Après une douloureuse gestation, la réforme de l’assurance chômage entre donc finalement en vigueur. Elle diminue les indemnisations les plus importantes, mais surtout elle fait passer de quatre à six mois la durée minimale d’emploi pour bénéficier d’une recharge de ses droits. Il s’agit, nous dit-on, de lutter contre les abus et particulièrement dans les secteurs qui ont fait du chômage un dispositif de gestion.
Dans le même temps un bonus-malus s’applique aux entreprises, ou plutôt ne s’applique pas. En effet, le dispositif ne concerne que certains secteurs économiques peu nombreux, ne vise que les entreprises qui ont un taux de rotation du personnel supérieur à 150 %, ne s’appliquerait d’ailleurs qu’à partir de septembre 2022 et ne s’appliquera que plus tard encore pour toutes les branches qui ont souffert du confinement.
Devant le Conseil d’État qui s’étonnait en juin de cette disparité de traitement entre les travailleurs et les entreprises, le représentant de l’administration répondait candidement que le gouvernement comptait sur les salariés pour faire évoluer le marché. C’est oublier d’abord que les salariés sont la partie faible de la négociation. C’est oublier ensuite que, sauf exceptions individuelles, ce sont les entreprises qui organisent les conditions de travail et les modalités d’exercice des missions. C’est oublier surtout que le morcellement des tâches n’est pas uniquement le fait d’entreprises qui en ont fait de cœur de leur fonctionnement, et qui dépasseraient effectivement 150 % de taux de rotation, mais que chaque entreprise peut y recourir à la marge.
Or cette flexibilité, cette souplesse, ces outils d’adaptation et de dynamisme, le gouvernement les encourage hautement. Loin d’être pénalisés, ils sont facilités comme en témoigne la création d’un nouveau contrat de travail dédié aux besoins temporaires : le CDD de mission.
Disons-le, il n’est pas possible de favoriser la flexibilité, le juste à temps des contrats de travail pour les entreprises, et de pénaliser les salariés qui se voient imposer ces contrats dans l’espoir qu’ils rééquilibrent les abus du système. Ce n’est pas aux plus faibles de faire la police de l’embauche à la place des institutions. Et diminuer leurs droits, leur sécurité financière, leur faire porter le risque de l’ajustement économique n’est ni juste, ni progressiste. Ce n’est pas la société pour laquelle nous nous battons.
Nous entendons naturellement les vaticinateurs habituels égrener leur chapelet usé par les dévotions : c’est la faute à l’Europe, Macron n’est qu’un exécutant zélé, bla bla bla. Absolument pas. Comme nous l’expliquions cet été, la Commission s’inquiète au contraire de ce que la France a un des taux de précarité du travail les plus important, et l’appelle d’une part à inciter les entreprises à réduire le recours aux contrats de travail de courte durée et d’autre part à favoriser l’insertion des groupes les plus fragiles qui sont contraints d’accepter de travailler à temps partiel. On l’aura noté, il s’agit de la préconisation inverse de la réforme qui nous est présentée.
Si l’on estime qu’une forme de souplesse est essentielle pour le fonctionnement de notre économie, assumons la collectivement. Ce n’est pas aux travailleurs d’en porter le fardeau, ils doivent au contraire en être protégés. Les pays du Nord font ceci sous le nom de flexisécurité, et cela ne se résume pas à imposer des formations aux chômeurs pour les faire sortir des statistiques.
Allons plus loin : organisons cette sécurité au niveau européen. Au-delà du mécanisme temporaire SURE, créons une véritable assurance-chômage européenne, qui soit une facilité de décaissement au niveau régional lorsque l’emploi se dégrade. Les deux grandes crises de 2007 et de 2020 nous ont démontré que le « Quoi qu’il en coûte » est essentiel pour éviter que le chômage s’installe lors d’un choc. Dix ans après, l’Europe paye encore le prix de ne pas l’avoir accepté en 2010. Mais pourquoi réserver cette logique aux crises d’ampleur mondiale ? Pourquoi ne pas nous créer un mécanisme d’ajustement commun, qui réponde par des tous petits « Quoi qu’il en coûte » aux drames locaux qui se jouent autour de la fermeture d’une usine, de la fin d’une branche d’activité menacée par le commerce international ou le renouvellement technologique, ou tout simplement les mouvements lents des populations ? A moyen terme, ils sont aisément remboursés la prospérité revenue, ou par les autres régions du pays. Pouvant rester à l’équilibre sur moyenne période, un tel fonds peut en outre être constitué uniquement entre pays volontaires dans un premier temps.
2008, 2020, sans même compter la crise de l’internet de 2000 … Nous ne pouvons plus guère nous reposer sur l’idée que les grandes crises sont rares, que l’équilibre durable est désormais une marque de fabrique de nos économies. A peine sortis de la pandémie, nous guignons avec méfiance le marché immobilier chinois. L’Europe doit se doter d’un mécanisme qui permette de mutualiser les dettes issues des « Quoi qu’il en coûte » majeurs et de les refinancer dans des fonds de cantonnement. Au lieu d’inventer des plans de relance dans l’urgence, pourquoi ne pas être prêts pour la prochaine ? Protéger les salariés en chômage partiel, protéger les entreprises qui doivent continuer à verser le loyer, garantir les emprunts… Nous savons maintenant ce qu’il faut faire quand tombe la crise, autant anticiper la mobilisation de ces outils. Sinon, ce sont les travailleurs qui paieront.
