L’élection du Parlement européen repose tous les cinq ans la question de l’attachement de ses citoyen·ne·s à l’Union européenne (UE). Les arguments de ceux qui veulent convaincre les électeurs de ce qu’elle contribue à leur prospérité restent peu audibles. D’une part, l’élection ne porte guère que sur des enjeux nationaux. D’autre part, les citoyens constatent la faiblesse et les carences démocratiques des institutions européennes. Les peuples de l’Europe ne veulent plus s’entredéchirer, mais ils sont tentés de se recroqueviller sur leurs États nations, alors qu’ils ne savent manifestement plus garantir seuls la prospérité et la sécurité de leurs citoyens. Les débats en cours en France n’évoquent pas un seul instant la dimension européenne des décisions à venir. Les peuples de l’Europe devraient admettre leur communauté de destin.
Un cheminement entravé
Établies depuis 1951 par des traités internationaux, les institutions de l’UE ne reflètent pas l’espoir des mouvements de Résistance de plusieurs pays européens, secrètement réunis à Genève en 1944, d’une Europe démocratique unie dans sa diversité par des institutions fédérales. La vision de 1944 a été contrecarrée dès 1946 par les États nationaux renaissants. « L’Europe des nations » avait été expérimentée pendant des siècles, dans toutes ses dimensions et ses détails. Mais pas plus qu’aujourd’hui, les leçons n’en avaient été entendues. Le nationalisme n’a pas été universellement condamné. Le Congrès de l’Europe de La Haye en mai 1948 fut le théâtre de déclarations contradictoires et de malentendus. Il n’en résulta qu’une institution intergouvernementale (le Conseil de l’Europe) et un Mouvement européen, pétris tous deux de bons sentiments.
Trois quarts de siècle après son coup d’envoi le 9 mai 1950, par le discours de Schuman annonçant la Fédération européenne, le processus d’union des peuples européens reste inachevé, instable et fragile, car il a voulu la créer par un traité, ce qui est impossible. Les Américains l’ont montré en 1787, seule une Constitution fédérale peut créer une Fédération. Ce que Schuman a obtenu, en 1951, c’est la Communauté européenne du charbon et de l’acier. M. Pleven a tenté de greffer sur elle une Communauté européenne de défense et M. Spaak a tenté de compléter le projet par une Communauté politique, mais ces deux ajouts ont été abandonnés en 1954. Cela conduisit en 1957 à une Communauté économique européenne d’inspiration ordolibérale (l’Ordnungphilosophie allemande), ainsi que le rappelle Aliénor Ballangé (dans « La démocratie communautaire »), détournant durablement le projet de ses objectifs politiques.
L’UE est l’héritière de cette Europe réduite à l’Union économique et monétaire, dont la gestion mi-supranationale et mi-intergouvernementale ne peut être que défaillante, particulièrement pour gérer les multiples crises auxquelles toute collectivité est nécessairement confrontée. Cela doit changer. Se résigner à l’abandon du projet de Fédération européenne serait irresponsable compte tenu du déclassement de l’Europe depuis un quart de siècle au moins, et des multiples menaces qui pèsent sur les Européens, qu’elles soient géopolitiques, économiques, culturelles, sanitaires, environnementales ou migratoires.
Contrat social et affectio societatis
Au cœur du fonctionnement institutionnel de l’UE, il manque un contrat social, générateur d’affectio societatis. Ces deux concepts relèvent l’un de la philosophie politique, l’autre du droit des sociétés (article 1832 du Code civil) mais peuvent être rapprochés. Dans « Du contrat social ou Principes du droit politique » Jean-Jacques Rousseau affirme que la notion de souveraineté du peuple s’appuie sur les notions de liberté, d’égalité, et de volonté générale.
Afin d’organiser l’état de droit, tout groupe humain a besoin de règles codifiées qui, pour être acceptées par tous, doivent être élaborées démocratiquement. On ne triche pas avec la démocratie : elle ne peut être tronquée ou seulement partielle, elle est ou elle n’est pas. Pour les aimer, les Européens doivent se reconnaître dans leurs institutions. Ils doivent en comprendre les raisons d’être. Leurs règles de leur fonctionnement doivent être limpides et leurs noms doivent correspondre à des concepts familiers. Ce n’est pas le cas au sein des institutions de l’UE. Combien, par exemple, de « Conseils » en tout genre dénombre-t-on aujourd’hui ?
