Les enjeux politiques, économiques, sociaux et environnementaux qui confrontent aujourd’hui les 28 Etats Membres ont atteint un degré d’intensité telle qu’ils sont autant de sources de conflits potentiels majeurs capables de déstabiliser l’équilibre fragile qui les unis au sein de l’Union Européenne.
Ce qui est le plus frappant est l’apparente désinvolture avec laquelle ces problèmes sont abordés. Cette attitude renvoi à deux livres récents où ce phénomène est décrit, le premier se rapportant à l’histoire, le second sondant l’avenir.
D’abord, « Les Somnambules » de Christopher Clark : il décrit l’engrenage qui a conduit, progressivement et insensiblement et dans l’insouciance quasi générale, à l’inévitable confrontation catastrophique de la première guerre mondiale dont le centenaire est remémoré partout cette année.
Ensuite, « Le Capital au XXIème siècle » de Thomas Piketty qui analyse de façon totalement dépassionnée la répartition des richesses et des revenus et les facteurs qui pèsent sur les inégalités. Il pointe du doigt les conséquences inéluctables d’une attitude de « laissez faire » qui serait porteuse de grands risques de déstabilisation.
Chacune des Institutions qui composent l’Union Européenne et chacun des Pays Membres ont une énorme responsabilité pour relever les défis qui se profilent. Que ce soient des problèmes essentiellement d’ordre national tels qu’en France, en Grande-Bretagne, en Belgique ou en Espagne ou d’ordre géopolitique comme en Ukraine, au Moyen Orient ou en Afrique, seule la cohésion des 28 Pays Membres pourra apporter les réponses que la situation exige. Loin d’être contradictoire aux intérêts particuliers de chacun des Pays Membres, c’est, au contraire, la solidarité qui est la condition nécessaire pour préserver l’essentiel de leurs acquis tant matériels (niveau de vie, protection sociale, etc.) qu’immatériels (démocratie, liberté, droits de l’homme, etc.).
C’est pour frapper les esprits que j’ai rédigé ci-dessous, sur un mode délibérément facétieux, une « Ode » au nouveau Président de la Commission en sélectionnant une série limitée de dossiers brûlants, exemplatifs par l’approche « nombrilistique » avec laquelle ils sont traités.
Paul N. Goldschmidt
Ode à Jean-Claude Junker
Président désigné de la Commission Européenne.
(Sur l’air de « Tout va très bien Madame la Marquise ! »)
Allô, allô François!
Quelles nouvelles ?
Bruxellois dans peu de temps,
Je vous appelle ;
Que trouverai-je en arrivant?
Tout va très bien, Monsieur le Président,
Tout va très bien, tout va très bien.
Pourtant, il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
Un incident, une polémique,
L’effondrement d’ la République !
Mais, à part ça, Monsieur le Président,
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô David!
What’s new?
La France implose!
Expliquez-moi
Dear old boy
Ce qui en est la cause ?
Cela n’est rien, Monsieur le Président,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
L’Ecosse nous a fait obstacle,
Albion se trouve en pleine débâcle !
Mais, à part ça, Monsieur le Président
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô Vladimir!
Quelles nouvelles ?
L’Europe chancelle?
Expliquez-moi
O Stratège perfide,
N’est-elle plus qu’une coquille vide?
Cela n’est rien, Tovaritch Président,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
Tant pour l’Ukraine que la Crimée,
C’est à l’Europe de s’incliner!
Mais, à part ça, Tovaritch Président
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô Barak!
Quelles nouvelles ?
La Russie s’apprête
À tout bousiller !
Expliquez-moi
Arbitre planétaire !
Ce qu’il m’incombe de faire ?
Cela n’est rien, my dear Jean-Claude,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
Si Vladimir bombe le torse
Le Califat, lui passe en force !
Mais, à part ça, Monsieur le Président
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô Angela!
Quelles nouvelles ?
L’Islam partout se rebelle?
Expliquez-moi
Gente Chancelière,
Le comment, le pourquoi?
Cela n’est rien, mon très cher Président,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
Boko Haram, Al Qaeda,
Foutent le bordel partout là-bas
Mais, à part ça, Monsieur le Président,
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô mon cher Mario!
Quelles nouvelles ?
L’Euro est-il en perdition ?
Expliquez-moi
Grand Magicien,
Y-a-t-il encore des munitions ?
Cela n’est rien, Monsieur le Président,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
On déplore un tout petit rien :
Les déficits ont explosés !
Et les réformes sont enterrées !
Mais, à part ça, Monsieur le Président,
Tout va très bien, tout va très bien.
Allô, allô, votre Sainteté !
Tout s’écroule autour de moi !
Ma Commission est menacée
Invoquez Dieu pour me sauver !
Cela n’est rien, mon cher enfant,
Cela n’est rien, tout va très bien.
Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise,
La prière seule n’y pourra rien !
Soyez honnête et travailleur,
Fuyez la gloire et les honneurs,
Alors vraiment, Monsieur le Président,
Tout ira bien, tout ira bien !
sympathique,, cette petite chanson. Chacun de ces problèmes est immense et leur énumération a de quoi effrayer le moindre responsable, ce qui explique peut-être l’apparent – et sans doute réel – désarroi de nos dirigeants. Mais que voulons-nous nous mêmes ? Pour quoi sommes nous prêts à vivre et à mourir ? Telle est, me semble-t-il, l’interrogation que chacun a à se poser en fredonnant ces couplets