Très bien, très clair, merci
Eh oui : «…Sinon, ce sont les travailleurs qui paieront.» Et c’est exactement ce que veulent ce gvrt et ce pdt tout comme dans leur réflexion sur la réforme des retraites. C.-à-d. faire payer les pots cassés par la crise au plus grand nombre, tout en continuant de protéger ceux qui se sont enrichis et qui, pour certains pratiquent impunément l’optimisation et l’évasion fiscale !
On attend toujours, de la part de ces veules décideurs, un projet de loi musclé pour empêcher les 80 milliards d’€ annuels, d’échapper au fisc français et donc à la collectivité, en partant dans divers paradis fiscaux.
Très bien. Rechercher l’équilibre tout simplement. Cet article doit être diffusé plus largement.
Merci Arthur pour cet excellent article, je rajoute un autre élément qui permettrait de lutter contre le chômage et la précarité des emplois, la formation professionnelle.
Pour la financer, plusieurs dizaines de milliard d’Euros sont collectés tous les ans, mais ou vont ces fonds ?
Je suis abasourdi d’entendre que nous avons un nombre très important de chômeurs non formés, qui ne peuvent pas répondre aux attentes des entreprises, comment est ce possible avec tous ces milliards dédiés à la formation professionnelle ?
La réponse est que ces fonds sont détournés par des institutions qui s’engraissent sur le dos des chômeurs, les acteurs de ce détournement sont les syndicats, les entreprises et l’état, ils font leur propre cuisine entre eux et ne se soucient surtout pas de former les chômeurs dans les secteurs ou il manquent de la main d’œuvre..
Si la formation au niveau français jouait vraiment le jeu de l’insertion dans la vie professionnelle qui entre parenthèse rendrait sa dignité à l’être humain (c’est cela le vrai social et non l’assistanat), nous n’aurions pas besoin de nous soucier des indemnités de chômage car nous aurions très peu d’actifs valides sans travail.
La véritable révolution à faire, est dans la formation et à l’arrêt des détournements de fonds qu’elle subit.
Pas mal votre article ,mais allez plus loin ,comme rahlf,et mylord dont je partage leurs avis ,j’ajoute ( dsl cela va contribuer à me traiter de complotiste alors que ce ne sont que des faits ) que dans ce domaine comme dans la santé ,l’écologie ,l »éducation et autres finances ,économies … tout est fait pour enrichir les riches ,appauvrir les pauvres ,les soumettre à toujours plus de contrôles ,de charges ( dont les entreprises qui ne sont pas côtées au caca 40) je le dis ,le crie ,la classe politique dans son ensemble avec ce président en tête s’entendent bien pour que rien ne change je les qualifies de mafia corrompus ,ainsi que les 3/4 des juges qui ruinent certains patrons via les tribunaux de commerces .L’urssaf détourne 35 à 40 Milliards des cotisations ( csg crds..) en investissant dans des immeubles privé ,voire leurs directeurs s’enrichissent personnellement à leur propre compte .que dire de la fraude aux retraites ,cartes vitales ,connues depuis 2011 au moins qui représentent 15Milliards par an ,toutes les preuves par les douanes et services financiers sont établies et non ,rien n’est fait ,à qui profite le vol ? prochaine étape black rock et autres mackinsey cie qui lorgnent sur le pactole des retraites .Les élections ( piège à cons ) sont en passe d’être fraudées via les votes par correspondance et électronique comme aux usa .Bon allez j’arrête moi pauvre peigne cul de seconde zone en connait déjà pas mal ,je pourrait écrire plusieurs pages de toutes leurs manipulations ,vols ,meurtres ( oh bien sûr pas de preuve quoique ..) réseaux pédosatanistes ( visez un peu l’ASE) alors quand les 95% se révoltent ,se prennent en main pour virer ces monstres froids ? bye
Oui Frédéric, vous avez tout à fait raison, ce monde que vous décrivez et que nous vivons est pourri, espérons qu’a force des changements se produiront, après 1789 se sera ………?
Il nous reste l’espoir, l’espoir dans les jeunes générations, l’espoir d’un renouveau salutaire, l’espoir sinon nous risquons de perdre la raison et peut-être plus.
L’analyse arthurienne n’est pas celle de dizaines d’économistes dont un prix Nobel, récemment parue dans Le Monde. La réforme vise à réduire les emplois précaires, CDD abusifs, les baus venant aussi bien des entreprises que des travailleurs. Dire qu’elle fait le contraire est une contre-vérité.
La proposition d’une sorte de caisse de chômage européenne est mignonne, comme beaucoup d’utopies, mais n’a pas la moindre chance d’aboutir avant que ne se soit édifiée une Europe fédérale fonctionnant selon la règle de la majorité qualifiée. L’irréalisme a ses charmes, mais moins en dehors des campagnes électorales. On a besoin de solutions maintenant.
Et surtout n’oubliez pas que les modèles économiques auxquels nous les clampins gueuropéens sommes soumis, intègrent tous le fameux indice NAIRU (Non Accelerating Inflation Rate of Unemployement). En résumé, le chômage ne PEUT PAS descendre sous un certain taux, au risque de provoquer l’inflation et donc la dévaluation des précieuses richesses des oligarques…