Constitution démocratique vs ballets diplomatiques
Montesquieu a décrit les principes d’un fonctionnement démocratique. Après avoir inspiré la Constitution américaine de 1787, suisse de 1848, allemande de 1949, et dans une mesure variable celles des 86 autres États fédéraux qui existent aujourd’hui, ils doivent inspirer une vraie Constitution européenne qui remplacera les bricolages instaurés dans des traités entre gouvernements nationaux et respectera la souveraineté du peuple. Ce n’est pas un énième traité entre gouvernements nationaux jaloux de prérogatives objectivement dépassées par les événements qui pourra contribuer à nous préserver des menaces évoquées plus haut. Cette constitution, le Parlement européen autoproclamé Assemblée constituante devrait nous la donner et les citoyens devraient se l’approprier. Un fonctionnement démocratique, fondé sur les trois pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire définis par Montesquieu, se substituera aux actuelles relations diplomatiques entre États membres de l’UE. Il deviendra possible qu’un gouvernement fédéral européen établisse enfin une vraie défense européenne, car il sera légitime, étant démocratique.
Selon le dictionnaire juridique de Serge Braudo, c’est l »affectio societatis » qui motive la formation du lien qui unit les personnes et non l’inverse.
Ceci met en lumière l’illégitimité du traité de Lisbonne: on a présenté le projet de Constitution Valéry Giscard d’Estaing aux Français et on leur a dit « Signez là, nous savons ce qui est bon pour vous ». La suite explique en partie la défiance des Européens à l’égard l’UE.
La démocratie ne peut se réduire à un vote tous les 5 ans. Le recours aux partis transforme le suffrage universel en une sorte de suffrage censitaire à rebours: les partis adoptent une idéologie capable de séduire un certain nombre de notables qui délient leurs bourses pour les propulser sur le devant de la scène. Arrivés là, tout devient une question d’image: omniprésence dans les médias, diffusion des programmes électoraux truffés de promesses non tenues – avec toujours en filigrane, le message au peuple « faites nous confiance, nous savons ce qui est bon pour vous ».
La démocratie s’épanouira avec ses règles acceptées par tous, comme cela a été le cas dans les communs, le jour où les élites auto-proclamées qui nous dirigent, surmonteront leur démophobie pour permettre au peuple d’accéder à une éducation véritablement émancipatrice, comme l’explique Jacques Rancière dans son ouvrage « La haine de la démocratie ». On peut aussi citer l’œuvre de Francisco Ferrer et l’engagement des CÉMÉA-pays de la Loire (Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Education Active)- que les ministres de l’éducation successifs s’efforcent d’enterrer.
Il n’y aura aucun progrès tant qu’on laissera les C8 et Cnews de ce monde, le soin d’éduquer le peuple. C’est à ce dernier qu’il revient d’édifier les institutions dans lesquelles il concentre le pouvoir, ceux qui l’exercent doivent lui rendre des comptes; il doit se réserver les moyens de révoquer ceux qui en abusent.
Si Montesquieu avait connu les moyens de communication dont on dispose aujourd’hui, il aurait peut-être vu la démocratie directe d’un autre œil.
Il est intéressant d’observer à quel point, avec le temps, le souvenir du déroulement précis précis d’un processus politique majeur peut s’estomper. En soulignant cela, je me réfère à votre propos concernant l’élaboration du projet de traité dit « constitutionnel ». Il y a en effet vingt ans cette année que cette initiative a connu une amorce de concrétisation .
On peut légitimement en critiquer les objectifs et le contenu. Mais affirmer que Valéry Giscard d’Estaing a manœuvré pour obtenir un blanc-seing du peuple français sur ce projet relève d’une approche bien réductrice, à la limite de la caricature.
