Westminster sur Seine ?

Après avoir passé les quatre années du Brexit à sourire des affres parlementaires de nos amis britanniques, est-ce maintenant à notre tour d’amuser nos chers voisins, alors que l’Assemblée nationale s’apprête à faire sa rentrée, sans boussole ni majorité ? Les rives du Palais Bourbon vont-elles retentir de rappels à l’ordre dignes des fameux « Order, Order, Or… der ! », clamés d’une voix de stentor par le patron de Westminster de l’époque, l’ineffable et légendaire speaker John Bercow.

Rappelons-nous de ces années de plomb pour la démocratie britannique, où il n’existait ni majorité pour voter un accord de sortie sur le Brexit, ni majorité pour s’y opposer. Les cris de John Bercow ponctuaient alors le long calvaire de la Première ministre Theresa May, nommée à la suite du référendum anglais. Cette dernière, Sisyphe du Brexit, fut bien incapable de « délivrer » cet impossible objet politique, malgré un nombre incalculable de tentatives, lors d’après-midis « tragi-comiques » à Westminster, peuplées de trahisons et de désertions indignes. Un Brexit, qui prendra forme avec l’arrivée de Boris Johnson, et ses procédés « à la hussarde ». Procédés, si peu orthodoxes, voire inconstitutionnels, que leur usage répété finira par lui coûter son poste… Suivront deux autres Premiers ministres, que les remous du Brexit engloutiront également.

Revenons côté Seine. Déjà, nous disposons d’un trait d’union avec la saga du Brexit, au travers de l’inusable Michel Barnier. Le négociateur du Brexit vient juste de s’installer à Matignon, dans une reprise du rôle si ingrat de Theresa May. Reprise avec un zeste d’humour britannique, quand le vénérable savoyard offre, sur le perron de Matignon, une leçon de slalom politique au jeune Gabriel Attal !

Michel Barnier se trouve aujourd’hui dans la position inverse de celle occupée lors du Brexit. Il lui revient maintenant de faire voter un texte, en l’occurrence le Budget, par un Parlement « introuvable ». Un Parlement fruit d’un faux pas de la démocratie française, comme le Brexit le fut, outre-Manche, pour la démocratie britannique. David Cameron, comme Emmanuel Macron ont décidé d’ouvrir la boite de Pandore, pour régler avant tout un problème interne à leur propre camp, en pensant duper leur monde. Difficile ensuite de faire rentrer le diable dans sa boîte !

En cela, ne nous y trompons pas, le scrutin français de début juillet s’est révélé avant tout un referendum sur le RN, et, plus largement, sur le choix de maintenir, ou non, la rationalité au pouvoir. Il n’était pas plus rationnel d’offrir le pouvoir à un gendre idéal sans diplôme ni expérience professionnelle, que de prétendre ressusciter l’Empire Britannique sur les cendres de l’adhésion à l’UE.

A la question de savoir si « deux plus deux font quatre », la souffrance et l’abandon d’une majorité du peuple britannique a conduit à répondre par l’illusion, quand un ultime front républicain hexagonal maintenait la victoire dans le camps de Descartes. Reste à savoir si le spectacle offert ensuite dans l’hémicycle de la démocratie représentative n’en sera pas moins similaire, à tenter de concilier illusion et réalité, populisme et rationalité… « Order, Or… der ! »

Première parution dans Témoignage Chrétien jeudi 12 septembre

Henri Lastenouse
Henri Lastenouse
Vice-Président de Sauvons l'Europe

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