À l’issue des séquences électorales récentes, le Parti socialiste français et le Parti social-démocrate allemand sont désormais dans l’opposition pour plusieurs années.
Il ne s’agit pas ici de procéder à l’inventaire des causes de ces échecs électoraux, ni même de lancer la réflexion sur les propositions qui leur permettraient de revenir au pouvoir. Non, car nous pensons que cette double défaite peut devenir une opportunité pour l’élaboration d’un socialisme européen.
Bien sûr, on nous fera remarquer que le Parti socialiste européen – dont c’est l’objet – y travaille depuis plusieurs années. Et c’est bien grâce à l’implication d’une avant-garde militante que celui-ci est parvenu à adopter un programme commun pour les deux dernières élections européennes et à désigner un candidat à la présidence de la Commission européenne au dernier scrutin.
Si la démocratisation de la vie politique européenne progresse dans la sphère bruxello-strasbourgeoise, il est en revanche malheureux de constater que cela ne soulève pas grand intérêt de la part des médias, ni même de la base militante.
Or, nous savons que seule une Europe souveraine permettra de résoudre les principaux défis du siècle qui s’ouvre. Si la social-démocratie s’est construite au XXe siècle dans un cadre national, la contre-attaque du capitalisme l’a mise KO : à la mondialisation de l’économie, les progressistes n’ont su répondre que par un social libéralisme ou un retour aux vieilles recettes du passé.
Alors que le compromis classique en Europe d’une économie qui soutient un système de solidarité est de plus en plus difficile à tenir face à la montée en puissance des pays gouvernés par une droite nationaliste, populiste et réactionnaire, la social-démocratie a le devoir de se montrer à nouveau au rendez-vous de l’Histoire. Inspirons-nous de Léon Blum qui avait – déjà ! – compris que la social-démocratie ne serait ni viable ni stable sans s’insérer dans un cadre européen et mondial.
Disons immédiatement qu’il faudra remettre à l’endroit l’organisation des partis sociaux-démocrates : à terme, il doit exister un parti européen dont le niveau national sera un échelon intermédiaire. La pratique actuelle, consistant à rassembler dans des congrès européens deux responsables statutaires, quelques convaincus, des députés européens et une cargaison de délégués, choisis par leurs partis au hasard de leurs équilibres internes, ne peut se traduire que par une indifférence des militants.
Vaste programme, surtout si l’on considère les dérives populistes de certains partis socialistes en Europe…
Si cela est un objectif de moyen terme ambitieux, nous pourrions proposer rapidement une étape fortement symbolique : la création d’un Parti social-démocrate franco-allemand. Une des conséquences essentielles de cette organisation serait de reproduire dans le fonctionnement de ce parti la division des tâches qui s’est fait jour au sein de l’Union européenne même. Le principe de subsidiarité permet que chaque niveau jouisse de l’indépendance de fonctionnement pour les choix les mieux adaptés aux réalités politiques et sociales locales. Mais les sujets qui appartiennent à la compétence européenne pourraient enfin être traités directement de façon commune, sans plus céder à un provincialisme commode. Un tel projet permettrait enfin de penser la politique au bon niveau.
Que l’Europe permette de sauver la social-démocratie, voilà une idée révolutionnaire !
Article initialement publié dans Ouest-France du 22 novembre 2017
A propos de « Oui à un parti social-démocrate franco-allemand », je partage tout-à-fait l’analyse et l’objectif d’Alain Chevalier. L’Europe sera socialiste ou ne sera pas, et le socialisme sera européen ou il ne sera pas ! Cependant, natif du Congo-Kinshasa, et venant d’y séjourner six semaines, parmi les Congolais dans la Cité, j’ai eu la confirmation d’une vieille intuition : le socialisme du troisième millénaire sera « afriqueuropéen ». Berceau de l’humanité, l’Afrique reste le terreau au sein duquel germera le socialisme nouveau, un socialisme vital, ancré dans les coeurs, chaud, joyeux et même tellurique. Vincent Triest, membre du PS wallon et bruxellois
« L’Europe sera socialiste ou ne sera pas …». Beau, ainsi déclamé, et la formule peut valablement servir à d’autres.L’Europe sera libérale ou ne sera pas, sera sportive ou ne sera pas, à multiplier à l’infini ou à mijoter dans toutes les sauces de la tambouille de la politique politicienne et des doctrines et théories de circonstance. Or, le problème aujourd’hui n’est plus d’être ou de ne pas être, mais de pouvoir – ou devoir – signifier quelque chose, un contenu, quelque chose de perceptible par le citoyen préoccupé d’assurer sa vie ou même sa survie. Faire l’Europe n’est pas un simple montage, un puzzle plus ou moins bien ajusté, de pays, de partis etc. Toute construction mérite des fondations solides … aux normes antisismiques. Et les bâtir en se préoccupant de l’essentiel.