Quel fut concrètement le rôle de l’ancien président de la République – du reste épaulé par deux vice-présidents particulièrement dynamiques? Il a été désigné par un Conseil européen pour chapeauter les travaux d’une « Convention » de 105 membres représentant les gouvernements des 15 États membres de l’UE de l’époque ainsi que des pays candidats à l’adhésion, les parlements nationaux (2 représentants chacun), le Parlement européen (16 députés) et la Commission européenne (2 membres). Mais on ne doit pas négliger le fait que, si cette enceinte a élaboré des recommandations en vue de la rédaction d’un texte appelé à « toiletter » les traités antérieurs et à prendre en compte les perspectives d’un grand élargissement en direction, notamment, des pays d’Europe centrale et orientale, ce travail préparatoire a été précédé par un double processus de dialogue: une « phase d’écoute » à l’intention des citoyens, puis une « phase d’examen » des idées ainsi recueillies « à la base ».
Comment expliquez-vous le résultat du référendum ? « une « phase d’écoute » à l’intention des citoyens, puis une « phase d’examen » des idées ainsi recueillies « à la base » » , tout comme Macron, en somme.
Voir plus bas ma réponse en deux temps. Cordialement.
En tant que citoyen belge, je n’ai pas eu droit au chapitre, le traité fut voté, sans grand débat, par les différents parlements fédéraux, la discussion se résumant à la caricature « pour ou contre l’Europe » (loin des débats acharnés qui ont présidé à l’adoption du Ceta par le parlement wallon). Pour ma part, je me souviens d’avoir participé sur le sujet à de nombreux groupes de travail de la société civile, d’où il ressortait que le projet de traité constitutionnel présentait une forte régression par rapport à la DUDH ainsi qu’ à la Convention européenne des droits de l’Homme, notamment concernant les droits culturels, économiques et sociaux. De plus, d’après mes souvenirs, le texte proposé érigeait le marché (capitaliste) en principe constitutionnel. Il y avait également d’autres points négatifs, mais ma mémoire flanche un peu.
Je vous rejoins sur un point: mon ignorance de l’histoire de l’UE de la première décennie de ce siècle. À cette époque, j’émigrais hors de l’Europe avec ma famille et j’avais d’autres chats à fouetter.
Ce que je retiens de l’histoire, c’est que l’UE a été créée sur fond de « plus jamais ça » suite aux 2 conflits mondiaux qui ont ravagé ce continent. Et aussi, que ces deux guerres ont été provoquées par l’extrême droite.
Or voici que l’extrême droite triomphe à nouveau en Europe.
Plutôt que de chercher l’erreur et à qui la faute – le temps presse – je vous suggère de considérer les ouvrages cités ci-dessus et aussi ceux d’Olivier Hamant « De l’incohérence – Philosophie politique de la robustesse » et de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle « L’entraide, l’autre loi de la jungle ». Leurs auteurs, scientifiques reconnus, y proposent des solutions non traumatisantes, assez faciles à mettre en œuvre, et ce dans des délais raisonnables.
Le capitalisme permet une croissance exponentielle. Dans le monde vivant, la croissance exponentielle est synomyme de mort rapide: septicémie, cancer, pandémie, espèces invasives, eutrophisation, la mare des nénuphars… La vie est apparue il y a environ 4 milliards d’années et est devenue experte en résilience et devrait être notre source d’inspiration.
Bonjour.
Enfin un article dans « Sauvons l’Europe » qui démontre l’absurdité du fonctionnement actuel de l’Europe, qui pointe du doigt la nécessité de finaliser la construction Européenne avec tous les attributs d’une grande nation.
Nous devons nous sentir d’abord européen puis après Français, Allemands, Bulgares, etc, etc ……
C’est avec l’outil de la nation européenne que de grands progrès pourront être réalisées dans presque tous les domaines, nos gouvernants actuels ne veulent pas voir cette réalité, c’est à nous à leur ouvrir les yeux, c’est à des structures comme « Sauvons l’Europe » et autre à ne parler que de cela pour influencer et espérer aboutir à ce résultat.
Trop d’articles et de discussions stériles entre nous sur divers thèmes qui ont souvent donnés l’impression de mettre « la charrue devant les bœufs », de ne pas se donner les moyens pour mener le seul et vrai combat, celui de LA NATION EUROPEENNE.
Seuls nous ne sommes rien, surtout dans le monde actuel, unis nous serons enfin crédible.
