ? Poursuivons le mode de nomination du président est soumis à la validation du parlement soumis par le conseil européen (j’ai beau chercher je ne vois pas vote des citoyens) .

        Nous pourrions échanger ainsi des heures et des heures, un vernis démocratique ne tient jamais longtemps face à
        la réalité, ce n’est pas l’Europe qui nous a été promis et dont nous rêvons, cela devient une Organisation qui s’enferme dans un cercle d’initiés complètement coupé des européens, vous prenez d’horrible risque avec notre rêve quitte à ce qu’un jour le pire arrive.

        J’ai honte de commencer à croire ce qui est souligné de plus en plus que le fonctionnement de l’Europe ressemble de plus en plus au fonctionnement de l’ex-URSS qui se targuait aussi d’être démocratique, on connait la suite.

        • Ah non ce n’est pas formel. C’est justement le forçage des dispositions du Traité à travers le suffrage universel. Les chefs d’Etat qui étaient plus que réticents se sont fait imposer par le Parlement le vainqueur des élections européennes. Je vous renvoie à tout notre travail sur plus d’Europe à la télé: https://www.sauvonsleurope.eu/category/nos-actions/plusdeuropealatele/

          Les citoyens n’ont pas encore conscience que la Commission fonctionne désormais selon une logique démocratique et que donc ils ont un pouvoir de choix et de désignation, comme dans les démocraties nationales. Mais le verrou a bien sauté.

        • La France est la seule à élire son président par les citoyens, aucun premier ministre n’est directement élu. Il y a des élections législatives, puis la majorité sortie des urnes impose son candidat. c’est désormais pareil en Europe, la droite a présenté Juncker comme candidat, elle a gagné les élections européennes, elle l’a imposé à la tête de la Commission. Nous sommes d’accord, c’est la première fois et ça reste fragile, mais ça commence.

  5. Il est tout de même invraisemblable qu’on en arrive à considérer comme « démocratique » une consultation qui permet à 20% de la population d’une Etat membre qui ne représente lui-même que 3,3% de la population totale de l’Union, soit au final 0,6% de la population de l’Union, de bloquer la ratification d’un accord qui a demandé des années de négociation, et dont le rejet serait catastrophique pour la population ukrainienne. Les initiateurs du référendum ont-ils seulement pris en compte les conséquences pour les Ukrainiens du rejet de ce traité? Mais bien sûr que non: ils s’en foutent totalement. Leur seul but est d’emmerder le gouvernement néerlandais, et l’Europe. C’est la parfaite démonstration ,s’il en était besoin, du danger que font courir ces référendums à la démocratie, la vraie. pas celle qui fait dire tout et n’importe quoi à n’importe qui.

    • Ou est la démocratie dans cette Europe! Beaucoup de pays ont été admis au sein de l ’ Europe , sans consultation des peuples des pays d’origine. Cette Europe est devenue ingouvernable et impuissante dans de nombreux domaines. Rien n’avance si ce n’est le pouvoir de l’argent au détriment des peuples dits souverains . Alors ne vous étonnez pas que certains veuillent la détruire, apparemment démocratiquement puisqu’ils passent par un référendum, ce que vous contestez. Pour vous il faut passer en force contre l’avis des peuples. Qui êtes vous ?

  6. @palomby:disqus
    La démocratie n’est certainement pas dans ce genre de pseudo consultation où on demande à des citoyens de se prononcer sur une texte complexe, qui comporte quantité de clauses et de dispositions. Nous avons élu des députés européens pour ça, qui ont eux-mêmes validé la nomination de commissaires qui sont, je pense, un peu plus compétents pour se prononcer sur une traité international comme celui-là que les Mme Michu du coin, manipulées par des démagogues de tout poil qui n’ont qu’une idée en tête: démolir ce qui a été patiemment et difficilement mis au point, sans aucune considération pour les conséquences d’un tel vote. Ces gens devraient avoir honte.

  7. Je souscris entièrement à l’analyse lucide d’Arthur Colin ainsi qu’aux considérations développées par Claude Bardot. Comme je l’ai écrit il y a déjà quelque temps à la faveur de divers commentaires sur ce site:

    1) le referendum de 2005 sur le traité dit « constitutionnel » portait lui aussi sur un texte complexe qui, sauf hypocrisie à l’égard du citoyen, ne se prête pas à ce genre de consultation. Certes, la campagne du « non » a pu s’avérer plus dynamique que celle du « oui » dont les partisans ont sans doute péché par excès d’optimisme (je l’admets: ce fut mon cas)… d’où la réaction salutaire des initiateurs de « Sauvons l’Europe » pour qu’une démarche de type « radio Londres » contrebalance les outrances de type « radio Paris » promues par les démagogues du « non ». Il est vrai, aussi, qu’il est plus facile de démolir avec un bulldozer que de construire minutieusement avec une truelle et un fil à plomb.
    Mais il ne faut pas négliger non plus le fait qu’un sondage « Eurobaromètre » réalisé à la sortie des urnes montrait que la principale motivation des votants a été davantage un désaveu à l’égard du gouvernement français de l’époque qu’un non à l’Europe. D’une certaine manière, on retrouve là la logique du referendum de1958 sur la constitution française: une adhésion à la personne du général de Gaulle davantage qu’un « oui » à un texte.

    2) pour ce qui est des membres de la Commission, on peut discuter du caractère réellement démocratique du mode de leur désignation. Il n’empêche que, contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas nécessairement de froids technocrates: un coup d’oeil attentif aux profils respectifs de ceux actuellement en poste ( un cv détaillé figure sur le site « Europa ») montre que 21 commissaires sur 28 ont occupé des fonctions électives soit au Parlement européen, soit dans leurs parlements nationaux, soit à l’échelon régional ou local.

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