Le citoyen ne rêve pas d’Europe comme d’une construction abstraite, un jeu de construction intellectuelle. Elle n’est pas pour lui une fin en soi. L’Europe est un outil pas l’Eden à atteindre. Elle est un moyen précieux et sans doute capable d’efficacité synergique de garantir son avenir et celui de ses enfants, d’assurer son bien-être. Là est l’essentiel. Pas les édifices institutionnels. Étatiques ou partisans.
Bonjour à toutes et tous….
Beaucoup d’européens se sentent citoyens de leur pays et de l’Europe……et penser à des grands partis européens parait très utile.
Quant à la Social-Démocratie, il me semble qu’elle a eu le Continent européen comme preuve d’une certaine réussite : création de richesses, partage de la richesse, avec 25% de la richesse attribués à l’impôt, pour les dépenses régaliennes et 25% au budget social ,pour l’accès aux soins, et l’épargne collective pour financer les retraites, le chômage etc…etc…Ce système est devenu paresseux au fil du temps et soumis à des attaques permanentes et n’a pas su réagir et être offensif….mais je suis convaincu que l’idée d’une Europe dynamique, protectrice, écologique, revendiquée par des grands partis sociaux démocrates européens devrait susciter l’adhésion de ceux qui ne veulent pas de la brutalité du libéralisme sans contrôle ou des discours totalement démagogiques des extrêmes « gauches » ou « droites ». Mais il y faut des responsables fiers de leurs choix et dotés d’un peu de charisme de de sens pédagogique…. Cordialement à toutes et tous. Marc Domec
Je me sens assez proche de l’analyse de Marc Domec. Rappelons que le point de départ de notre échange était une fusion du SPD allemand (Plus de 450 000adhérents) avec un parti socialiste en France…dont on voit mal en ce moment les idées qui en sortent! Une telle fusion aurait donc un aspect « paté de bœuf et d’alouette » qui le rend difficile
Mais tout ça est très différent de la Fondation Jean Jaurès qui demeure une instance très active. D’où l’idée de faire étudier cette fusion simultanément par la fondation JJ et la Fondation Frierich Ebert du SPD.
Bonne idée……..qu’il faut faire connaître aux citoyens européens afin d’être prêts pour les élections européennes de 2019. Bon courage et amitiés à toutes et tous ! Marc Domec
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Le réalisme est toujours le résultat d’une dualité ! Ce principe est universel. Quelle dualité réaliste y-a-t-il dans « social-démocratie » ? La clé est dans le sens profond de la dualité « sociale-libérale ».
Au premier abord on serait fondé de penser qu’il s’agit d’un oxymoron. En fait ce terme répond à une saine dualité. La liberté d’entreprendre tout en étant humaniste. C’est un combat, une saine symétrie duale comme « devoir et droit ».
Le réalisme est de considérer la planète telle qu’elle est, dans sa globalité. Force est de constater qu’elle est typiquement boiteuse car moniste car seulement libérale sans humanisme aucun. L’Europe doit fonctionner dans ce monde par les outils libéraux internationaux tout en montrant l’exemple avec sa saine dualité.
N’oublions pas que le mot libéral a en français plusieurs sens: il peut être synonyme de libre-échangiste, il peut se référer à une politique socio-économique (en gros le contraire de dirigiste), il peut avoir le sens du même mot américain qui est à peu près un humaniste attaché aux libertés individuelles. Si on discute d’une possible social démocratie franco-allemande, on n’est pas sorti de l’auberge si on commence par la sémantique…
C’est bien plus qu’une simple sémantique ! la dualité est le plus puissant principe de la physique de cet univers dont nous sortons tous. Peut-on aller contre ce principe fondamental qui nous a construit ?
C’est une idée à creuser. Qu’en pensent la Fondation Jean-Jaurès et la Fondation Friedrich Ebert du SPD? Cette dernière a un bureau à Paris et ces fondations participent souvent à des manifestations en commun
Dans la structure à créer, où le découpage en nations sera encore visible, créer, ou laisser une possibilité d’adhésion anationale, directement au niveau européen.
L’Europe ne saurait être la bouée des socialistes en débâcle.
Pensez-vous que l’Europe vaille si peu par et pour elle même?
L’avenir de la social démocratie m’indiffère, son idéologie est mortifère pur l’Europe.
Faites l’Europe, pas les idéologues à rendement personnel!
Personnellement, j’espère beaucoup plus un rapprochement entre Angela Merkel et Martin Schulz. Les idées de Martin Schulz sur l’Europe sont, sur bien des sujets, très proches de celles d’Emmanuel Macron. Martin Schulz pourrait être un trait d’union efficace entre la France et l’Allemagne, s’il parvenait à trouver sa place et à s’affirmer à côté d’une Angela Merkel maintenant affaiblie.
Laissons le PS guérir tranquillement et trouver sa place à la gauche de Macron, quand Jean-Luc Mélenchon aura terminé son show.
Voila un beau débat mais le PS est encore trop dans la culture « dépenses publiques = gauche » , « made in France « , « socialisme dans un seul pays » , « pas de perte de souveraineté » …pour que ce soit pour demain !!