On ne s’est pas vraiment intéressé à ce que pensent les Européens de l’ordolibéralisme qui guide toutes les actions de l’UE.
Au vue de l’instabilité climatique qui s’installe et menace toute forme de vie, il serait peut-être temps d’envisager d’autres voies, comme le suggère Olivier Hamant dans ses ouvrages « De l’incohérence – Philosophie politique de la robustesse » et « La troisième voie du vivant », et « L’entraide, l’autre loi de la jungle » de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.
Un article qui fait du bien par sa lucidité et qui tranche avec l’européanisme béat qui caractérise trop souvent les articles publiés sous la responsabilité de SLE.
(réponse à la question complémentaire de François Diebolt)
A vrai dire, je m’attendais à la question supplémentaire, tout à fait légitime, que vous posez. A diverses reprises, j’ai eu l’occasion d’y répondre épisodiquement par des commentaires successifs, en m’efforçant de fournir une explication prenant en compte une problématique qu’on ne saurait réduire à un contraste simplificateur blanc/noir : comme en d’autres domaines, des nuances de gris interfèrent.
Pour faciliter le dialogue et afin de ne pas infliger au lecteur un « bloc » d’arguments à la limite de la lisibilité, permettez-moi donc de procéder en deux séquences, en fonction de l’angle sous lequel on peut se placer.
Commençons donc par un premier élément.
Il ne s’agit nullement de contester le résultat du vote qui, je me permets de le rappeler incidemment, est en particulier à l’origine de la création de « Sauvons l’Europe », dans une optique de préservation du « bébé européen » au cours de l’évacuation un peu brutale de l’eau du bain.
Cela étant précisé, on ne peut exclure que, comme pour le bien connu avertissement ferroviaire, un train peut en cacher un autre. Si la pratique référendaire a incontestablement des vertus d’expression d’une certaine volonté, elle peut aussi tendre une perche opportune pour en détourner l’objectif premier sans établir un lien direct avec la question posée… la cible étant plutôt l’auteur de la question.
Ainsi, même si j’étais bien jeune à l’époque, je garde un souvenir précis des discussions qui émaillaient les rencontres familiales lors de l’adoption de la constitution de 1958 : les positionnements se situaient de manière prédominante par rapport au général de Gaulle et non à un texte quelque peu sibyllin pour les personnes issues de milieux modestes qui participaient à ces rencontres.
Dans un contexte voisin, en 2005, l’occasion était peut-être trop belle pour manifester sa mauvaise humeur, voire sa défiance, envers le gouvernement en place. N’oublions pas, du reste, qu’à l’automne de cette année-là éclateront des émeutes à la suite de l’électrocution de deux jeunes de banlieue : si ce drame a allumé la mèche de la contestation – et pas seulement chez les adolescents, même si ces derniers se sont trouvés en première ligne – l’explosif était déjà en stock au printemps 2005.
Evitons donc de porter un regard latéralement limité par des œillères.
Ce qui revient à dire que le peuple est incapable de prendre les bonnes décisions = démophobie.
Il y avait probablement mauvaise humeur, je l’attribuerais plutôt aux années d’austérité dictées par la convergence vers l’euro.
(réponse à la question complémentaire de François Diebolt – suite)
En deuxième lieu, je pense utile de reprendre sous un autre angle la délicate question de la pertinence de l’usage du referendum – et ce en fonction de l’objet de la consultation. Il me paraît en effet quelque peu superficiel de se réfugier parfois dans l’alibi commode de la « vox populi » pour justifier le recours à cette forme de consultation.
A cet égard, pour s’en tenir au cas de la France, un éclairage utile peut être recherché dans l’article 3 de la constitution de la Vème République, qui affirme que « la souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exerce par ses représentants et par la voie du referendum ».
Les deux modes d’expression sont mis sur le même plan… et il me paraît pour le moins dédaigneux de négliger ou de minimiser la capacité de discernement qui est supposée être celle des « représentants ». Sur ce terrain, au demeurant, il convient de ne pas ignorer que, depuis 1958, ce concept a pu évoluer. Ainsi, de mon point de vue, les députés français élus au Parlement européen ont pleinement vocation à se prévaloir de cette responsabilité de représentation : participer, à l’instar de leurs homologues de l’Assemblée nationale et du Sénat, à la ratification, à ce niveau, d’un traité complétant la construction européenne s’inscrit donc dans un processus tout à fait légitime dans le champ de la démocratie.
Mais, plus encore, doit-on accorder la même onction à tous les referendums, quel qu’en soit l’objet ? Là aussi, la question me paraît appeler une réponse nuancée. Autant la limpidité du choix découle de la simplicité de la consultation – par exemple, en 1962, le sujet de l’indépendance de l’Algérie ou celui de l’élection du président de la République au suffrage universel direct – autant « balancer » dans la boîte à lettres d’un électeur potentiel un texte complexe de plusieurs centaines d’articles peut constituer un prétexte facile permettant au gouvernement concerné de plaider bien hypocritement le jeu de la quête d’une « bénédiction » populaire. Certes, en 2005, des débats en amont du vote ont pu contribuer à éclairer les enjeux. Mais un élément à ne pas négliger relèverait du « sens commun » (faute, pour moi, de recourir à une terminologie plus appropriée) : à savoir qu’il est tellement plus aisé et expéditif de démolir une construction avec un bulldozer que de l’édifier patiemment, brique par brique. Une autre façon d’exprimer cela serait de reprendre la remarque formulée par Jonathan Bouchet-Petersen dans un récent article publié par « Libération » à propos de la complexité de la situation politique actuelle : « il est plus facile de faire bloc contre que de faire corps pour ».
C’est, du reste, dans ce contexte qu’il convient de situer l’épisode du bouc émissaire qu’a représenté le fameux « plombier polonais », chargé de tous les péchés de l’Union européenne : un épineux qui cachait la forêt des promesses plus verdoyantes en germe dans le projet « constitutionnel ». Fort heureusement, le traité de Lisbonne, finalisé en 2007 et approuvé par les élus du peuple français, a permis de faire justice d’un tel fantasme.
Pour clore ces explications, permettez-moi d’ajouter que, comme je l’ai constaté à maintes reprises au fil des commentaires nourrissant les débats sur le présent site, ce sont souvent – à l’instar de la météo – des vécus spécifiques qui expliquent nos différences de « ressenti » à l’égard de l’UE… dont, par ailleurs, je ne méconnais pas un certain nombre de défauts (législation parfois excessive en quantité ou trop tatillonne en prescriptions, faiblesse du volet social en raison des « chasses gardées » des Etats membres, charrue mise avant les bœufs en termes d’élargissement – pour ne citer que quelques exemples). Mais l’essentiel, précisément – à défaut de convaincre à tout prix – ne demeure-t-il pas que nous nous éclairions en connaissance de cause avec nos acquis respectifs ?
Bonjour Monsieur VERNIER.
Le plombier Polonais est l’exemple type d’une intégration sans en analyser les conséquences, cet exemple s’est malheureusement maintes fois renouvelé ?
Beaucoup de nos politiques une fois élu sont contaminer par la bactérie « hors-sol », c’est de plus contagieux, une réforme du statut de l’élu permettrait d’en limiter les effets.
Aujourd’hui, regardons devant nous, l’Europe s’est constitué pour éviter la guerre, sa non finalisation avec l’ intégration mal venue de certains états fait ressurgir ce spectre, alors battons nous pour imposer ce but essentiel et ultime.
Rappelez vous, la construction européenne s’est faîte au départ avec quelques pays, prenons le même chemin pour sa finalisation, les autres suivront, faisons une Europe en tant que puissance mondiale, sociale écologique, limitant les excès d’un libéralisme destructeur.
Si je comprends bien, le recours au référendum tel que prévu dans la constitution de la Vème République, est à éviter pour plusieurs raisons:
1) ça reviendrait à négliger ou minimiser le discernement des représentants élus par le peuple
2) le peuple ne serait pas assez objectif pour faire une part juste entre l’initiateur du référendum (et son éventuel « passif » ou sa popularité) et l’objet de la consultation
3) les questions qui se posent ne peuvent que trop rarement être formulées en une phrase de 5 mots, ce qui les rend incompréhensibles pour le commun des mortels et ouvre la porte à des abus.
Conclusion: la tendance qui se dessine est de négliger ou minimiser le discernement du peuple au profit de celui des représentants même si ces derniers sont trop souvent élus pour leur image – et non pour leur discernement.
Je ne vous ferais pas l’injure de vous rappeler que certains pays démocratiques (la Suisse) n’hésitent pas à donner à leurs citoyens bien plus d’occasions de s’exprimer et de s’impliquer dans les décisions politiques.
Il est vrai que l’UE a instauré l’initiative citoyenne européenne et j’avoue que je n’en ai pas encore fait usage ni exploré les limites.
Et vous avez raison, la démocratie se bâtit brique par brique, mais elle restera fragile si cela se fait en dépit du peuple.
Ce qui est vrai pour les élus, l’est aussi pour le peuple: plus il s’impliquera dans les prises des décisions qui le concerne, plus il développera ses compétences pour ce faire, c’est l’histoire de l’œuf et de la poule – je crois que j’ai déjà cité les travaux de Jacques Rancière.
(nouveau complément de réponse à François Diebolt)
Désolé de reprendre le dialogue avec un important décalage, mais les impératifs de l’entretien estival d’un jardin ont eu leur part dans l’ordre de mes priorités.
De surcroît, j’ai quelque peu hésité à répondre sur un aspect plus ou moins intime, dans la mesure où il y a toujours une part d’impudeur à mettre sur la table son « équation personnelle », pour rependre une célèbre expression utilisée par « le Général ». C’est donc dans le souci de rectifier le procès d’intention en « démophobie » (en fait, dans cette qualification, vous omettez deux lettres : « démagophobie » serait un terme à mes yeux plus approprié) que je souhaite attirer votre attention sur les éléments suivants :
– comme vous, je déplore le poids pris par un certain « ordo-libéralisme ». Mais, puisque notre échange a pour fil conducteur l’attitude des peuples, je ne puis méconnaître que les dirigeants qui promeuvent un tel courant sont issus, directement ou indirectement … du suffrage universel. Dans ce cas aussi, puisque vous y faites par ailleurs allusion à juste titre, on est en droit de constater que la problématique de l’œuf et de la poule peut être invoquée à propos des thématiques les plus diverses
– mon enfance et mon adolescence ont baigné dans un cercle, aussi bien familial que rapproché, d’ouvriers immigrés d’Europe centrale… un environnement peu propice à la distanciation vis-à-vis des plus modestes, au demeurant parfois en butte au mépris de quelques « bons Français » par ailleurs peu mécontents de leur laisser les « sales boulots »
– avez-vous vous-même vécu plusieurs années dans une cité HLM de la banlieue parisienne ? moi oui… et cette expérience m’a permis de côtoyer, là aussi, une population d’une grande humilité, mais dont le bon sens s’est avéré singulièrement formateur pour le plus grand bénéfice d’un étudiant qui s’épanouissait à la Fac de droit mais ne partageait pas l’ambiance de « caste » de Sciences-Po (merci encore à mes parents, qui se sont sacrifiés pour me permettre de suivre un tel parcours universitaire !)
– professionnellement, mes activités m’ont conduit à consacrer une grande partie de ma carrière à la coopération avec les pays en développement : j’y ai appris énormément au contact de mes interlocuteurs locaux … cela, je le souligne sans esprit de condescendance, loin de là !
– aujourd’hui encore, un intérêt récent pour le monde rural m’a ouvert de nombreux horizons, au contact, non de puissants céréaliers, mais de petits agriculteurs dont je perçois mieux les attentes, mais aussi les critiques, vis-à-vis de « Bruxelles ».
Tout cela a donc contribué à forger une certaine familiarité en regard de ce qu’avec beaucoup de respect, voire d’empathie, je crois constituer une grande partie de l’essence du « peuple ».
Mais c’est aussi la raison pour laquelle – j’y reviens – je m’interroge sur le « foutage de gueule » (désolé pour l’expression) que constitue l’alibi des referendums lorsque ces derniers portent sur des textes dont la complexité interpelle même parfois d’éminents juristes.
Ainsi, lorsque je plaide en faveur de la sagesse de ne soumettre à consult ation populaire que des questions simples, ce n’est nullement au nom d’un supposé procès en manque de discernement des votants potentiels. En relisant votre commentaire, je constate d’ailleurs que mon propos a pu prêter à confusion : la mention du terme « question » ne vise pas le libellé du questionnement, mais l’objet de ce dernier – par exemple l’opportunité d’élire le Président de la République au suffrage universel.
Bref, pour en revenir au scenario de 2005, je persiste dans le sentiment que ceux qui ont décidé de recourir au referendum ont joué les Ponce Pilate en se lavant hypocritement les mains avec cette forme démagogie. Du reste, puisque j’ai mentionné un personnage du Nouveau Testament, j’avoue qu’il m’arrive de penser que ledit scenario pourrait avoir quelque chose de l’épisode où l’autorité représentative de l’occupant apparaît : poussé par les pharisiens et les autorités religieuses, le peuple (ou, en tout cas, une certaine partie) réclame la mise à mort du Christ, ce qui est finalement concédé … mais, selon les évangiles, n’empêche pas la résurrection. En ce sens, le traité de Lisbonne de 2007 constituera, à sa façon, une manifestation de résurrection. Aïe ! je sens que tant les grenouilles de bénitier que les bouffeurs de curés m’attendent au tournant pour ce genre de digression mystique…
autre nouveau complément de réponse à François Diebolt)
Dans un commentaire, vous évoquez le modèle de la Suisse au sujet de la pratique référendaire. C’est effectivement une référence intéressante… mais qui, me semble-t-il, mérite d’être assortie d’une double nuance :
– d’une part, ce pays compte un peu moins de 10 millions d’habitants (dont un quart d’étrangers) , alors que la France en englobe sept fois plus (dont plus ou moins 8 millions d’immigrés). Il semblerait donc qu’en plus d’une solide tradition démocratique nos voisins disposent d’une échelle de grandeur plus « maniable » sur le plan pratique. Il apparaîtrait en outre qu’en général le taux de participation aux consultations s’avère plutôt faible
– d’autre part, les modalités du referendum en Suisse ne sont pas uniformes. Si une révision constitutionnelle ne peut être proposée que par les autorités fédérales et requiert une double majorité (population et cantons), deux autres modalités coexistent : un referendum consultatif déclenché par la collecte de 50 000 signatures (dans le cas, par exemple, d’une opposition à l’entrée en vigueur d’une loi fédérale) et ne nécessite que l’obtention d’une majorité simple des votants ; un referendum d’initiative populaire, qui exige de recueillir 100 000 signatures et dont le succès est tributaire, lui aussi, de la double majorité (population et cantons).
Bref, si l’expérience de la Suisse peut paraître éclairante, un humoriste dirait peut-être qu’il n’est pas impératif de prendre l’Helvétie pour une lanterne…
Comme vous le mentionnez, le traité de Lisbonne a introduit lui aussi une nouvelle pratique d’inspiration voisine à l’échelle de l’UE: l’initiative citoyenne européenne – une modalité destinée à permettre aux citoyens d’inviter la Commission européenne à présenter une proposition instaurant une nouvelle législation dans un domaine donné.
Certes, le système est encadré par des conditions assez strictes (un million de signatures réparties sur au moins sept Etats membres de l’Union) – et la Commission, censée disposer du monopole de l’initiative législative est libre de ne pas donner suite à la demande. Cela dit, selon une estimation datant du début de 2024, un peu plus d’une centaine d’initiatives ont été enregistrées depuis 2012, première année de la mise en œuvre du dispositif – et environ 80 % d’entre elles ont été jugées recevables. Parmi celles-ci, un nombre appréciable a porté sur des questions écologiques, ce qui tendrait à souligner l’importance que les citoyens attachent à ces dernières. Nous voilà revenus, au moins sur ce terrain, à la vox populi…
» En attendant le plombier … » 29. 08.24 Ben voyons, c’est parfait : l’ Ukraine, berceau de la Russie,
est déjà entrée en UE !! BRAVO !! ET heureusement qu’ il n’ y a QUE LE MODèLE RUSSE pour la
CORRUPTION, l’ AUTORITARISME, la VIOLENCE !!!!!
Bravo, Monsieur Hordung : la mer noire est ukrainienne et l’ Europe eurasienne.